dimanche 18 avril 2010

Exercice d'écriture

Le sujet était : description d'un lieu

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Amélie :

L’annonce disait : 22m², cuisine équipée, salle de bain séparée, proche commerces et tram facultés. C’était il y a neuf mois. Aujourd’hui, la pièce fait toujours la même taille et les commodités n’ont pas changé. Mais les lieux, si.
Sur les murs, des photos, des cartes postales et des cadres ; autant de souvenirs de tranches de vie que l’on voit sans regarder. Autant de présences qui comblent l’espace davantage que les meubles. Une haute étagère de forme triangulaire accueille cinémas, musiques et littératures en tous genres. On dirait qu’elle a été fabriquée pour être placée là, dans ce petit angle perdu, littéralement clouée au bureau pour éviter qu’elle ne soit bancale. Le bureau justement, véritable repère anthropologique. S’y côtoient une imprimante, un boîtier à lunettes –contenant lesdites lunettes–, des blocs de minis post-it® multicolores, des crayons tout aussi bariolés, une oreillette et un chargeur de portable, une brosse à cheveux, des bougies –recommandation maternelle en cas de panne d’électricité–, des dessins d’enfants, une carte de Bordeaux, une liste de courses. Des dictionnaires, en nombre, pour tenter de mener au mieux la difficile tâche de la traduction longue. Des billets de train, sésames pour des voyages salutaires quand la distance devenait trop lourde. De la poussière aussi, un peu trop, qui indique que le ménage n’est vraiment pas la priorité. Et un ordinateur portable, constamment allumé, outil de travail, lien social et vecteur d’évasion. Près du lit, l’étagère suédoise à quatre cases où sont rangés paquet de céréales, farine et boîtes de conserves, rappelle les multiples allers-retours dans le grand magasin bleu à enseigne jaune pour se constituer un petit « chez-soi » confortable. Entre les deux, une valisette bleue estampillée « Istanbul chamber of commerce », fraîche réminiscence de l’escapade livresque parisienne. Outre des livres, qui n’en ont pas bougé depuis, elle recèle des kilomètres parcourus, des rencontres, des découvertes, de la fatigue et des rires, qui viennent se mêler à ceux qui résonnent déjà dans la pièce, recueillis lors de journées thé-traduction-deezer-bavardages. Trois mètres plus loin, sous l’évier, le rebord de la porte du meuble conserve toujours l’empreinte d’un petit animal pressé, à l’origine d’une frayeur sans fin.
Et dans un coin, dissimulé dans l’ombre comme quelque chose que l’on n’a pas vraiment envie de voir, un carton vide annonce déjà le départ à venir.

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Laëtitia Sw. :

Le funiculaire du Tibidabo grimpait, alerte, à flanc de colline, dans la moiteur du soir. Comme à l’accoutumée, il s’apprêtait à déverser son énième flot de passagers devant la lourde grille en fer forgé de la fête foraine, qui matérialisait une barrière symbolique entre deux mondes. De ces hauteurs, la ville, dont on ne percevait plus qu’une vague rumeur, moutonnait, aussi fière et belle qu’une princesse orientale, jusqu’à l’horizon. On racontait que celui qui en avait un jour foulé le sol ne pouvait plus l’oublier et vivait dans l’attente anxieuse de la retrouver. Une attente qui, sous peine de rester insatisfaite, ne connaissait jamais de fin. Comme un sortilège.
C’était bien l’avis de Lorenzo qui, en sortant du petit train, s’était précipité vers le parapet pour la contempler. Il ne se lassait pas de ce spectacle qu’il connaissait par cœur, pourtant. Goûtant avec délice les effluves du jasmin en fleurs, il mesurait une fois encore combien il lui serait impossible de vivre loin d’elle. Absorbé dans ses pensées, il resta immobile, rêveur, pendant un long moment. Cette ville exerçait sur lui un étrange magnétisme. Il avait l’impression de l’avoir toujours connue, et même que ce sentiment datait de bien avant sa naissance, comme s’il flottait là une part irréductible de lui-même, quelque chose de son âme éternelle, en somme. Depuis quelques temps, il sentait vibrer en lui une telle impétuosité qu’il se demandait, un peu décontenancé, ce qu’il lui arrivait. Ce regain de vigueur, comme à l’aube d’une seconde vie, en venait parfois à l’inquiéter. Il ne manquerait plus qu’il couve des élans mystiques ! Il allait devoir surveiller de près cette nouvelle bizarrerie...
Le rire d’un enfant qui passait derrière lui le tira de sa rêverie. Un coup d’œil sur sa montre. Mince ! À tant arriver toujours trop à l’avance, il se trouvait au final immanquablement en retard. Ce qui, en définitive, revenait au même. Jamais dans le tempo. Achronique, voire anachronique. Comme son ardeur fébrile pour cette ville. Désir déraisonnable ? Les esprits fougueux, éternels amoureux enflammés, brûlant d’inexplicables passions étaient aujourd’hui suspects. L’époque n’était plus vraiment au romantisme dix-neuvièmiste. Concrètement, il apparaissait aussi comme un incorrigible étourdi. Il risquait de rater son rendez-vous. Il se mit donc à courir, soudain affolé, vers l’entrée du parc. Il paya en vitesse son billet au guichetier sans âge puis, après lui avoir ravi des mains le ticket magique, il s’élança sous le toit végétal des chênes centenaires.

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Coralie :

Ciel bleu, sans nuages. Des piliers de bétons. Gris. De la ferraille. Des ouvertures sur la mer. Carrés, géométrie, symétrie. La rue. D'autres piliers, les mêmes. Dix mètres de haut. Inachevés. Des tiges de fer, promettant des extensions. Des étais, par centaines. Des échafaudages. En bois. Chantiers inanimés, comme abandonnés. Travaux stoppés. Panorama du quartier : sable, béton, ferraille. La vie ? Fuyant le soleil de plomb. Dans l’ombre, des enfants, pieds nus, la peau brune, les cheveux ébène. Un ballon. Des cris. Des chutes. Des genoux râpés. Assis sur le trottoir, quelques hommes, turbans indigo, jilbabs blancs. Thé à la menthe. Jeu de cartes. Quotidien égyptien. haut. Inachevés ?

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