Après une deuxième semaine de stage à la mode parisienne, un autre petit point s’impose. Outre les traditionnelles tâches quotidiennes dont je vous ai déjà parlé la semaine dernière –mise à jour du logiciel Dune, du site pmv et envois des livres aux libraires– j’ai fait de nouvelles découvertes qui me permettent de m’immiscer un peu plus dans le monde de l’édition.
L’événement majeur de la semaine a été les deux réunions avec les représentants (les fameux A et B auxquels j’ai déjà fait allusion) de mercredi dernier, dans le but de préparer la rentrée littéraire. La journée précédente fut donc longue et mouvementée car, comme j’ai pu le vérifier, l’édition n’échappe pas à la règle de « tout faire à la dernière minute ». Succinctement, voici ce qu’il faut savoir sur les représentants : ils sont répartis en deux catégories désignées par deux lettres, les A et les B. Les premiers sont au nombre de quinze et se consacrent aux 400 premières librairies françaises. Chacun est en charge d’un secteur (plutôt vaste) précis –Rive gauche, Rive droite (pour les parisiens), Bretagne, Sud-Est… où il doit faire le tour des libraires pour leur vendre les livres de Lattès et du Masque. Si j’ai bien compris, ces mêmes représentants s’occupent également des Éditions Grasset, autre maison dépendante de l’écurie Hachette. Ils sont « pilotés » par Prolivre, située rue des Saints-Pères à deux pas de Saint-Germain-des-Prés, société dont le rôle est d’assurer la diffusion auprès de ces 400 premières librairies. Quant aux B, ils sont trente, disposent également chacun d’une zone délimitée et s’occupent de la 401e à la 1000e librairie. Pour en revenir aux réunions, nous devons leur présenter les livres que nous allons publier pour la rentrée littéraire, c’est-à-dire pour les mois d’août et de septembre. Pour ce faire, il faut leur fournir les argumentaires de chacun des livres du Masque et de Lattès, les programmes de publication, les livres déjà publiés (il s’agit souvent d’épreuves non corrigées par l’auteur, mais qui ont déjà la bonne couverture) et les planches des couvertures non-imprimées. Un argumentaire est un récapitulatif de tout ce qu’il faut savoir sur le livre pour le vendre (cela m’a fait pensé au fameux Comment parler des livres sans les avoir lus de Laëtitia) et se compose de la couverture finale, d’un résumé bref en deux ou trois lignes, des arguments de ventes (tels que le nombre de ventes du livre précédent si l’auteur est déjà connu, la similitude avec un autre auteur, le succès à l’étranger…), d’un résumé plus détaillé et enfin, en plus petit on trouve le prix, le nombre de page et l’ISBN (carte d’identité du livre). Je crois que je n’ai rien oublié. En ce qui concerne les programmes de publication, ce sont des tableaux Excel où sont indiqués, pour chaque ouvrage, la date de publication, la date d’office (également appelée date de run, c’est la date de sortie du livre en librairie), le nom de l’auteur, le titre, l’ISBN, le code interne à Hachette et le prix. Tout cela était donc à imprimer en 35 exemplaires en couleur, puis à photocopier en 30 exemplaires en noir et blanc. Rien qu’avec ça, je détenais le record du nombre d’impressions-photocopies faites par un stagiaire en une seule journée. C’était sans compter une jeune auteur de 16 ans, fille de Serge et Marine Bramly, deux auteurs également publiés chez Lattès. Ayant reçu le manuscrit de Carmen Bramly quinze jours auparavant, les éditeurs ont décidé de l’inclure dans le programme de la rentrée littéraire. Je savais qu’il fallait que je l’imprime en quinze exemplaires pour les A, afin qu’ils puissent se faire une idée précise du roman. Sauf que jusqu’à mardi en milieu d’après-midi, nous n’étions pas sûrs du titre (nous sommes plusieurs à l’avoir lu lundi soir pour pouvoir donner notre avis) et à la dernière minute, une éditrice a posé une question essentielle : faut-il vraiment le diffuser si tôt ? Après maintes discussions, la réponse fut oui et le titre fut choisi : vers 16h30 mardi, j’ai donc commencé à imprimer mes 15 x 150 pages. Faites le calcul, ajoutez cela aux 25 pages x 65 de tout à l’heure, et vous comprendrez pourquoi je pourrais figurer dans le Guinness ! D’autant plus qu’il fallait que ces manuscrits soient mercredi matin dans les bureaux de Prolivre, et qu’à cette heure-là, il n’y avait plus de coursier. Devinez donc qui a joué ce rôle ? (Quand je vous disais que je m’étais remise au sport, je ne mentais pas !).
La réunion de mercredi matin avec les A s’est très bien passée ; les éditeurs et le directeur commercial se placent autour d’une table avec les représentants, tandis que les autres personnes de la maison d’édition (les attachées de presse, la responsable de la cessation des droits, le chargé en communication, l’assistant de gestion, la directrice administrative et financière) prennent place derrière. On débute par le programme de publication du Masque avant de passer à Lattès. Quand il y a un litige autour d’un titre ou d’une couverture, pas encore définitifs, les représentants ont leur mot à dire, car ils savent pertinemment ce qui se vend ou pas. Ils travaillent d’arrache-pied pour que les libraires acceptent certains livres et parfois, ça paraît vraiment difficile. Pour vous donner un exemple précis, on réédite en juin Les âmes vagabondes, de Stephenie Meyer, avec un chapitre supplémentaire et des confidences de l’auteur. Mais les librairies rechignent à l’acheter car le titre vient de sortir en poche, et ils ont donc des doutes quant aux ventes qu’ils pourront obtenir. En parallèle avec ces présentations effectuées par les éditeurs, certains auteurs viennent eux-mêmes parler de leur ouvrage. Où l’on découvre qu’un bon auteur n’est pas forcément un bon orateur. La plupart du temps, ces échanges se révèlent enrichissants, et s’achèvent même parfois en débat : nous allons publier un nouvel essai d’Olivier Revol, pédopsychiatre, intitulé pour le moment J’en ai plein l’ado. La discussion a donc rapidement évolué vers les problèmes personnels que chacun rencontrait avec son enfant…c’était plutôt cocasse. Au terme de la réunion, les représentants et les éditeurs se retrouvent au restaurant pour déjeuner ; au préalable, j’avais disposé des étiquettes nominatives autour de la table selon le plan de table que mon maître de stage m’avait donné. Une tâche sans doute ingrate, mais plutôt amusante. La seconde réunion, à laquelle je n’ai pas assisté, se déroulait l’après-midi à l’Hôtel Littré, dans le 15e.
Cette semaine, j’ai également consacré une demi-journée à naviguer sur les sites de vente en ligne (Alapage, Amazon, Fnac et Virgin) en vérifiant pour chacun de nos livres parus depuis mars que les renseignements qui s’y trouvaient étaient bien exacts et qu’il y avait le bon visuel de couverture. C’est fou les divergences qui existent entre les sites et la réalité, notamment sur le nombre de page ou le nom des auteurs.
J’ai sûrement fait autre chose durant ces cinq journées, mais je ne vais pas faire un mini-rapport de stage chaque week-end ! Donc je vais m’arrêter là pour aujourd’hui, en vous disant que demain après-midi, je dois rencontrer Joan Peguillan-Schlottenmeier, la responsable de l’achat des droits étrangers pour Lattès-Le Masque. La suite au prochain épisode !
L’événement majeur de la semaine a été les deux réunions avec les représentants (les fameux A et B auxquels j’ai déjà fait allusion) de mercredi dernier, dans le but de préparer la rentrée littéraire. La journée précédente fut donc longue et mouvementée car, comme j’ai pu le vérifier, l’édition n’échappe pas à la règle de « tout faire à la dernière minute ». Succinctement, voici ce qu’il faut savoir sur les représentants : ils sont répartis en deux catégories désignées par deux lettres, les A et les B. Les premiers sont au nombre de quinze et se consacrent aux 400 premières librairies françaises. Chacun est en charge d’un secteur (plutôt vaste) précis –Rive gauche, Rive droite (pour les parisiens), Bretagne, Sud-Est… où il doit faire le tour des libraires pour leur vendre les livres de Lattès et du Masque. Si j’ai bien compris, ces mêmes représentants s’occupent également des Éditions Grasset, autre maison dépendante de l’écurie Hachette. Ils sont « pilotés » par Prolivre, située rue des Saints-Pères à deux pas de Saint-Germain-des-Prés, société dont le rôle est d’assurer la diffusion auprès de ces 400 premières librairies. Quant aux B, ils sont trente, disposent également chacun d’une zone délimitée et s’occupent de la 401e à la 1000e librairie. Pour en revenir aux réunions, nous devons leur présenter les livres que nous allons publier pour la rentrée littéraire, c’est-à-dire pour les mois d’août et de septembre. Pour ce faire, il faut leur fournir les argumentaires de chacun des livres du Masque et de Lattès, les programmes de publication, les livres déjà publiés (il s’agit souvent d’épreuves non corrigées par l’auteur, mais qui ont déjà la bonne couverture) et les planches des couvertures non-imprimées. Un argumentaire est un récapitulatif de tout ce qu’il faut savoir sur le livre pour le vendre (cela m’a fait pensé au fameux Comment parler des livres sans les avoir lus de Laëtitia) et se compose de la couverture finale, d’un résumé bref en deux ou trois lignes, des arguments de ventes (tels que le nombre de ventes du livre précédent si l’auteur est déjà connu, la similitude avec un autre auteur, le succès à l’étranger…), d’un résumé plus détaillé et enfin, en plus petit on trouve le prix, le nombre de page et l’ISBN (carte d’identité du livre). Je crois que je n’ai rien oublié. En ce qui concerne les programmes de publication, ce sont des tableaux Excel où sont indiqués, pour chaque ouvrage, la date de publication, la date d’office (également appelée date de run, c’est la date de sortie du livre en librairie), le nom de l’auteur, le titre, l’ISBN, le code interne à Hachette et le prix. Tout cela était donc à imprimer en 35 exemplaires en couleur, puis à photocopier en 30 exemplaires en noir et blanc. Rien qu’avec ça, je détenais le record du nombre d’impressions-photocopies faites par un stagiaire en une seule journée. C’était sans compter une jeune auteur de 16 ans, fille de Serge et Marine Bramly, deux auteurs également publiés chez Lattès. Ayant reçu le manuscrit de Carmen Bramly quinze jours auparavant, les éditeurs ont décidé de l’inclure dans le programme de la rentrée littéraire. Je savais qu’il fallait que je l’imprime en quinze exemplaires pour les A, afin qu’ils puissent se faire une idée précise du roman. Sauf que jusqu’à mardi en milieu d’après-midi, nous n’étions pas sûrs du titre (nous sommes plusieurs à l’avoir lu lundi soir pour pouvoir donner notre avis) et à la dernière minute, une éditrice a posé une question essentielle : faut-il vraiment le diffuser si tôt ? Après maintes discussions, la réponse fut oui et le titre fut choisi : vers 16h30 mardi, j’ai donc commencé à imprimer mes 15 x 150 pages. Faites le calcul, ajoutez cela aux 25 pages x 65 de tout à l’heure, et vous comprendrez pourquoi je pourrais figurer dans le Guinness ! D’autant plus qu’il fallait que ces manuscrits soient mercredi matin dans les bureaux de Prolivre, et qu’à cette heure-là, il n’y avait plus de coursier. Devinez donc qui a joué ce rôle ? (Quand je vous disais que je m’étais remise au sport, je ne mentais pas !).
La réunion de mercredi matin avec les A s’est très bien passée ; les éditeurs et le directeur commercial se placent autour d’une table avec les représentants, tandis que les autres personnes de la maison d’édition (les attachées de presse, la responsable de la cessation des droits, le chargé en communication, l’assistant de gestion, la directrice administrative et financière) prennent place derrière. On débute par le programme de publication du Masque avant de passer à Lattès. Quand il y a un litige autour d’un titre ou d’une couverture, pas encore définitifs, les représentants ont leur mot à dire, car ils savent pertinemment ce qui se vend ou pas. Ils travaillent d’arrache-pied pour que les libraires acceptent certains livres et parfois, ça paraît vraiment difficile. Pour vous donner un exemple précis, on réédite en juin Les âmes vagabondes, de Stephenie Meyer, avec un chapitre supplémentaire et des confidences de l’auteur. Mais les librairies rechignent à l’acheter car le titre vient de sortir en poche, et ils ont donc des doutes quant aux ventes qu’ils pourront obtenir. En parallèle avec ces présentations effectuées par les éditeurs, certains auteurs viennent eux-mêmes parler de leur ouvrage. Où l’on découvre qu’un bon auteur n’est pas forcément un bon orateur. La plupart du temps, ces échanges se révèlent enrichissants, et s’achèvent même parfois en débat : nous allons publier un nouvel essai d’Olivier Revol, pédopsychiatre, intitulé pour le moment J’en ai plein l’ado. La discussion a donc rapidement évolué vers les problèmes personnels que chacun rencontrait avec son enfant…c’était plutôt cocasse. Au terme de la réunion, les représentants et les éditeurs se retrouvent au restaurant pour déjeuner ; au préalable, j’avais disposé des étiquettes nominatives autour de la table selon le plan de table que mon maître de stage m’avait donné. Une tâche sans doute ingrate, mais plutôt amusante. La seconde réunion, à laquelle je n’ai pas assisté, se déroulait l’après-midi à l’Hôtel Littré, dans le 15e.
Cette semaine, j’ai également consacré une demi-journée à naviguer sur les sites de vente en ligne (Alapage, Amazon, Fnac et Virgin) en vérifiant pour chacun de nos livres parus depuis mars que les renseignements qui s’y trouvaient étaient bien exacts et qu’il y avait le bon visuel de couverture. C’est fou les divergences qui existent entre les sites et la réalité, notamment sur le nombre de page ou le nom des auteurs.
J’ai sûrement fait autre chose durant ces cinq journées, mais je ne vais pas faire un mini-rapport de stage chaque week-end ! Donc je vais m’arrêter là pour aujourd’hui, en vous disant que demain après-midi, je dois rencontrer Joan Peguillan-Schlottenmeier, la responsable de l’achat des droits étrangers pour Lattès-Le Masque. La suite au prochain épisode !
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