La question était la suivante :
« Le traducteur doit-il être imperméable à tout sentiment personnel pour mieux se couler dans ceux des personnages dont il a la charge… »
Sur 15 votants :
Oui = 8 voix (53%)
Non = 7 voix (46%)
Je laisse à l'initiatrice du sondage d'en faire le commentaire. À mon avis, comme les résultats sont très serrés, cela mérite peut-être d'affiner un peu la question avec un nouveau sondage pour creuser ce qui constitue manifestement une difficulté… et de taille puisqu'il s'agit rien moins que de la nature de l'implication du traducteur dans l'histoire sur laquelle il travaille. J'attends les consignes de l'amie Jacqueline.
Le commentaire de Jacqueline :
Tout d’abord, replaçons les choses dans leur contexte : tout part en effet d’un message que j’envoie à Caroline à la suite du post du 27 mars (version « Los de mi barrio se quejan » d’Elvira Lindo, Yo y el imbécil.). Le voici in extenso :
« Bonjour Caroline, me permets-tu de te dire que je n'ai pas aimé ton illustration : cet œil qui semble saigner me "terrorise", on dirait celui dans la tombe qui regardait Caïn… il est tellement joli ce texte, si plein d'humour et de tendresse, moi, j'aurais bien vu le grand-père et son petit-fils (je te fais grâce de la prostate!) s'appuyant l'un sur l'autre ». En retour, j’obtiens aussitôt la belle image « et au milieu coule la rivière… » que vous pouvez voir sur le blog, assortie de ce bref commentaire : « Que tu es sentimentale ! » Vous me connaissez, cela m’a inquiétée, dès lors, je n’avais plus qu’une solution : proposer un sondage. Je n’ai pas fait appel en vain à vous, mes sœurs, vous avez toutes répondu. Las, vous n’êtes pas d’accord, et moi, je suis encore plus perplexe.
Prenons donc un exemple : je traduis « El Sexto », ça, on ne peut pas l’ignorer, il y a là un vilain méchant, d’ailleurs, il s’appelle Puñalada, c’est dire ; moi, je n’ai pas été élevée dans le culte des méchants, Puñalada, ce n’est pas ma tasse de thé -mais mon futur éditeur (soyons fous) n’en a cure-, vais-je au détour d’une phrase par le choix d’un mot plutôt que d’un autre (on peut aussi tuer avec des mots) laisser percer le bout de l’oreille ? Personnellement, à la question ainsi posée : «Le traducteur doit-il être imperméable à tout sentiment personnel pour mieux se couler dans ceux des personnages dont il a la charge…», moi, j’ai répondu « oui ». J’ai bien parlé de « charge », donc de responsabilité. Pour celles d’entre nous qui ont eu la chance de partager l’écoute de Claire Cayron, lors du dernier cours de Pascale Sardin, souvenons-nous de ce que dit la traductrice : la traduction est une écriture mais une écriture seconde, elle doit suivre ; soulignant ainsi que c’est le message que veut faire passer l’auteur qui compte et que ses personnages lui appartiennent. Je pense pour ma part que je dois essayer de les comprendre de l’intérieur à travers le regard de celui qui les a créés.
« Le traducteur doit-il être imperméable à tout sentiment personnel pour mieux se couler dans ceux des personnages dont il a la charge… »
Sur 15 votants :
Oui = 8 voix (53%)
Non = 7 voix (46%)
Je laisse à l'initiatrice du sondage d'en faire le commentaire. À mon avis, comme les résultats sont très serrés, cela mérite peut-être d'affiner un peu la question avec un nouveau sondage pour creuser ce qui constitue manifestement une difficulté… et de taille puisqu'il s'agit rien moins que de la nature de l'implication du traducteur dans l'histoire sur laquelle il travaille. J'attends les consignes de l'amie Jacqueline.
Le commentaire de Jacqueline :
Tout d’abord, replaçons les choses dans leur contexte : tout part en effet d’un message que j’envoie à Caroline à la suite du post du 27 mars (version « Los de mi barrio se quejan » d’Elvira Lindo, Yo y el imbécil.). Le voici in extenso :
« Bonjour Caroline, me permets-tu de te dire que je n'ai pas aimé ton illustration : cet œil qui semble saigner me "terrorise", on dirait celui dans la tombe qui regardait Caïn… il est tellement joli ce texte, si plein d'humour et de tendresse, moi, j'aurais bien vu le grand-père et son petit-fils (je te fais grâce de la prostate!) s'appuyant l'un sur l'autre ». En retour, j’obtiens aussitôt la belle image « et au milieu coule la rivière… » que vous pouvez voir sur le blog, assortie de ce bref commentaire : « Que tu es sentimentale ! » Vous me connaissez, cela m’a inquiétée, dès lors, je n’avais plus qu’une solution : proposer un sondage. Je n’ai pas fait appel en vain à vous, mes sœurs, vous avez toutes répondu. Las, vous n’êtes pas d’accord, et moi, je suis encore plus perplexe.
Prenons donc un exemple : je traduis « El Sexto », ça, on ne peut pas l’ignorer, il y a là un vilain méchant, d’ailleurs, il s’appelle Puñalada, c’est dire ; moi, je n’ai pas été élevée dans le culte des méchants, Puñalada, ce n’est pas ma tasse de thé -mais mon futur éditeur (soyons fous) n’en a cure-, vais-je au détour d’une phrase par le choix d’un mot plutôt que d’un autre (on peut aussi tuer avec des mots) laisser percer le bout de l’oreille ? Personnellement, à la question ainsi posée : «Le traducteur doit-il être imperméable à tout sentiment personnel pour mieux se couler dans ceux des personnages dont il a la charge…», moi, j’ai répondu « oui ». J’ai bien parlé de « charge », donc de responsabilité. Pour celles d’entre nous qui ont eu la chance de partager l’écoute de Claire Cayron, lors du dernier cours de Pascale Sardin, souvenons-nous de ce que dit la traductrice : la traduction est une écriture mais une écriture seconde, elle doit suivre ; soulignant ainsi que c’est le message que veut faire passer l’auteur qui compte et que ses personnages lui appartiennent. Je pense pour ma part que je dois essayer de les comprendre de l’intérieur à travers le regard de celui qui les a créés.
2 commentaires:
Un début de réflexion sur le commentaire que Jacqueline fait de son sondage : certes, mais il faut prendre garde à ne pas s'approprier le texte dans ce qui lui appartient en propre (dimension bien délicate à découvrir et aux frontières souvent floues, je te l'accorde, mais bien réelles)… notamment pour éviter une trop épaisse et donc, finalement, opacifiante superposition d'images – pour reprendre à dessein les propos de Vincent –, celles de l'auteur, celles de l'éditeur (par le biais de la photo de couv, de la rédaction de la 4e, du dossier de presse, etc.) celles du traducteur, celles du correcteur… et j'en passe. Or je pense qu'investir trop profondément les personnages d'un autre – même s'il n'est que le père ;))))) – a quelque chose d'un viol… oui, c'est ça, une pénétration interdite. Après cette prise de possession par la force – y compris quand on enrobe cela de bons sentiments et en faisant valoir les meilleures raisons du monde – on ne pourra qu'exiger d'imprimer notre marque à nous sur l'autre, a fortiori quand cet autre est un étranger dans notre langue et n'a guère les moyens de faire entendre sa voix. Les personnages ont une vie autonome… respectons-là, pourrait dire le slogan.
en fait, mon propos se voulait plus modéré, point de viol ni de possession par la force, je parlais simplement d'essayer''de comprendre les personnages de l'intérieur" ce qui me paraît bien la moindre des choses. Alors, où mettre la limite, c'est peut-être ça, le vrai sondage ; si les personnages deviennent trop envahissants, il faut reprendre pied dans la réalité, la vie s'en charge d'ailleurs très bien, ou bien s'évader vers d'autres cieux, tiens, moi, je vais aller faire un bout de chemin en compagnie de Luis Mariano, c'est moins dangereux!
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