mardi 2 juin 2009

Une information sous forme de billet, de la part de Jacqueline

En photo : bibliotheque sainte-genevieve - 1 par Doctor Casino

Le dépliant qui présente la Bibliothèque Sainte Geneviève dit pompeusement que "le vestibule d'entrée est la caverne obscure de l'ignorance, dont le lecteur s'arrache au fur et à mesure qu'il gravit l'escalier pour atteindre la salle de lecture, temple du savoir". En ce moment ce n'est pas tout à fait exact, on apprend beaucoup de choses dans le vestibule grâce à l'exposition Imprimeurs, éditeurs et lecteurs humanistes que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer.
Entre autres que parmi les nombreuses innovations et découvertes qui marquent l'âge de la Renaissance, le livre imprimé s'affirme à partir de la seconde moitié du 15ème siècle comme le fruit majeur et le principal outil de "l'humanisme", ce large courant intellectuel caractérisé par un puissant renouvellement des savoirs. Les imprimeurs-libraires son alors des acteurs essentiels de ce phénomène. 2 étapes : de la fin du 15ème au 1er tiers du 16ème, âge d'or d'une Res publica literaria fondée sur une communité de langues et culturellement marquée par une pratique inédite de l'échange et stimulée par le rôle de "passeurs" majeurs (tels erasme, Guillaume Budé).
Le livre imprimé est alors le lieu d'évolutions fondamentales imposées par des logiques proprement humanistes de disposition ou d'appréhension du texte. Normalisation orthographique et typographique et "mise au point de systèmes de capitulation destinés à raffiner et fixer de manière pérenne les divisions des textes". La publication conjointe d'un texte dans les différentes versions qui l'ont transmis ou avec la traduction de l'humaniste qui en assure l'édition, l'utilisation de signes et de dispositifs paginaux spécifiquement conçus pour l'établissement des textes classiques, constituent autant d'inventions élaborées dans le laboratoire typographique des passeurs de textes de la Renaissance. Un exemple : Erasme, éditeur d'Euripide de chez Bade (1506), impose un interlignage généreux qui détermine de grandes respirations blanches. Edition destinée à un public étudiant qui devait pouvoir apposer ses notes entre les lignes du texte et dans la marge extérieure -
Dans une seconde étape, on constate la part croissante des langues vernaculaires dans l'édition et des tensions religieuses qui contribuent à introduire un certain cloisonnement dans une géographie intellectuelle et savante juisqu'ici largement ouverte. Les livres illustrent les différentes problématiques de l'édition et des usages humanistes du livre : transmission des classiques grecs et latins, relations entre auteurs et imprimeurs, rôle de la traduction et des langues nationales etc... Autre exemple : Gilles Corrozet, auteur -et libraire - de Les divers propos mémorables des nobles et illustres hommes de la chrétienté, 1557, collection d'énoncés dignes de mémoire supposés aider le lecteur dans la conduite de son existence, aujourd'hui rassemblés sous l'appellation de littérature "gnomique". Ce genre littéraire, qui est aussi une forme éditoriale, constitue dans la tradition humaniste un filon spécifique, à la fortune exceptionnelle. L'auteur-éditeur prolonge chaque "propos" d'un paragraphe en italique dans lequel il s'exprime personnellement, livrant une explication historique ou une conclusion proverbiale.
Une collection de manuscrits très anciens à regarder avec respect et envie : de quoi rêver, à l'heure où l'Harmattan s'apprête à lancer sous forme d'abonnement, encore à l'étude, une bibliothèque d'e-book : l'Harmathèque.

Aucun commentaire: