vendredi 8 janvier 2010

Exercice de version, 49

Cuando yo y Pantaleoncha llegamos a la plaza, los corredores estaban todavía desiertos, todas las puertas cerradas, las esquinas de don Eustaquio y don Ramón sin gente. El pueblo silencioso, rodeado de cerros inmensos, en esa hora fría de la mañana, parecía triste.
—San Juan se está muriendo —dijo el cornetero—. La plaza es corazón para el pueblo. Mira nomás nuestra plaza, es peor que puna.
Pero tu corneta va llamar gente.
—¡Mentira! Eso no es gente; en Lucanas sí hay gente, más que hormigas.
Nos dirigimos como todos los domingos al corredor de la cárcel.
El varayok’ había puesto ya la mesa para el repartidor del agua. Esa mesa amarilla era todo lo que existía en la plaza; abandonada en medio del corredor, sólita, daba la idea de que los saqueadores de San Juan la habían dejado allí por inservible y pesada.
Los pilares que sostenían el techo de las casas estaban unos apuntalados con troncos, otros torcidos y próximos a caerse; sólo los pilares de piedra blanca permanecían rectos y enteros. Los poyos de los corredores, desmoronados por todas partes, derrumbados por trechos, con el blanqueo casi completamente borrado, daban pena.
—Agua, niño Ernesto. No hay pues agua. San Juan se va a morir porque don Braulio hace dar agua a unos y a otros los odia,
—Pero don Braulio, dice, ha hecho común el agua quitándole a don Sergio, a doña Elisa, a don Pedro...
—Mentira, niño, ahora todo el mes es de don Braulio, los repartidores son asustadizos, le tiemblan a don Braulio. Don Braulio es como zorro y como perro.
Llegamos a la puerta de la cárcel y nos sentamos en un extremo del corredor.
El sol débil de la mañana reverberaba en la calamina del caserío de Ventanilla, mina de plata abandonada hacía muchos años. En medio del cerro, en la cabecera de una larga lengua de pedregal blanco, el caserío de Ventanilla mostraba su puerta negra, hueca, abierta para siempre. Gran mina antes, ahora servia de casa de cita a los cholos enamorados. En los días calurosos, las vacas entraban a las habitaciones y dormían bajo su sombra. Por las noches, roncaban allí los chanchos cerriles.

José María Arguedas, « Agua »

***

La traduction que je vous propose :

Quand Pantaleoncha et moi nous arrivâmes sur la place, les couloirs étaient encore déserts, toutes les portes closes et il n'y avait pas âme qui vive à l'angle des rues don Eustaquio et don Ramón. Entouré de collines immenses, silencieux, froid en cette heure matinale, le village avait l'air triste.
— San Juan est en train de mourir – annonça le sonneur de clairon. Une place, c'est comme un cœur pour un village. Regarde pas plus loin que notre place à nous, c'est pire que dans la Puna.
— Mais ton clairon va rameuter des gens.
— Tu parles ! On peut pas appeler ça des gens ; à Lucanas, là oui, d'accord, il y a des gens, encore plus que des fourmis, même.
Comme tous les dimanches, nous prîmes la direction de la prison.
Le varayok' avait déjà installé la table pour la distribution de l'eau. Cette table jaune était tout ce que la place possédait encore ; abandonnée au milieu de l'allée, toute seule, elle donnait l'impression que les pillards de San Juan l'avait laissée là, faute d'une quelconque utilité et parce qu'elle était trop lourde.
Les pilliers qui soutenaient le toit des maisons étaient étayés avec des troncs pour les uns, complètement tordus, proches de s'écrouler pour les autres ; seuls ceux qui étaient en pierre demeuraient droits et entiers. Les bancs des couloirs, très abîmés, écroulés pour nombre d'entre eux, leur peinture blanche presque complètement effacée, faisaient peine à voir.
­— De l'eau, Ernesto, petit. Alors donc il n'y a pas d'eau. San Juan agonise parce que don Braulio commande de donner de l'eau à certains tandis que les autres, il les hait.
— Mais don Braulio dit qu'il a mis l'eau en commun en la confisquant à don Sergio, à doña Elisa, à don Pedro…
— Mensonges, petit ! Tout est à don Braulio, tout. Les répartiteurs sont effrayés, ils tremblent devant don Braulio. Don Braulio est aussi renard qu'il est chien.
Nous arrivâmes à la porte de la prison et nous nous assîmes à un bout du couloir.
Le faible soleil du matin se réverberait sur la calamine du hameau de Ventanilla, une mine d'argent abandonnée depuis de nombreuses années. Au milieu de la colline, à la pointe d'une longue langue de rocaille blanche, le hameau de Ventanilla offrait à la vue sa porte noire, creuse, béante pour toujours. Grande mine autrefois, elle servait à présent de maison de rendez-vous pour les cholos amoureux. Les jours de chaleur, les vaches entraient dans les maisons et dormaient à l'ombre. La nuit, c'était les sangliers qui venaient y ronfler.

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Amélie nous propose sa traduction :

Quand Pantaleoncha et moi arrivâmes sur la place, les couloirs étaient toujours déserts, toutes les portes étaient closes et les coins des rues don Eustaquio et don Ramón infréquentés. Le village silencieux, entouré par d’immenses collines, paraissait triste en cette heure froide de la matinée.
— San Juan se meurt—commenta le cornettiste—. La place est le cœur du village. Regarde ne serait-ce que notre place, c’est pire que la puna.
— Mais ton cornet va attirer des gens.
— Foutaises ! Ce ne sont pas des gens ; à Lucanas, là oui il y a plus de gens que de fourmis.
Comme tous les dimanches, nous nous dirigeâmes vers le couloir de la prison.
Le varayok avait déjà installé la table pour le distributeur d’eau. Cette table jaune était la seule chose qui existait sur la place ; abandonnée au milieu du couloir, toute seule, elle donnait l’impression que les pilleurs de San Juan l’avaient laissée là du fait de son inutilité et de son poids.
Les piliers qui soutenaient le toit des maisons étaient soit étayés avec des troncs, soit tordus et près à s’effondrer ; seuls les piliers de pierre blanche restaient droits et entiers. Partout dans les couloirs, les bancs de pierre en ruine, détruits par endroits, couvert d’une peinture blanche presque complètement effacée, faisaient peine à voir.
— De l’eau, mon petit Ernesto. C’est qu’il n’y a pas d’eau. San Juan va mourir parce que don Braulio demande qu’on donne de l’eau à certains, et en hait d’autres.
— Mais, répondit-il, don Braulio a popularisé l’eau en en retirant le monopole à don Sergio, doña Elisa, don Pedro…
— Foutaises, mon garçon ! A présent, le mois entier revient à don Braulio, les livreurs sont terrorisés, ils tremblent face à don Braulio. Don Braulio est à la fois quelqu’un de rusé et une peau de vache.
Nous arrivâmes devant la porte de la prison et nous nous assîmes à un bout du couloir.
Le soleil pâle du matin se reflétait sur la calamine du hameau de Ventanilla, une mine d’argent désaffectée depuis des années. Au beau milieu de la colline, à l’extrémité d’une longue langue de terrain caillouteux blanc, le hameau de Ventanilla exposait sa porte noire, creuse, ouverte pour l’éternité. Jadis mine réputée, elle servait aujourd’hui de lieu de rendez-vous aux indiens amoureux. Les jours de grande chaleur, les vaches entraient dans les pièces et y dormaient à l’ombre. La nuit, les cochons sauvages y ronflaient.

***

Morgane nous propose sa traduction :

Quand moi et Pantaleoncha arrivâmes à la place, les couloirs étaient toujours déserts, toutes les portes fermées, le coin des rues don Eustaquio et don Ramón vides. Le peuple silencieux, entouré de d’immenses collines, en cette heure froide du matin, semblait triste.
— Saint Jean est en train de mourir – dit le joueur de clairon -. La place est comme le cœur pour le peuple. Regarde rien que notre place, c’est pire que la Puna.
Mais ton clairon va rameuter les gens.
— Mensonge ! Ceux-là ne sont pas des gens ; à Lucanas, oui, il y a des gens, plus nombreux que des fourmis.
Nous nous dirigeâmes comme tous les dimanches vers le couloir de la prison.
Le varayok avait déjà dressé la table pour le distributeur d’eau. Cette table jaune était tout ce qui existait sur la place ; abandonnée au milieu du couloir, toute seule, elle donnait l’idée que les pilleurs de Saint Jean l’avaient laissé là à cause de son inutilité et de sa lourdeur.
Les piliers qui soutenaient le toit des maisons étaient faits de tronc, d’autres tordus et prêts à s’effondrer ; seuls les piliers de pierre blanche restaient droits et entiers. Les bancs de pierre des couloirs, renversés de part et d’autres, démolis depuis un bon bout de temps, avec la peinture presque complètement défraichi, faisaient peine à voir.
— De l’eau, mon petit Ernesto. Alors il n’y a pas d’eau. Saint Jean va mourir car don Braulio donne de l’eau à quelques uns tandis que les autres il les déteste,
— Mais don Braulio, dit-il, a réparti l’eau en privant don Sergio, doña Elisa et don Pedro…
— Mensonge, petit, maintenant ce mois ci c’est au tour de don Braulio, les distributeurs sont craintifs, ils craignent don Braulio.
Don Braulio est comme un renard et comme un chien.
Nous arrivâmes à la porte de la prison et nous nous assîmes à l’autre bout du couloir.
Le faible soleil du matin brillait à travers l’ensemble des maisons en calamine de Ventanilla, mine d’argent abandonnée voici de cela plusieurs années. Au milieu de la colline, au bout d’un terrain blanc et caillouteux, le hameau de Ventanilla arborait sa porte noire, vide, ouverte pour toujours. Jadis mine prestigieuse, elle servait à présent de point de rencontre aux chers amoureux. Les jours de grande chaleur, les vaches entraient dans les pièces et dormaient à l’ombre. La nuit, les cochons sauvages ronflaient.

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