Je vous l'ai dit, habituellement, je préfère que vous pratiquiez une auto-correction à 100 % – c'est-à-dire que vous regardiez les traductions des autres pour comparer avec les vôtres et que, donc, vous fassiez vous-mêmes les modifications nécessaires. Là, sachant que certains étudiants de Licence 2 rencontrent de réelles difficultés avec l'exercice de la version, j'accepte de vous faire quelques remarques… J'insiste, il ne s'agit pas d'un corrigé ! Il va de soi que je ne peux détailler l'ensemble des propositions qui me sont faites ; raisons pour laquelle j'en ai choisi une au hasard (celle d'Elsa en l'occurrence). Sans doute aura-t-elle le même genre d'erreurs que vous et aurez-vous par conséquent les réponses aux questions que vous vous posez… Néanmoins, s'il reste des points sur lesquels vous avez des incertitudes, rien ne vous empêche de me poser des questions dans les commentaires.
Antonia Sierra, la mujer de Vargas, era veintiséis años menor que él. Al llegar a la cuarentena ya estaba muy gastada, casi no le quedaban dientes sanos en la boca y su aguerrido cuerpo de mulata se había deformado por el trabajo, los partos y los abortos; sin embargo aún conservaba la huella de su pasada arrogancia, una manera de caminar con la cabeza bien erguida y la cintura quebrada, un resabio de antigua belleza, un tremendo orgullo que paraba en seco cualquier intento de tenerle lástima. Apenas le alcanzaban las horas para cumplir su día, porque además de atender a sus hijos y ocuparse del huerto y las gallinas ganaba unos pesos cocinando el almuerzo de los policías, lavando ropa ajena y limpiando la escuela. A veces andaba con el cuerpo sembrado de magullones azules y aunque nadie preguntaba, toda Agua Santa sabía de las palizas propinadas por su marido. Sólo Riad Halabí y la Maestra Inés se atrevían a hacerle regalos discretos, buscando excusas para no ofenderla, algo de ropa, alimentos, cuadernos y vitaminas para sus niños.
Isabel Allende, El oro de Tomás Vargas
Antonia Sierra, la femme de Vargas, était plus jeune que lui de vingt-six ans. En atteignant la quarantaine, elle était déjà très abîmée par la vie, il ne lui restait pratiquement plus aucune dent saine dans la bouche et son corps aguerri de mulâtre avait été déformé par le travail, les accouchements et les avortements ; cependant elle conservait encore l’empreinte de sa fierté passée, sa manière de marcher avec la tête bien relevée et la taille cambrée, la réminiscence d’une ancestrale beauté, un considérable orgueil qui s’arrêtait brusquement en une indifférente intention de la prendre en pitié. Elle avait à peine assez d’heures pour terminer les tâches de sa journée, parce qu’en plus de prendre soin de ses enfants et de s’occuper du jardin et des poules, elle gagnait quelques pesos en cuisinant le déjeuner des policiers, en lavant les vêtements d’autrui et en nettoyant l’école. Parfois elle marchait, le corps semé de contusions bleues et même si personne ne lui demandait, toute l’Agua Santa était au courant des raclées que lui administrait son mari. Riad Halabi et l’institutrice Inès étaient les seuls qui osaient lui faire des cadeaux en douce, en cherchant des excuses pour ne pas l’offenser, quelques affaires comme des vêtements, des aliments, des cahiers et des vitamines pour ses enfants.
Phrase à phrase :
1- Antonia Sierra, la mujer de Vargas, era veintiséis años menor que él.
Antonia Sierra, la femme de Vargas, était plus jeune que lui de vingt-six ans.
OK
2- Al llegar a la cuarentena ya estaba muy gastada, casi no le quedaban dientes sanos en la boca y su aguerrido cuerpo de mulata se había deformado por el trabajo, los partos y los abortos;
En atteignant la quarantaine,
Le verbe « atteindre » est correct, mais à mon avis assez peu naturel ici… N'oubliez pas de vous demander pour chaque phrase, même celles qui semblent faciles au premier abord, comment vous diriez la même chose spontanément en français.
Pourquoi pas, tout simplement : quand elle eut quarante ans / ou alors, encore plus synthétique : À quarante ans (entres autres solutions possibles). J'avoue que je pinaille un peu ; car votre proposition est bien ;-)
elle était déjà très abîmée par la vie,
Ça va – et vous avez eu raison d'ajouter la cheville « par la vie » (sinon, l'effet aurait été bizarre).
La solution que je vous propose : la vie ne l'avait guère épargnée – ça n'est pas une traduction littérale et en l'occurrence, c'est davantage suggestif que ce que vous proposez. Pour ce que je vous demande en cours, votre solution est bien suffisante.
il ne lui restait pratiquement plus aucune dent saine dans la bouche
OK
et son corps aguerri de mulâtre avait été déformé par le travail, les accouchements et les avortements ;
« aguerri »… là non. Vous avez fait une traduction littérale et ça ne va pas. Attention au syndrome de l'españolo facilo (je veux dire par là qu'il ne faut jamais négliger de vérifier le sens de ces mots, en français dans le cas qui nous occupe, dont la traduction semble acquise par le calque.
Vérification faite, vous verrez que ça n'est pas ce qu'a voulu dire Isabel Allende. Non, dans cette phrase il valait mieux quelque chose comme « fatigué »
3- sin embargo aún conservaba la huella de su pasada arrogancia, una manera de caminar con la cabeza bien erguida y la cintura quebrada, un resabio de antigua belleza, un tremendo orgullo que paraba en seco cualquier intento de tenerle lástima.
cependant elle conservait encore
Conserver encore est peut-être un peu redondant. Conservait tout seul suffit.
l’empreinte de sa fierté passée,
« fierté » n'a pas exactement le sens d'arrogance. Et vous en avez d'ailleurs la confirmation dans la description qui suit. Mineur dans un autre contexte, le décalage est ici embêtant car vous changez la personnalité du personnage. Cette femme a été belle et s'est montrée arrogante plus encore que fière. Conclusion : pourquoi avoir changé alors qu'une traduction littérale était le plus simple et donc sans doute le plus juste ? Quand vous avez un doute, ne manquez pas de faire l'effort d'ouvrir le dictionnaire pour bien vérifier le sens des mots et être ainsi certaine de ne pas confondre ou modifier.
una manera de caminar
sa manière de marcher
Si « la » peut effectivement induire un possessif implicite, ça n'est pas le cas de « una » que vous devez la plupart du temps traduire par « une ».
Là, comme le narrateur livre un portrait sous forme d'explication, deux points auraient été les bienvenus :
: une certaine manière de marcher
avec la tête bien relevée et la taille cambrée,
- le « avec » est inutile et un peu lourd.
- « relevée » ne va pas… Est-elle baissée avant ? Je sais que je suis un peu de mauvaise foi, mais mieux vaut être claire et simple : la tête bien droite.
- « taille cambrée » : c'est bien.
la réminiscence d’une ancestrale beauté,
- « réminiscence » ? Pourquoi pas. Je suis surtout contente… car cela manifeste que vous avez fait un vrai travail de recherche pour venir à bout de cette traduction. Bravo ! Sinon, on pouvait opter pour quelque chose de plus simple : « un reste » ou mieux « vestiges » (je le mets au pluriel car cela engloberait la tête et la taille)
un considérable orgueil qui s’arrêtait brusquement en une indifférente intention de la prendre en pitié.
« considérable » est mal choisi… Il y a un adjectif qui va bien avec « orgueil » = démesuré.
qui s’arrêtait brusquement en une indifférente intention de la prendre en pitié = alors là c'est du non-sens. Non seulement vous n'avez pas compris la V.O., mais ce que vous écrivez n'a guère de sens.
Je vous aide et vous essaierez de trouver la solution :
que paraba (le sujet c'est bien l'orgueil démesuré)
en seco = net
cualquier intento de tenerle lástima – attention au « le » de « tenerle »… demandez-vous à quoi ou qui il renvoie.
Proposez-moi autre chose.
Lástima a ici le sens de pitié.
4- Apenas le alcanzaban las horas para cumplir su día, porque además de atender a sus hijos y ocuparse del huerto y las gallinas ganaba unos pesos cocinando el almuerzo de los policías, lavando ropa ajena y limpiando la escuela.
Elle avait à peine assez d’heures pour terminer les tâches de sa journée,
Le sens y est, mais c'est très mal formulé… l'ensemble manquant terriblement de naturel ; partait plutôt vers = elle n'avait pas assez des heures de la journée pour faire tout ce qu'elle avait à faire… [ça n'est qu'un exemple de traduction possible]
parce qu’en plus
penser à « outre »
de prendre soin de ses enfants et de s’occuper du jardin et des poules,
Même si ça n'est pas une règle, essayer de ne pas multiplier les « et »… en l'occurrence, il faut qu'on comprenne plus clairement quels sont les sous-ensembles de la phrase.
de prendre soin de ses enfants, de s’occuper du jardin et des poules,
ganaba unos pesos cocinando el almuerzo de los policías, lavando ropa ajena y limpiando la escuela.
elle gagnait quelques pesos en cuisinant le déjeuner des policiers, en lavant les vêtements d’autrui et en nettoyant l’école.
« cuisiner le déjeuner » ???? Le sens y est mais que c'est mal dit. Diriez-vous spontanément : je vais cuisiner le déjeuner ? N'y a-t-il pas deux ou trois verbes bien mieux adaptés ?
+ un problème qui se pose pour l'ensemble de la phrase : EN cuisinant, EN lavant et EN nettoyant… S'agit-il d'actions concomitantes au fait de gagner de l'argent ou est-ce ainsi qu'elle gagne de l'argent ? Auquel cas il faut construire cela différemment. Voyez ce que vous pouvez me proposer.
« nettoyer l'école » ? Vous nettoyer votre maison, vous, quand vous faites le ménage. Attention de ne pas vous laisser aller au purement et strictement littéral. Gardez de la distance par rapport à la V.O. et ne subissez pas passivement le texte. Là, depuis deux ou trois lignes (et en particulier la grosse difficulté que vous avez rencontrée et qui a abouti à un non-sens), vous vous démobilisez. Il faut rester concentré jusqu'au bout et ne pas perdre pied parce qu'un passage du texte nous a posé problème… Au contraire, cela signifie qu'on risque de perdre des points à cet endroit et qu'il faut bien baliser le reste pour assurer.
5- A veces andaba con el cuerpo sembrado de magullones azules y aunque nadie preguntaba, toda Agua Santa sabía de las palizas propinadas por su marido.
Parfois elle marchait, le corps semé de contusions bleues et même si personne ne lui demandait, toute l’Agua Santa était au courant des raclées que lui administrait son mari.
- La preuve de ce que je viens de vous dire : vous avez traduit « andaba » par « marchait »… et cela n'a pas de sens. Faut-il comprendre que quand elle est assise elle n'a plus de bleus ? Illogique. N'oubliez pas que le verbe « andar » peut être un synonyme de « ser » et « estar ». C'est le genre d'erreur bête et qui coûte énormément de points.
- Ici, nous avons « aunque » + indication ; donc je veux bien que + subjonctif en français.
- « Toute l'Agua Santa » ?????? On ne comprend rien. S'agit-il d'un produit ? Là, cela aurait mérité un peu plus de réflexion ; Agua Santa est le nom du village où se déroule l'action décrite. Attention, même quand vous n'êtes pas certaine de comprendre, n'écrivez pas des choses dont vous voyez manifestement qu'elles n'ont pas de sens. L'impression donnée est très mauvaise.
- Le reste : OK
6- Sólo Riad Halabí y la Maestra Inés se atrevían a hacerle regalos discretos, buscando excusas para no ofenderla, algo de ropa, alimentos, cuadernos y vitaminas para sus niños.
Riad Halabi et l’institutrice Inès étaient les seuls qui osaient lui faire des cadeaux en douce, en cherchant des excuses pour ne pas l’offenser, quelques affaires comme des vêtements, des aliments, des cahiers et des vitamines pour ses enfants.
- Vous auriez dû garder la même syntaxe qu'en V.O. ; cela vous aurait évité un « qui »… Seuls RH et Inès, l'institutrice… Encore une fois : pourquoi avez-vous changé ????
- le « en » est encore inutile.
- algo de ropa, alimentos, cuadernos y vitaminas para sus niños = « quelques affaires comme des vêtements » = CS… algo = un peu, quelques. Donc avec « des », ça suffisait.
Conclusion : le travail a des qualités, mais vous devez faire attention de rester bien concentrée jusqu'au bout et de ne pas vous démobiliser parce que vous rencontrez une difficulté. Et surtout, vous devriez davantage consulter le dictionnaire français – pour vous assurer de votre parfaite connaissance du sens des mots qui vous choisissez.
Je vous ai posé un certain nombre de questions et vous ai invitée à faire des changements. Ce serait bien que vous le fassiez. Mettez vos réponses, etc. dans les commentaires
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire