1) Justine Ladaique. Pourriez-vous nous présenter la librairie dans laquelle vous travaillez ?
Jérémy Peck. P. Je travaille dans une petite librairie de quartier, spécialisée en Bandes Dessinées. Elle s’appelle BD-Shop, et est située à Paris, près de la Gare de l’Est. Elle fait environ 70 mètres carrés. J’en suis le responsable mais non le gérant et propriétaire.
2 ) J. L. Pourriez-vous nous parler de votre parcours ; comment êtes-vous devenu libraire ?
J. P. Mon métier me vient d’un parcours direct et voulu, malgré quelques cafouillage initiaux.
Après mon baccalauréat, j’ai intégré la formation en alternance proposée par l’Institut National de Formation de la Librairie de Montreuil. Nous étions en cours une semaine par mois et en librairie le reste du temps.
Puis j’ai suivis une Licence Professionnelle de Librairie décernée par la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université de Mulhouse.
Suite à quoi, j’étais pleinement qualifié et diplômé pour être libraire.
3) J. L. Qui vous propose des livres, et comment ?
J. P. Je reçois régulièrement – environ une fois tous les mois ou tous les deux mois – les représentants des éditeurs de BD. Ce sont des personnes qui me présentent le catalogue de nouveautés d’une ou de plusieurs maisons d’édition. Elles ont bien souvent un visuel, par un ordinateur portable de travail ou par des photocopies, des livres qu’elles me proposent. Elles m’en font une présentation succincte, plus ou moins motivées par leur propre attachement à l’œuvre mais aussi par la connaissance qu’elles ont des besoins de mon commerce, à force de dialogue et d’échanges.
4) J. L. Sur ces propositions, faites-vous des choix ou les acceptez- vous toutes ?
J. P. Je fais un choix généralement assez ouvert, car j’essaye autant que possible de laisser une chance à un titre. Cependant, dans les séries en cours, je refuse systématiquement celles qui ne marchent pas dans mon commerce.
Toute cette sélection est notée sur une liste, avec les quantités, que je conserve pour m’assurer de l’évolution de mes commandes.
C’est aussi pendant cette entrevue que je repère les BD susceptibles de me plaire et que j’aurais envie de lire et peut être de mettre en avant.
5) J. L. Lisez-vous tous les ouvrages que vous proposez ? Sinon, comment les connaître ?
J. P. Autant que possible, je conseille des BD que j’ai lues, car il m’est plus facile d’en expliquer le contenu, et donc plus fiable de trouver la perle qui plaira à mon client. Cependant, je n’ai pas la possibilité de tout lire et de connaître des BD qui plairont à tout le monde. Dans ce cas, je me fie aux conseils que m’ont faits les représentants mais aussi à toute l’information que je reçois de la part des éditeurs ainsi que des sites dédiés à la BD, qui font des descriptifs plutôt complets.
6) J. L. Si vous êtes amené à conseiller quelqu'un, quelle sera votre démarche ?
J. P. La première étape d’un conseil réussi commence par cerner la demande. Il faut défricher rapidement dans l’énorme quantité qui existe. D’abord sur l’âge de mon client, puis sur les genres qui lui plaisent (vie de tous les jours, polar, action, fantasy, historique, science-fiction…), enfin sur ses goûts en matière de dessin et d’histoire. Je demande souvent quels sont les derniers titres qui lui ont plu.
Rien qu’avec ce genre de questions, j’arrive à me faire une idée de ce que cette personne apprécie. Ensuite, il me reste à réfléchir à des titres qui pourraient convenir, à aller les chercher en rayon, à les présenter à la personne. S’ensuit un descriptif, plus ou moins court en fonction de ma connaissance et de mon appréciation personnelle de l’œuvre.
Pour finir, j’essaye toujours de proposer plusieurs titres, afin de laisser un choix au client.
7) J. L. Quels types d'ouvrages propose votre librairie ?
J. P. On y trouve toutes les catégories de Bandes Dessinées couramment connues. Que ce soit les classiques BD Franco-Belges, les BD dédiées à la jeunesse, les BD d’éditeurs indépendants ayant des sujets, des formats et des images parfois insolites, des comix qui sont les BD américaines, les mangas, manhwas, manhua qui sont respectivement les BD japonaises, coréennes et chinoises.
8) J. L. Quelle place y occupe la littérature étrangère ?
J. P. Comme je le disais, on y trouve les équivalents américain, japonais, coréen et chinois de la BD française. Il n’y a que très peu de BD qui paraissent dans le monde hormis ces pays. Cependant, certaines sont traduites et se retrouvent en librairie.
9) J. L. Et Plus particulièrement celle du monde hispanophone ?
J. P. J’avoue ne pas savoir si j’ai effectivement des BD traduites du monde hispanophobe. Probablement une ou deux mais comme il n’est pas précisé en couverture l’origine de la BD, il est difficile de le savoir.
10) J. L. Vous êtes en rapport avec des éditeurs. Qu'en est-il des auteurs ? Des traducteurs ?
J. P. Mon rapport avec les éditeurs est assez limité. Je connais les représentants et quelques rares éditeurs, à titre assez personnel.
Les auteurs sont assez délicats à atteindre. Nous sommes obligés de passer par les maisons d’édition pour les contacter. Cependant, dans le cadre de séances de dédicaces, nous avons la possibilité de découvrir et de parler avec les auteurs. Mais proportionnellement, s’il sort un peu plus de 3000 nouvelles BD par an, je n’en lis qu’environ 500 et je ne rencontre qu’une vingtaine d’auteurs.
Quant aux traducteurs, je n’ai jamais eu l’occasion d’en rencontrer, à titre professionnel. Dans la BD, leur rôle est encore moins visible que dans un roman car la pérennité de l’œuvre est déjà disputée entre scénariste et dessinateur, s’ils ne sont que deux. Mais le monde de la BD aime œuvrer à plusieurs mains et leur nombre monte facilement à 3, 4 voir bien plus (une quinzaine pour les plus gros nombres). De plus, le faible nombre de pays éditeur de BD réduit leur existence dans ce monde.
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