Nous l'attendions avec impatience, la voici ! Faisons-en le support de notre « version du vendredi ».
Il va de soi que toutes les traductions qui seront proposées sur le blog et les remarques formulées dans les commentaires ne préjugent en rien de la façon dont le jury établira son barème et fera ses corrections. Cela ne nous empêche pas de travailler et… de nous amuser.
La lluvia, al repiquetear sobre la lucerna, me acosaba como el huésped intempestivo que golpea la aldaba de la puerta, suplicándonos cobijo. Junto al fogón, había un aparador de baquelita, cojo de las cuatro patas, con cajones que fui abriendo sin curiosidad, o en todo caso con esa curiosidad nada delictiva que nos impulsa a saber más sobre las personas que amamos y a infringir el coto vedado de su intimidad, aun a riesgo de descubrir en ese coto motivos que corrompan o enturbien a nuestro amor. En los cajones del aparador reinaba el mismo desorden de las buhardillas, un desorden que en otra persona hubiese suscitado mi rechazo, pero en Chiara me resultaba venial e incluso reconfortante, porque la hacía más accesible. Camuflado entre servilletas y manteles que no respetaban los dobleces, encontré un sobre con fotografías. Supe cuál era su contenido porque el celuloide de los negativos asomaba por una esquina ; vacilé antes de abrirlo, no tanto por la mojigatería o escrúpulo de inmiscuirme en un pasado que no me incumbía, como por el temor de que ese pasado incluyese manchas que no admitiese detergente. Levanté la lengüeta del sobre y extraje las fotogrías con ese temblor del tahúr que desprecinta una baraja compuesta de naipes cuyos dibujos no reconoce ; eran fotogrías campestres, lo cual las convertía en exóticas, pues Venecia es una ciudad colonizada por la piedra que sólo deja crecer la hierba en los jardines de sus palacios. Eran fotografías tomadas al final de la tarde, cuando la luz oblicua alarga las sombras, fotografías en formato menor, sin demasiada definición, o con una definición espectral que las aproximaba a esos retratos desvaídos por la intemperie que ilustraban los epitafios del cementerio de San Michele.
La lluvia, al repiquetear sobre la lucerna, me acosaba como el huésped intempestivo que golpea la aldaba de la puerta, suplicándonos cobijo. Junto al fogón, había un aparador de baquelita, cojo de las cuatro patas, con cajones que fui abriendo sin curiosidad, o en todo caso con esa curiosidad nada delictiva que nos impulsa a saber más sobre las personas que amamos y a infringir el coto vedado de su intimidad, aun a riesgo de descubrir en ese coto motivos que corrompan o enturbien a nuestro amor. En los cajones del aparador reinaba el mismo desorden de las buhardillas, un desorden que en otra persona hubiese suscitado mi rechazo, pero en Chiara me resultaba venial e incluso reconfortante, porque la hacía más accesible. Camuflado entre servilletas y manteles que no respetaban los dobleces, encontré un sobre con fotografías. Supe cuál era su contenido porque el celuloide de los negativos asomaba por una esquina ; vacilé antes de abrirlo, no tanto por la mojigatería o escrúpulo de inmiscuirme en un pasado que no me incumbía, como por el temor de que ese pasado incluyese manchas que no admitiese detergente. Levanté la lengüeta del sobre y extraje las fotogrías con ese temblor del tahúr que desprecinta una baraja compuesta de naipes cuyos dibujos no reconoce ; eran fotogrías campestres, lo cual las convertía en exóticas, pues Venecia es una ciudad colonizada por la piedra que sólo deja crecer la hierba en los jardines de sus palacios. Eran fotografías tomadas al final de la tarde, cuando la luz oblicua alarga las sombras, fotografías en formato menor, sin demasiada definición, o con una definición espectral que las aproximaba a esos retratos desvaídos por la intemperie que ilustraban los epitafios del cementerio de San Michele.
Juan Manuel de Prada, La tempestad, Planeta, 1997.
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La traduction « officielle », La tempête, réalisée par Gabriel Iaculli, Seuil, 2000, p. 161-162 :
La pluie, en criblant la verrière, me harcelait comme un visiteur intempestif qui frappe à la porte et supplie qu'on lui accorde l'hospitalité. Près du réchaud, il y avait un petit meuble bancal en bakélite, dont j'ouvris les tiroirs sans autre curiosité que celle, déplacée, qui nous pousse à en savoir toujours plus sur ceux que nous aimons et à violer la zone interdite de leur intimité, au risque de découvrir dans cette zone des raisons susceptibles de troubler ou de corrompre notre amour. Dans les tiroirs de la petite commode régnait le même désordre que partout ailleurs dans la mansarde, désordre qui, s'il s'était agi de quelqu'un d'autre, m'aurait rebuté, mais qui, étant celui de Chiara, me semblait tolérable et même réconfortant, parce qu'il la rendait plus accessible. Caché entre des serviettes et des nappes pliées en dépit du bon sens, je découvris une enveloppe contenant des photographies, comme me l'apprit le celluloïd des négatifs qui dépassaient d'un coin ; j'hésitai avant de l'ouvrir, moins pas hypocrisie ou parce qu'un scrupule m'interdisait de m'immiscer dans un passé qui ne me regardait pas que par crainte de découvrir dans ce passé des taches résistant à tout détergent. Je soulevai la languette de l'enveloppe, d'où je tirai les photographies avec le tremblement du joueur invétéré qui, en sortant un paquet de cartes de son emballage, ne reconnaît aucune des figures ; c'étaient des photographies prises à la campagne – ce qui leur donnait un air exotique, car Venise est une ville investie par la pierre où l'herbe ne pousse que dans les jardins secrets des palais -, en fin d'après-midi, quand la lumière étire les ombres ; de petits formats assez flous, ou plutôt assez proches de ces radiographies d'ectoplasmes qu'évoquaient les portraits des défunts accompagnant les épitaphes du cimetière de San Michele.
La pluie, en criblant la verrière, me harcelait comme un visiteur intempestif qui frappe à la porte et supplie qu'on lui accorde l'hospitalité. Près du réchaud, il y avait un petit meuble bancal en bakélite, dont j'ouvris les tiroirs sans autre curiosité que celle, déplacée, qui nous pousse à en savoir toujours plus sur ceux que nous aimons et à violer la zone interdite de leur intimité, au risque de découvrir dans cette zone des raisons susceptibles de troubler ou de corrompre notre amour. Dans les tiroirs de la petite commode régnait le même désordre que partout ailleurs dans la mansarde, désordre qui, s'il s'était agi de quelqu'un d'autre, m'aurait rebuté, mais qui, étant celui de Chiara, me semblait tolérable et même réconfortant, parce qu'il la rendait plus accessible. Caché entre des serviettes et des nappes pliées en dépit du bon sens, je découvris une enveloppe contenant des photographies, comme me l'apprit le celluloïd des négatifs qui dépassaient d'un coin ; j'hésitai avant de l'ouvrir, moins pas hypocrisie ou parce qu'un scrupule m'interdisait de m'immiscer dans un passé qui ne me regardait pas que par crainte de découvrir dans ce passé des taches résistant à tout détergent. Je soulevai la languette de l'enveloppe, d'où je tirai les photographies avec le tremblement du joueur invétéré qui, en sortant un paquet de cartes de son emballage, ne reconnaît aucune des figures ; c'étaient des photographies prises à la campagne – ce qui leur donnait un air exotique, car Venise est une ville investie par la pierre où l'herbe ne pousse que dans les jardins secrets des palais -, en fin d'après-midi, quand la lumière étire les ombres ; de petits formats assez flous, ou plutôt assez proches de ces radiographies d'ectoplasmes qu'évoquaient les portraits des défunts accompagnant les épitaphes du cimetière de San Michele.
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La traduction que je vous propose :
Le tambourinement de la pluie sur la lucarne me harcelait, tels ces hôtes importuns qui viennent frapper à la porte à coups de heurtoir, quémandant l'hospitalité. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, avec quatre pieds bancals. J'en ouvris les tiroirs sans réelle curiosité, ou en tout cas avec ce genre de curiosité en rien condamnable qui nous pousse à vouloir en apprendre davantage sur les personnes aimées et à franchir les frontières de leur espace privé, malgré le risque d’y découvrir des éléments susceptibles d'émousser ou de troubler nos sentiments. Dans les tiroirs du buffet régnait le désordre des mansardes ; un désordre qui, venant d’un d’autre, eût provoqué chez moi une réaction de rejet. De la part de Chiara, au contraire, il m’apparaissait comme véniel, voire réconfortant, dans la mesure où il la rendait plus accessible. Camouflé parmi serviettes et nappes pliées n’importe comment, je tombai sur une enveloppe de photos. J’en devinai le contenu parce que le celluloïd des négatifs dépassait à un coin de l’enveloppe ; j’hésitai avant de l’ouvrir, retenu non pas par une éventuelle hypocrisie ou des scrupules à l’idée de m’immiscer dans un passé qui ne me regardait pas, mais par la crainte que ce passé-là présentât des taches pour lesquelles il n’existerait aucun nettoyant assez puissant. Je soulevai le rabat de l’enveloppe et en tirai les photos avec le tremblement du joueur invétéré à l’instant où il sort de son emballage un jeu de cartes dont il ne reconnaît pas les figures ; s’agissant en l’occurrence de photos champêtres, cela les rendait en soi exotiques, car Venise est une ville colonisée par la pierre qui ne laisse guère pousser l’herbe que dans les jardins des palais. Les clichés avaient été pris en fin d’après-midi, au cours de ces moments où la lumière oblique allonge les ombres, des clichés de petit format, à la définition médiocre ou spectrale, qui les faisait ressembler aux portraits fanés par les intempéries ornant les épitaphes du cimetière de San Michele.
Le tambourinement de la pluie sur la lucarne me harcelait, tels ces hôtes importuns qui viennent frapper à la porte à coups de heurtoir, quémandant l'hospitalité. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, avec quatre pieds bancals. J'en ouvris les tiroirs sans réelle curiosité, ou en tout cas avec ce genre de curiosité en rien condamnable qui nous pousse à vouloir en apprendre davantage sur les personnes aimées et à franchir les frontières de leur espace privé, malgré le risque d’y découvrir des éléments susceptibles d'émousser ou de troubler nos sentiments. Dans les tiroirs du buffet régnait le désordre des mansardes ; un désordre qui, venant d’un d’autre, eût provoqué chez moi une réaction de rejet. De la part de Chiara, au contraire, il m’apparaissait comme véniel, voire réconfortant, dans la mesure où il la rendait plus accessible. Camouflé parmi serviettes et nappes pliées n’importe comment, je tombai sur une enveloppe de photos. J’en devinai le contenu parce que le celluloïd des négatifs dépassait à un coin de l’enveloppe ; j’hésitai avant de l’ouvrir, retenu non pas par une éventuelle hypocrisie ou des scrupules à l’idée de m’immiscer dans un passé qui ne me regardait pas, mais par la crainte que ce passé-là présentât des taches pour lesquelles il n’existerait aucun nettoyant assez puissant. Je soulevai le rabat de l’enveloppe et en tirai les photos avec le tremblement du joueur invétéré à l’instant où il sort de son emballage un jeu de cartes dont il ne reconnaît pas les figures ; s’agissant en l’occurrence de photos champêtres, cela les rendait en soi exotiques, car Venise est une ville colonisée par la pierre qui ne laisse guère pousser l’herbe que dans les jardins des palais. Les clichés avaient été pris en fin d’après-midi, au cours de ces moments où la lumière oblique allonge les ombres, des clichés de petit format, à la définition médiocre ou spectrale, qui les faisait ressembler aux portraits fanés par les intempéries ornant les épitaphes du cimetière de San Michele.
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Nathalie nous propose sa traduction :
La pluie, en tombant sur la lucarne, me harcelait comme un hôte importun qui reste suspendu au marteau de la porte, en suppliant de le laisser s’abriter. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, boiteux des quatre pieds, muni de tiroirs que j'ouvris sans curiosité aucune, si ce n'est cette curiosité, qui n'a rien de répréhensible, qui nous pousse à en savoir plus sur les personnes que nous aimons et à pénétrer dans le l’espace privé de leur intimité, même au risque d'y découvrir des raisons qui pourraient corrompre ou obscurcir notre amour. Dans les tiroirs du buffet régnait le même désordre que dans les mansardes, un désordre qui, chez toute autre personne, aurait provoqué mon rejet, mais qui chez Chiara me semblait véniel, voire réconfortant, parce qu'il la rendait plus accessible. Camouflé au milieu des serviettes et des nappes qui ne respectaient pas les plis, je trouvai une enveloppe avec des photographies. Je sus quel en était le contenu car le celluloïd des négatifs dépassait d'un coin de l'enveloppe; j'hésitai avant de l'ouvrir, non pas tant en raison d'une fausse hypocrisie ou des scrupules liés au fait de m'immiscer dans un passé qui ne me concernait pas, que par la crainte que ce passé ne renfermât des taches indélébiles. Je soulevai le rabat de l'enveloppe et j'en sortis les photos avec ce tremblement du joueur qui sort de son emballage un jeu composé de cartes dont il ne reconnaît pas les figures; il s'agissait de photos champêtres, ce qui les rendait exotiques, car Venise est une ville colonisée par la pierre qui ne laisse croître l'herbe que dans les jardins de ses palais. Il s'agissait de photos prises en fin d'après-midi, quand la lumière oblique allonge les ombres, de photos en format réduit, sans grande définition, ou avec une définition spectrale qui les rapprochait de ces portraits à demi effacés par les intempéries, qui ornaient les épitaphes du cimetière de San Michele.
La pluie, en tombant sur la lucarne, me harcelait comme un hôte importun qui reste suspendu au marteau de la porte, en suppliant de le laisser s’abriter. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, boiteux des quatre pieds, muni de tiroirs que j'ouvris sans curiosité aucune, si ce n'est cette curiosité, qui n'a rien de répréhensible, qui nous pousse à en savoir plus sur les personnes que nous aimons et à pénétrer dans le l’espace privé de leur intimité, même au risque d'y découvrir des raisons qui pourraient corrompre ou obscurcir notre amour. Dans les tiroirs du buffet régnait le même désordre que dans les mansardes, un désordre qui, chez toute autre personne, aurait provoqué mon rejet, mais qui chez Chiara me semblait véniel, voire réconfortant, parce qu'il la rendait plus accessible. Camouflé au milieu des serviettes et des nappes qui ne respectaient pas les plis, je trouvai une enveloppe avec des photographies. Je sus quel en était le contenu car le celluloïd des négatifs dépassait d'un coin de l'enveloppe; j'hésitai avant de l'ouvrir, non pas tant en raison d'une fausse hypocrisie ou des scrupules liés au fait de m'immiscer dans un passé qui ne me concernait pas, que par la crainte que ce passé ne renfermât des taches indélébiles. Je soulevai le rabat de l'enveloppe et j'en sortis les photos avec ce tremblement du joueur qui sort de son emballage un jeu composé de cartes dont il ne reconnaît pas les figures; il s'agissait de photos champêtres, ce qui les rendait exotiques, car Venise est une ville colonisée par la pierre qui ne laisse croître l'herbe que dans les jardins de ses palais. Il s'agissait de photos prises en fin d'après-midi, quand la lumière oblique allonge les ombres, de photos en format réduit, sans grande définition, ou avec une définition spectrale qui les rapprochait de ces portraits à demi effacés par les intempéries, qui ornaient les épitaphes du cimetière de San Michele.
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Blandine nous propose sa traduction :
La pluie tambourinait sur la lucarne et me harcelait tel l’invité intempestif qui cogne le heurtoir, nous suppliant de l’héberger. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, les quatre pieds bancals, avec des tiroirs que j’ouvrais sans curiosité, ou dans tous les cas avec cette curiosité rien mois délicieuse qui nous pousse à en savoir plus sur les personnes que nous aimons et à transgresser la chasse gardée de son intimité, même au risque de découvrir dans ce coin caché des motifs qui corrompent ou troublent notre amour. Il régnait dans les tiroirs du buffet le même désordre que dans la mansarde, un désordre qui, chez une autre personne aurait suscité mon rejet, mais qui chez Chiara me paraissait véniel et parfois réconfortant, car cela la rendait plus accessible. Camouflée entre les serviettes et les nappes qui ne respectaient pas les plis, je trouvai une enveloppe avec des photographies. Je savais quel était son contenu car la celluloïd des négatifs apparaissait dans un coin ; j’hésitai avant de l’ouvrir, pas tant par hypocrisie ou par scrupule de m’immiscer dans un passé qui ne me regardait pas, mais plus dans la crainte que ce passé ne renferme des taches qui n’admettent pas de détergent. Je levai la languette de l’enveloppe et en sortis les photographies avec ce tremblement du joueur invétéré, qui dévoile un jeu composé de cartes dont il ne reconnaît point les figures ; c’étaient des photographies champêtres, ce qui les convertissaient en exotiques, car Venise est une ville colonisée par les pierres, qui laissent seulement pousser l’herbe dans les jardins de ses palais. C’étaient des photographies prisent en fin d’après-midi, quand la lumière oblique agrandit les ombres, des photographies de petit format, sans trop de définition, ou avec une définition spectrale qui les rapprochait de ces portraits jaunis par les intempéries qui illustrent les épitaphes du cimetière de Saint Michèle.
La pluie tambourinait sur la lucarne et me harcelait tel l’invité intempestif qui cogne le heurtoir, nous suppliant de l’héberger. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, les quatre pieds bancals, avec des tiroirs que j’ouvrais sans curiosité, ou dans tous les cas avec cette curiosité rien mois délicieuse qui nous pousse à en savoir plus sur les personnes que nous aimons et à transgresser la chasse gardée de son intimité, même au risque de découvrir dans ce coin caché des motifs qui corrompent ou troublent notre amour. Il régnait dans les tiroirs du buffet le même désordre que dans la mansarde, un désordre qui, chez une autre personne aurait suscité mon rejet, mais qui chez Chiara me paraissait véniel et parfois réconfortant, car cela la rendait plus accessible. Camouflée entre les serviettes et les nappes qui ne respectaient pas les plis, je trouvai une enveloppe avec des photographies. Je savais quel était son contenu car la celluloïd des négatifs apparaissait dans un coin ; j’hésitai avant de l’ouvrir, pas tant par hypocrisie ou par scrupule de m’immiscer dans un passé qui ne me regardait pas, mais plus dans la crainte que ce passé ne renferme des taches qui n’admettent pas de détergent. Je levai la languette de l’enveloppe et en sortis les photographies avec ce tremblement du joueur invétéré, qui dévoile un jeu composé de cartes dont il ne reconnaît point les figures ; c’étaient des photographies champêtres, ce qui les convertissaient en exotiques, car Venise est une ville colonisée par les pierres, qui laissent seulement pousser l’herbe dans les jardins de ses palais. C’étaient des photographies prisent en fin d’après-midi, quand la lumière oblique agrandit les ombres, des photographies de petit format, sans trop de définition, ou avec une définition spectrale qui les rapprochait de ces portraits jaunis par les intempéries qui illustrent les épitaphes du cimetière de Saint Michèle.
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Brigitte nous propose sa traduction :
La pluie tambourinant sur la lucarne me harcelait, tel le visiteur importun qui martèle la porte à coups de heurtoir pour réclamer l’hospitalité. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, bancal des quatre pieds, avec des tiroirs que j’ouvris un à un sans réelle curiosité ou, en tout cas, avec cette curiosité qui n’a rien de répréhensible, celle qui nous pousse à en savoir davantage sur les êtres que nous aimons et à enfreindre la chasse gardée de leur intimité, au risque d’y découvrir des raisons susceptibles d’entacher ou de ternir notre amour.
Dans les tiroirs du buffet, il régnait un désordre semblable à celui des mansardes, un désordre qui aurait provoqué ma répulsion s’il avait émané de quelqu’un d’autre, mais qui, chez Chiara, me semblait véniel, voire réconfortant, car il la rendait plus accessible.
Camouflé entre des serviettes de table et des nappes pliés en dépit du bon sens, je trouvai une enveloppe avec des photographies. Je devinai son contenu car le celluloïd des négatifs dépassait à un coin ; j’hésitai à l’ouvrir, non pas à cause de l’hypocrisie ou les scrupules que représentaient le fait de m’immiscer dans un passé qui ne m’appartenait pas, mais plutôt par crainte que ce passé ne soit entaché de salissures auxquelles ne conviendrait aucun détergent efficace.
Je soulevai le rabat de l’enveloppe et en tirai les photographies avec ce tremblement du joueur qui découvre un jeu de cartes dont il ne reconnaît pas les figures. C’était des photographies champêtres, ce qui les rendait exotiques en soi, car Venise est une cité envahie par la pierre qui ne laisse pousser l’herbe que dans les jardins de ses palais. C’était des clichés pris en fin d’après-midi, à l’heure où la lumière rasante étire les ombres, des photographies petit format, pas très nettes, ou dont la définition spectrale faisait penser à ces portraits décolorés par les intempéries qui illustraient les épitaphes du cimetière de San Michele.
La pluie tambourinant sur la lucarne me harcelait, tel le visiteur importun qui martèle la porte à coups de heurtoir pour réclamer l’hospitalité. Près du foyer, il y avait un buffet en bakélite, bancal des quatre pieds, avec des tiroirs que j’ouvris un à un sans réelle curiosité ou, en tout cas, avec cette curiosité qui n’a rien de répréhensible, celle qui nous pousse à en savoir davantage sur les êtres que nous aimons et à enfreindre la chasse gardée de leur intimité, au risque d’y découvrir des raisons susceptibles d’entacher ou de ternir notre amour.
Dans les tiroirs du buffet, il régnait un désordre semblable à celui des mansardes, un désordre qui aurait provoqué ma répulsion s’il avait émané de quelqu’un d’autre, mais qui, chez Chiara, me semblait véniel, voire réconfortant, car il la rendait plus accessible.
Camouflé entre des serviettes de table et des nappes pliés en dépit du bon sens, je trouvai une enveloppe avec des photographies. Je devinai son contenu car le celluloïd des négatifs dépassait à un coin ; j’hésitai à l’ouvrir, non pas à cause de l’hypocrisie ou les scrupules que représentaient le fait de m’immiscer dans un passé qui ne m’appartenait pas, mais plutôt par crainte que ce passé ne soit entaché de salissures auxquelles ne conviendrait aucun détergent efficace.
Je soulevai le rabat de l’enveloppe et en tirai les photographies avec ce tremblement du joueur qui découvre un jeu de cartes dont il ne reconnaît pas les figures. C’était des photographies champêtres, ce qui les rendait exotiques en soi, car Venise est une cité envahie par la pierre qui ne laisse pousser l’herbe que dans les jardins de ses palais. C’était des clichés pris en fin d’après-midi, à l’heure où la lumière rasante étire les ombres, des photographies petit format, pas très nettes, ou dont la définition spectrale faisait penser à ces portraits décolorés par les intempéries qui illustraient les épitaphes du cimetière de San Michele.
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Odile nous propose sa traduction :
La pluie tambourinant sur la lucarne me harcelait comme un hôte importun qui frappe le heurtoir de la porte suppliant qu'on l'abrite. Près du fourneau se trouvait un buffet en bakélite, bancal des quatre pieds, dont j'ouvris les tiroirs, sans curiosité, ou du moins avec cette curiosité en rien condamnable qui nous pousse à en savoir davantage sur les personnes que nous aimons et à violer l'espace privé de leur vie intime, malgré le risque d'y découvrir des motifs qui pourraient altérer ou troubler notre affection. Dans les tiroirs du buffet régnait le même désordre que dans la mansarde, un désordre qui, venant de toute autre personne aurait provoqué mon rejet d'un tel acte mais qui, concernant Chiara me paraissait véniel et même réconfortant, car il la rendait plus accessible. Cachée entre des serviettes de table et des nappes mal pliées, je trouvai une enveloppe contenant des photographies. J'en devinai me contenu parce que le celluloïd des négatifs perçait un des coins ; j'hésitai avant de l'ouvrir, non pas tant par fausse hypocrisie ou par scrupule à m'immiscer dans un passé qui ne me concernait pas, mais par crainte que ce passé ne renferme/ ne renfermât des taches pour lesquelles il n'existerait aucun détergent assez puissant. Je soulevai le rabat de l'enveloppe et retirai les photographies avec ce tremblement du tricheur qui ouvre un jeu composé de cartes dont il ne reconnaît pas les figures; il s'agissait des photos champêtres, ce qui les rendait exotiques, car Venise est une ville colonisée par la pierre qui ne laisse place à l'herbe que dans les jardins de ses palais. C'était des photographies prises en fin d'après-midi, quand la lumière oblique étire les ombres, des photographies de petit format, sans beaucoup de définition, ou plutôt avec une définition spectrale qui les rapprochait de ces portraits décolorés /ternis/fanés par les intempéries illustrant les épitaphes du cimetière de San Michele.
La pluie tambourinant sur la lucarne me harcelait comme un hôte importun qui frappe le heurtoir de la porte suppliant qu'on l'abrite. Près du fourneau se trouvait un buffet en bakélite, bancal des quatre pieds, dont j'ouvris les tiroirs, sans curiosité, ou du moins avec cette curiosité en rien condamnable qui nous pousse à en savoir davantage sur les personnes que nous aimons et à violer l'espace privé de leur vie intime, malgré le risque d'y découvrir des motifs qui pourraient altérer ou troubler notre affection. Dans les tiroirs du buffet régnait le même désordre que dans la mansarde, un désordre qui, venant de toute autre personne aurait provoqué mon rejet d'un tel acte mais qui, concernant Chiara me paraissait véniel et même réconfortant, car il la rendait plus accessible. Cachée entre des serviettes de table et des nappes mal pliées, je trouvai une enveloppe contenant des photographies. J'en devinai me contenu parce que le celluloïd des négatifs perçait un des coins ; j'hésitai avant de l'ouvrir, non pas tant par fausse hypocrisie ou par scrupule à m'immiscer dans un passé qui ne me concernait pas, mais par crainte que ce passé ne renferme/ ne renfermât des taches pour lesquelles il n'existerait aucun détergent assez puissant. Je soulevai le rabat de l'enveloppe et retirai les photographies avec ce tremblement du tricheur qui ouvre un jeu composé de cartes dont il ne reconnaît pas les figures; il s'agissait des photos champêtres, ce qui les rendait exotiques, car Venise est une ville colonisée par la pierre qui ne laisse place à l'herbe que dans les jardins de ses palais. C'était des photographies prises en fin d'après-midi, quand la lumière oblique étire les ombres, des photographies de petit format, sans beaucoup de définition, ou plutôt avec une définition spectrale qui les rapprochait de ces portraits décolorés /ternis/fanés par les intempéries illustrant les épitaphes du cimetière de San Michele.
2 commentaires:
Salut!!
Pequeños retoques al texto "La tempestad" de la versión 2009 del CAPES:
"La lluvia, ..., me acosaba como...." (línea 1)
"el mismo desorden que en la buhardilla" (línea 9)
"...que no admitiesen" (línea 17)
Bonne traduction.
Merci à Carmencita !
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