mardi 7 septembre 2010

Version pour le 6 septembre

Desperté con sobresalto, dolorido, en la oscuridad de un coche en movimiento cuyas ventanillas estaban cegadas. Sentía un peso extraño en las muñecas, y al moverme escuché un tintineo metálico que me llenó de espanto: llevaba grilletes de hierro, y éstos se hallaban sujetos al suelo del carruaje con una cadena. A través de las rendijas vislumbré luz, por lo que deduje era ya entrado el día. De cualquier modo, yo no tenía idea del tiempo transcurrido desde mi prisión; pero el carruaje rodaba a velocidad regular, y a veces, en las cuestas, oía el chasquido del látigo y los gritos del cochero fustigando a las mulas. También sonaban cascos de caballerías junto al estribo, yendo y viniendo. Me conducían, pues, fuera de la ciudad, encadenado y con escolta. Y según había oído al caer preso, quien me llevaba era la Inquisición. No había que estrujarse mucho el magín para concluir lo evidente: si alguien tenía un negro futuro en perspectiva, ese alguien era yo.
Lloré. Me puse a llorar con desconsuelo en la oscuridad traqueteante del carruaje, donde nadie podía verme. Lloré hasta que no me quedaron lágrimas, y luego, sorbiéndome los mocos, me acurruqué en un rincón y me puse a esperar, muerto de miedo. Como todos los españoles de entonces, yo sabía suficiente de los usos inquisitoriales –aquella siniestra sombra formó durante años y años parte de nuestras vidas– para conocer cuál era mi destino: las temibles mazmorras secretas del Santo Oficio, en Toledo.
Creo haber hablado antes a vuestras mercedes de la Inquisición. Lo cierto es que no fue aquí peor que en otros países de Europa; aunque holandeses, ingleses, franceses y luteranos, que eran entonces nuestros enemigos naturales, la incluyeran en esa infame Leyenda Negra con la que justificaron el saqueo del imperio español en la hora de su decadencia. Verdad es que el Santo Oficio, creado para velar por la ortodoxia de la fe, en España fue más riguroso que en Italia y Portugal, por ejemplo, y aún peor en las Indias Occidentales. Pero Inquisición hubo también en otros sitios. Y además, con su pretexto o sin él, tudescos, franceses e ingleses chamuscaron más heterodoxos, brujas y pobres desgraciados que los quemados en España; donde, merced a la puntosa burocracia de la monarquía austriaca, todos y cada uno de los chicharrones que hubo, muchos pero no tantos, figuran debidamente registrados con procesos, nombres y apellidos. Cosa de la que no pueden presumir, por cierto, los gabachos del Rey cristianísimo de Francia, los malditos herejes de más arriba o la Inglaterra siempre falsa, miserable y pirata; que cuando quemaban ellos lo hacían alegremente y a montón, sin orden ni concierto y según les venía en ganas o en intereses, condenado hatajo de hipócritas. Además, en aquel tiempo la justicia seglar era tan cruel como la eclesiástica, y las gentes también lo eran, por incultura y por afición natural del vulgo a ver descuartizar al prójimo. De cualquier modo, la verdad es que a menudo la Inquisición fue un arma de gobierno en poder de reyes como nuestro cuarto Felipe, que dejó en sus manos el control de cristianos nuevos y judaizantes, la persecución de brujos, bígamos y sodomitas, e incluso la potestad de censurar libros y combatir el contrabando de armas y caballos, y el de la moneda y su falsificación. Esto, con el argumento de que contrabandistas y monederos falsos perjudicaban grandemente los intereses de la monarquía; y quien era enemigo de ésta, defensora de la fe, lo era también de Dios, en corto y por derecho.

Vanessa nous propose sa traduction :

Je me réveillai en sursaut, endolori, dans l'obscurité d'une voiture en marche dont les fenêtres étaient murées. Je sentais un poids étrange sur mes poignets, et en bougeant, j'entendis un tintement métallique qui m'emplit d'effroi : on m'avait mis les fers, et eux-mêmes étaient attachés au sol du carrosse par une chaîne. Par les fentes j'entrevis de la lumière, j'en déduis donc que le jour s'était levé. De toute façon, depuis ma prison, je n'avais aucune idée du temps écoulé ; mais le carrosse roulait à vitesse moyenne, et parfois, dans les côtes, j'entendais le claquement du fouet et les cris du cocher fustigeant les mules. Allant et venant, des sabots d'autres montures sonnaient aussi à côté du marche-pied. En somme, on me conduisait hors de la ville, enchaîné et avec une escorte. Et selon ce que j'avais entendu en tombant dans leurs mains, mes geôliers, c'était l'Inquisition. Nul besoin de se creuser la cervelle pour en venir à la conclusion évidente : si quelqu'un avait un avenir sombre en perspective, c'était bien moi.
Je pleurai. Je me mis à pleurer à grand-peine dans l'obscurité cahotante du carrosse, là où personne ne pouvait me voir. Je pleurai jusqu'à n'avoir plus de larmes, et ensuite, reniflant profondément, je me blottis dans un coin et me mis à attendre, mort de peur.
Comme tous les Espagnols d'alors, j'en savais assez sur les usages inquisiteurs – cette ombre sinistre plana sur nos vies des années durant – pour connaître quel était mon destin : les terribles cachots secrets du Saint-Office, à Tolède.
Je crois avoir parlé auparavant à vos grâces de l'Inquisition. Ce qui est certain, c'est qu'elle fut aussi terrible ici qu'ailleurs en Europe, même si les Hollandais, les Anglais, les Français et les luthériens, qui étaient alors nos ennemis naturels, l'inscrivaient dans cette infâme Légende Noire par laquelle ils justifièrent le sac de l'empire espagnol à l'heure de sa décadence.
Il est vrai que le Saint-Office, créé pour maintenir l'orthodoxie de la foi, fut plus rigoureux en Espagne qu'en Italie ou au Portugal, par exemple, et pire encore aux Indes Occidentales. Mais l'Inquisition eut court aussi en d'autres lieux. En outre, sous ce prétexte ou non, les tudesques, les Français et les Anglais jetèrent au flambeau plus d'hétérodoxes, de sorcières et de pauvres malheureux que ceux brûlés en Espagne ; lieu où, grâce à la bureaucratie pointue de la monarchie autrichienne, l'ensemble des hommes qu'on brûla vif – beaucoup mais pas tant que cela – figure au registre en bonne et due forme avec procès, noms et prénoms. Fait duquel ne peuvent se vanter, par ailleurs, les gabachos du Roi Très-Chrétien de France, les maudits hérétiques de plus haut ou une Angleterre toujours plus fausse, misérable et pirate. Car quand ceux-là brûlaient, ils le faisaient allègrement et à foison, sans aucun ordre et selon leur donnait l'envie ou l'intérêt, satané lot d'hypocrites. De surcroît, en ces temps-là la justice séculière était aussi cruelle que l'ecclésiastique, et les gentils l'étaient également, par ignorance ou par penchant naturel de la masse à voir écarteler son prochain. De toutes les manières, la vérité est que, souvent, l'Inquisition fut une arme de gouvernement entre les mains de rois tel Philippe IV le Grand, qui lui laissa la faculté de contrôler les nouveaux chrétiens et les judaïsants, de persécuter les enchanteurs, les bigames ou les sodomites, et jusqu'au pouvoir de censurer les livres et de combattre la contrebande d'armes et de chevaux, et celui de la monnaie et de sa falsification. Tout ceci, en argumentant que les contrebandiers et les faux-monnayeurs nuisaient grandement aux intérêts de la monarchie ; et celui qui était l'ennemi de cette juridiction-là, protectrice de la foi, l'était aussi de Dieu, aussi simplement que cela.

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Jessica nous propose sa traduction :

Le capitaine Alastriste
Je me suis réveillé en sursaut, endolori, dans l’obscurité d’une voiture en mouvement aux fenêtres fermées. Je sentais un poids étrange sur mes poignets, en les bougeant j’ai entendu un cliquetis métallique qui m’a rempli d’effroi : je portais des menottes, qui se trouvaient attachées au sol de la calèche avec une chaine. A travers les fentes j’ai aperçu la lumière, j’en ai donc déduit que le jour se levait. Quoi qu’il en soit, je n’avais aucune notion du temps qui été passé depuis mon emprisonnement, mais la calèche roulait à une vitesse régulière, et parfois, dans les côtes, j’entendais le claquement des coups de fouet et les cris du cocher fustigeant les mules. Les sabots des montures des chevaliers résonnaient juste à côté du marchepied, allant et venant. Ils m’emmenaient donc hors de la ville, menotté et escorté. Selon ce que j’avais réussi à entendre lors de mon arrestation, c’était l’Inquisition qui m’emmenait. Il n’était pas nécessaire de se casser la tête pour arriver à l’évidence : si quelqu’un avait en perspective un avenir sombre, ce quelqu’un c’était moi.
J’ai pleuré. Je me suis mis à pleurer, inconsolable, dans l’obscurité agitée de la calèche, où personne ne pouvait me voir. J’ai pleuré jusqu’à n’avoir plus de larme, et ensuite, tout en reniflant, je me suis recroquevillé dans un coin et je me suis mis à attendre, mort de peur. Comme tous les Espagnols de cette époque, j’en savais assez sur les usages inquisitoriaux- cette sinistre ombre a plané sur nos vies durant plusieurs années- pour connaître ce qu’il en était de mon futur : les redoutables cachots secrets du Saint-Office, à Tolède.
Je pense avoir déjà parlé à vos grâces de l’Inquisition. Ce qui est sur, c’est qu’elle n’a pas été plus terrible ici que dans d’autres pays d’Europe ; même si les Hollandais, les Anglais, les Français et les luthériens, qui étaient alors nos ennemis naturels, l’ont inclus dans cette infâme Légende Noire, avec laquelle ils ont justifié le sac de l’empire espagnol à l’heure de sa décadence. La vérité est que le Saint-Office, crée pour veiller sur l’orthodoxie de la foi, a été plus rigoureuse en Espagne qu’en Italie et au Portugal, par exemple, et encore pire dans les Amériques Occidentales. Mais l’Inquisition a existé dans d’autres pays. De plus, avec ou sans son prétexte, les Tudesques, les Français et les Anglais ont brulé plus d’hétérodoxes, de sorcières et de pauvres malheureux qu’en Espagne, où, grâce à la pointilleuse bureaucratie de la monarchie autrichienne, tous et chacun des prisonniers qu’il y a eu, beaucoup mais pas tous, ont été registrés avec procédures, noms et prénoms. Chose dont ne peuvent certes pas se vanter les « Français » du roi chrétien de France, les maudits hérétiques plus au nord ou l’Angleterre toujours fausse, misérable et pirate, quand eux ils brulaient, ils le faisaient avec joie et en masse, sans ordres ni de concert mais selon leurs envies ou leurs intérêts, ils condamnaient un tas d’hypocrites. De plus, à cette époque, la justice laïque était aussi cruelle que la justice ecclésiastique, et les gens l’étaient aussi, par manque de culture et par un penchant naturel du peuple à voir se faire dépecé autrui. De toute façon, il faut dire que l’Inquisition a souvent été une arme du gouvernement au pouvoir des rois comme notre Philipe IV, à qui ont a laissé entre les mains le control des nouveaux chrétiens et des judaïsant, la persécution des sorcières, des bigames et des sodomites, mais aussi le pouvoir de censurer les livres et de combattre la contrebande d’armes et de chevaux, ainsi que celui de la monnaie et de sa falsification. Tout cela avec comme argument que les contrebandiers et les faussaires nuisaient gravement aux intérêts de la monarchie. Et celui qui était l’ennemi de ce défenseur de la foi, l’était aussi de Dieu, court et droit.

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Auréba nous propose sa traduction :

Je me suis réveillé en sursaut, dans l’obscurité d’une voiture en mouvement dont les vitres étaient cachées. Je sentais un poids étrange dans mes poignets, et en bougeant, j’ai entendu un tintement métallique qui m’a rempli d’épouvante : je portais des fers, ceux-ci étaient fixés au plancher de la voiture avec une chaine. À travers les fentes, j’ai entrevu de la lumière, j’en ai déduit qu’il faisait déjà jour. De toute façon, moi, je n’avais pas idée du temps écoulé depuis ma prison ; mais la voiture roulait à une vitesse régulière, et des fois, dans les pentes, j’entendais le claquement du fouet et les cris du cocher en train de fustiger les mules. Des sabots de montures aussi tintaient près de l’étrier, en faisant des allées et venues. On me conduisait, donc, hors de la ville, enchainé et avec escorte. Et selon ce que j’avais entendu en me faisant emprisonner, c’était l’Inquisition qui me transportait. Il n’y avait pas à se creuser la cervelle pour conclure ce qui était évident : si quelqu’un avait un sombre futur en perspective, ce quelqu’un, c’était moi.
J’ai pleuré. Je me suis mis à pleurer avec chagrin dans l’obscurité cahotante de la voiture, où personne ne pouvait me voir. J’ai pleuré jusqu’à ce qu’il ne me reste plus de larmes, et ensuite, en reniflant, je me suis recroquevillé dans un coin et me suis mis à attendre, mort de peur. Comme tous les espagnols d’alors, moi, j’en savais suffisamment sur les méthodes de l’Inquisition – cette ombre sinistre a fait partie de nos vies pendant des années et des années – pour connaitre quel était mon destin : les redoutables oubliettes secrètes du Saint Office à Tolède.
Je crois vous avoir parlé avant de l’Inquisition. Ce qui est sûr, c’est que ça n’a pas été pire ici que dans d’autres pays d’Europe ; bien qu’ hollandais, anglais, français et luthériens, qui étaient alors nos ennemis naturels, l’avaient inclue dans cette infâme Légende Noire avec laquelle ils ont justifié le pillage de l’empire espagnol au moment de sa décadence. Il est vrai que le Saint Office, créé pour veiller à l’orthodoxie de la foi, a été plus rigoureux en Espagne qu’en Italie et aux Indes, par exemple, et encore pire aux indes Occidentales. Mais Inquisition il y a eu aussi à d’autres endroits. Et en plus, avec son prétexte ou sans lui, des tudesques ,et des français, et des anglais ont flambé plus d’hétérodoxes, de sorcières et de pauvres malheureux que les brûlés en Espagne, où, grâce à la pointilleuse bureaucratie de la monarchie autrichienne, tous les morceaux de viande carbonisée qu’il y a eu , beaucoup mais pas tellement, figurent convenablement enregistrés avec des procès, des prénoms et des noms de famille. Ce dont ne peuvent pas se vanter, à ce propos, les gavaches du très chrétien Roi de France, les maudits hérétiques se trouvant plus haut ou l’Angleterre toujours fausse, misérable et pirate ; qui quand ils brulaient, eux, le faisaient avec joie et en tas, sans aucun ordre et au gré de leurs envies ou intérêts, maudit tas d’hypocrites. En plus, en ce temps là, la justice laïque était aussi cruelle que l’ecclésiastique, et les gentils aussi l’étaient, par ignorance, et par penchant naturel du commun des mortels à voir son prochain se faire mettre en pièce. De toute façon, la vérité, c’est que souvent, l’Inquisition a été une arme de gouvernement au pouvoir de rois comme notre quatrième Philippe, qui a laissé dans ses mains le contrôle de nouveaux chrétiens et judaïsants, la persécution de sorcières, bigames et sodomites, et même le pouvoir de censurer des livres et de combattre la contrebande d’armes et de chevaux, et celle de la monnaie et sa falsification. Ceci, avec l’argument que les contrebandiers et faux-monnayeurs portaient grandement préjudice aux intérêts de la monarchie ; et celui qui était ennemi de cette dernière, protectrice de la foi, l’était aussi de Dieux, inéluctablement.

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Julie nous propose sa traduction :

Je me réveillai en sursaut, endolori, dans l’obscurité d’une voiture en mouvement dont les vitres étaient obstruées. Je sentais un poids étrange sur mes poignets, et en remuant je perçus un tintement métallique qui me remplit d’effroi : je portais des menottes de fer, et celles-ci étaient maintenues au sol du carrosse au moyen d’une chaîne. À travers les fentes, j’entrevis de la lumière, ce qui me fit comprendre qu’il faisait déjà jour. De toute manière, je n’avais aucune idée du temps qui s’était écoulé depuis mon arrestation ; mais le carrosse avançait à vitesse régulière. Parfois, dans les côtes, je discernais le claquement du fouet et les cris du cocher fustigeant les mules. Il y avait aussi le bruit des sabots qui se mêlait à celui des étriers, allant et venant. On me conduisait, donc, hors de la ville, enchaîné et avec une escorte. Et d’après ce que j’avais entendu en étant fait prisonnier, c’était l’Inquisition qui m’emmenait. Il ne fallait pas beaucoup se creuser la tête pour en venir à l’évidence : si quelqu’un avait un avenir funeste en perspective, c’était bien moi. Je pleurai. Je me mis à pleurer avec affliction dans la noirceur cahotante du carrosse, là où personne ne pouvait me voir. Je pleurai jusqu’à ce qu’il ne me reste plus de larmes. Ensuite, en reniflant, je me recroquevillai dans un coin et me mis à attendre, mort de peur. Comme tous les espagnols de mon époque, je connaissais suffisamment les usages inquisitoriaux -cette ombre sinistre fit partie de nos vies durant de nombreuses années- pour savoir quel était mon destin : les redoutables cachots secrets du Saint-Office, à Tolède.
Je crois vous avoir déjà parlé de l’Inquisition. Il est sûr que la situation ne fut pas pire ici que dans d’autres pays d’Europe ; même si les hollandais, les anglais, les français et les luthériens, qui étaient alors nos ennemis jurés, l’ont inscrite dans cette infâme Légende Noire par laquelle ils justifièrent le pillage de l’Empire espagnol à l’heure de sa décadence. Il est vrai que le Saint-Office, créé en vue de veiller sur l’orthodoxie de la foi, fut plus rigoureux en Espagne qu’en Italie et au Portugal, par exemple, et pire encore dans les Indes Occidentales. Mais l’Inquisition exista également en d’autres lieux. Par ailleurs, avec ou sans ce prétexte, des allemands, des français et des anglais firent flamber plus d’hétérodoxes, de sorcières et de pauvres malheureux qu’il n’en fut brûlés en Espagne : où, grâce à la bureaucratie pointilleuse de la monarchie autrichienne, absolument tous les calcinés qu’il y eut, nombreux mais pas tant que cela, figurent dûment enregistrés par procès, noms et prénoms. Chose dont ne peuvent pas se vanter, bien évidemment, ces français au Roi extrêmement chrétien, les maudits hérétiques situés plus au nord ou bien l’Angleterre toujours fourbe, misérable et canaille ; car lorsque ceux-ci brulaient ils le faisaient allègrement et en grande quantité, à tort et à travers et en se laissant porter par l’envie ou les intérêts. Un abominable tas d’hypocrites. Du reste, à cette époque, la justice laïque était aussi cruelle que l’ecclésiastique. Les gens l’étaient eux aussi, par manque de culture et par un attrait naturel du peuple à voir son prochain se faire mettre en pièces. Quoi qu’il en soit, il est irréfutable que l’Inquisition fut souvent une arme de gouvernement en possession des rois comme notre quatrième Felipe, qui laissa aux mains de celle-là le contrôle de nouveaux chrétiens et de judaïsants, la persécution de sorciers, de bigames et de sodomites, et même le pouvoir de censurer des livres et de combattre la contrebande d’armes et de chevaux, ainsi que celle de la monnaie et de sa falsification. Tout cela, avec l’argument que les contrebandiers et les faux-monnayeurs portaient grand préjudice aux intérêts de la monarchie. En effet, qui était l’ennemi de celle-ci, avocate de la foi, était d’office l’ennemi de Dieu.

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Florian nous propose sa traduction :

Je me réveillai en sursaut, endolori, dans l'obscurité d'un chariot en mouvement dont les fenêtres étaient murées. Je sentais une pression étrange sur mes poignées et en bougeant, j'entendis un tintement métallique qui m'emplit d'effroi: j'avais des fers qui étaient fixés au sol de la voiture par une chaîne. A travers les fentes j'entrevis la lumière, j'en déduisis qu'il faisait déjà jour. De tout façon, je n'avais aucune idée du temps qui s'était écoulé depuis ma capture; par contre, la voiture roulait à vitesse moyenne et parfois, dans les montées, j'entendais le claquement de la cravache et les cris du cochers en fouettant les mules. Il me semblait reconnaître aussi des casques de la cavalerie qui allaient et venaient, à côté de l'étrier. On me conduisait donc, hors de la ville, enchainé et escorté. Et d'après ce que j'avais entendu au moment de mon arrestation, c'était l'Inquisition qui m'emmenait. Il n'était pas nécessaire de se torturer l'esprit pour comprendre une évidence: s'il y avait quelqu'un dont les perspectives d'avenir étaient sombres, c'était bien moi.
je pleurai, je me mis à pleurer à chaudes larmes dans la noirceur oscillante de la voiture où personne ne pouvait me voir. Je pleurai jusqu'à n'avoir plus de larmes, et ensuite, tout en reniflant je me blottis dans un coin, à attendre, mort de faim. Comme tous les Espagnoles d'alors, je connaissais très bien les pratiques inquisitoriales- cette ombre sinistre plana durant des années et des années sur nos vies - pour deviner quelle allait être ma prochaine destination: les impitoyables cachots secrets du Saint-Office de Tolède. Je crois vous avoir déjà parlé de l'Inquisition. Il est certain que mon sort ne fut pas pire ici que dans d'autres pays d'Europe, même si les Hollandais, les Anglais, les Français et les luthériens étaient à ce moment-là nos ennemis naturels, ils l'incluaient dans cette infâme Légende Noire avec laquelle ils justifièrent le pillage de l'empire espagnol à l'heure de sa décadence. La vérité, c'est que le Saint-Office, crée pour veiller sur la bonne pratique de la foi, fut plus rigoureux en Espagne qu'en Italie et qu'au Portugal par exemple, et bien plus encore que dans les Indes Occidentales. Mais l'Inquisition existait aussi dans bien d'autres lieux. D'ailleurs, avec ou sans se prétexte, les Tudesques, les Français et les Anglais ont envoyé aux bûchers plus d'hétérodoxes, de sorcières et de pauvres malheureux qu'en Espagne, où, grâce à la pointilleuse bureaucratie de la monarchie autrichienne, chacun des carbonisés qu'il y eut, beaucoup mais pas tant que cela, étaient soigneusement enregistrés par le procédé, noms et prénoms. Ce dont ne peuvent évidemment pas se venter les gavaches du très chrétien Roi de France, les maudits hérétiques d'un peu plus haut, ni l'Angleterre, toujours fausse, misérable et fripouille; car quand ils condamnaient aux bûchers, eux, le faisait dans la joie et en masse, sans ordre ni mandat et selon leurs envies ou leurs intérêts, quels satanés tas d'hypocrites. De plus, à cette époque la justice laïque était aussi cruelle que l'ecclésiastique, et les gens l'étaient également, que se soit par inculture ou par le penchant naturel de la foule à voir son prochain se faire dépecer. De toute manière, la vérité c'est que l'Inquisition fut, la plut part du temps, une arme au service du roi, comme ce fut le cas avec notre quatrième Felipe, qui prit entre ses mains le contrôle des chrétiens nouveaux ou judaïsants, qui entreprit la persécution de sorciers, des bigames et sodomites, et s'octroya même le droit de censurer certains livres et de combattre la contrebande d'armes et de chevaux, ainsi que celle de la monnaie et de sa falsification. Ceci sous l'argument que les contrebandiers et les trafiquants de fausses monnaies portaient grandement préjudices aux intérêts de la monarchie , et celui qui était ennemi de cette dernière, protectrice de la foi, était également l'ennemi de Dieux, purement et simplement.

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Olivier nous propose sa traduction :

Je me réveillai en sursaut, le corps endolori, dans une coche dont les fenêtres avaient été condamnées. Je ressentis un étrange poids aux poignets, et en remuant, j’entendis un cliquetis métallique qui me remplit de stupeur : des fers m’avaient été attachés, ceux-ci se trouvant fixés par une chaîne au sol du carrosse. Par un interstice, j’aperçus la lumière du soleil, j’en déduis donc que le jour s’était levé. Quoi qu’il en soit, je n’avais aucune idée du temps écoulé depuis ma sortie de prison, la coche roulait à une vitesse moyenne, et quelquefois, dans les montées, j’entendais le claquement du fouet et les cris du cocher qui cravachait les mules. On entendait aussi, dans un mouvement de va-et-vient, tinter les étriers contre l’armure des chevaux. Ainsi, on me conduisait loin de la ville, enchaîné et escorté. Et selon ce que j’avais entendu lors de mon emprisonnement, ceux qui m’emmenaient étaient des inquisiteurs. Il n’y avait pas besoin de se creuser les méninges pour comprendre l’évidence : si un homme devait faire face à la perspective d’une sombre destinée, j’étais cet homme.
J’ai pleuré. Je me mis à pleurer désespérément dans l’obscurité branlante de la coche, là où personne ne pouvait me voir. J’ai pleuré jusqu’à ce que les larmes me manquent, puis, après les avoir séchées, je me suis blotti dans un coin et j’ai attendu, mort de peur. Comme tous les espagnols de l’époque, j’en savais assez des pratiques inquisitoriales – ce sinistre spectre qui fit parti de nos vies pendant tant d’années – pour savoir ce que l’on me réservait : les terribles cachots secrets du Saint Office à Tolède.
Gentilshommes, je crois vous avoir parlé auparavant de l’Inquisition. Ce qui est certain est que ce ne fut guère mieux dans d’autres pays européens, et ce malgré les témoignages de nos ennemis naturels de l’époques, hollandais, français et luthériens, retranscris dans cette infâme Légende Noire, celle-là même qui a servi à justifier le saccage de l’empire espagnol dans ses années de décadence.
Il est vrai que le Saint Office, créé pour veiller au maintien de l’orthodoxie de la foi, fut en Espagne plus rigoureux par exemple qu’en Italie et au Portugal, ou plus encore qu’aux Indes Occidentales. Mais bien d’autres territoires ont connu eux aussi l’Inquisition. De plus, teutons, français et anglais ont, s’appuyant ou non sur elle, fait rôtir plus d’hétérodoxes, de sorcières et de pauvres gens que le royaume d’Espagne, où grâce à la pointilleuse bureaucratie de la monarchie autrichienne, on peut retrouver soigneusement enregistrés, les procès, les noms et prénoms de chaque brûlé, dont le nombre, bien qu’important, n’est guère excessif. Les goitreux sujets de sa très chrétienne Majesté le Roi de France, les hérétiques du Nord ou encore l’Angleterre, éternelle sournoise, pirate et misérable ne peuvent se targuer d’une telle chose. Ceux-ci, groupuscules d’hypocrites incapables, lorsqu’ils brûlaient, le faisaient allègrement et sans compter, sans ordre ni obligation, suivant leurs envies et leurs intérêts. De plus, en ces temps, la justice séculière était aussi cruelle que l’ecclésiastique, tout comme les gens, incultes et naturellement enclins à assister au dépeçage de leur prochain. Dans tous les cas, il est vrai que l’Inquisition fut souvent une arme politique dans les mains des rois, comme dans celles de notre souverain Philippe qui la laissa se charger du contrôle des nouveaux convertis et des chrétiens judaïsants, de la persécution des sorciers, des bigames et des sodomites. Il lui octroya aussi le pouvoir de censurer les livres, de combattre le trafic d’armes et de chevaux, de s’occuper de la frappe de la monnaie et de punir sa falsification, justifiant pour ce dernier point que les contrebandiers et les faussaires portaient un immense préjudice aux intérêts de la monarchie et, quiconque se déclarait ennemi de celle-ci, protectrice de la foi, était aussi, et sans appel possible, ennemi de Dieu.

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Alexis nous propose sa traduction :

Je me réveillai en sursautant, endolori, dans l'obscurité d'une voiture en mouvement dont les fenêtres étaient bouchées. Je sentais un poids étrange sur les poignets, et alors que je bougeai j'entendis un tintement métalique qui me remplit de panique : j'avais des fers et ceux-ci se étaient accrochés au sol du véhicule par une chaîne. A travers les fentes je distinguai de la lumière, j'en déduis que le jour était déjà levé. De toute manière, je n'avais aucune idée du temps qui s'était écoulé depuis ma prison ; mais la voiture roulait à vitesse régulière, et quelques fois, dans les pentes, j'entendais le claquement du fouet et les cris du cocher fustigeant les mules. Les sabots des montures sonnaient également ainsi que l'étrier, allant et venant. On me conduisait, donc, hors de la ville, enchaîné et sous escorte. Et d'après ce que j'avais entendu quand j'ai été serré, c'était l'Inquisition qui m'emmenait. Il n'y avait pas à se creuser beaucoup les méninges pour en arriver à la conclusion évidente : si quelqu'un avait un avenir plein d'ennuis en perspective, ce quelqu'un c'était moi.
Je pleurai. Je me mis à pleurer de chagrin dans l'obscurité cahotante du véhicule, là où personne ne pouvait me voir. Je pleurai jusqu'à ce qu'il ne me reste plus aucune larme, et ensuite, en avalant la morve, je me blottis dans un coin et me mis à attendre, mort de peur. Comme tous les Espagnols d'alors, j'en savais suffisamment des habitudes de l'Inquisition - cette ombre sinistre fit partie de nos vies pendant des années et des années - pour savoir quel était mon destin : les effroyables cachots secrets du Saint Office, à Tolède.
Je crois avoir déjà parlé à vos grâces de l'Inquisition. Ce qui est certain c'est cela n'a pas été pire ii que dans d'autres pays d'Europe : même les Hollandais, les Anglais, les Français et les Luthériens, qui étaient alors nos ennemis naturels, l'incluaient dans cette infâme Légende Noire par laquelle ils justifiaient le sac de l'empire espagnol au moment de sa décadence. La vérité c'est que le Saint Office, créé pour veiller à la bonne pratique de la foi, fut en Espagne plus rigoureux qu'en Italie et au Portugal, par exemple, et bien pire que dans les Indes Occidentales. Mais il y eut également une Inquisition en d'autres endroits. Et d'ailleurs, en invoquant ou non le prétexte de l'Inquisition, les Allemands, les Français et les Anglais flambèrent plus d'hétérodoxes, sorcières et pauvres malheureux que les brûlés en Espagne ; où, grâce à la pointilleuse burocratie de la monarchie autrichienne, chacun des pruneaux qu'il y eut, beaucoup mais pas tant que ça, étaient dûment registré avec procès, noms et pénoms. Chose que ne peuvent prétendre, soit dit en passant, les gavaches du Roi très chrétien de France, les maudits hérétiques de là-haut ou l'Angleterre toujours fausse, misérable et pirate ; qui, quand ils brûlaient, eux le faisaient allégrement et à tout va, sans ordre ni autorisation et selon leurs envies ou leurs intérêts, un vrai tas d'hypocrites. D'ailleurs, en ce temps là, la justice laïque était tout aussi cruelle que l'écclésiastique, et les gens l'étaient également, par manque de culture ou par un penchant naturel du peuple à voir décortiquer son prochain. De toute manière, la vérité c'est que souvent l'Inquisition fut une arme du gouvernement aux mains de rois tels que notre quatrième Felipe, qui laissa entre leurs mains le contrôle des nouveaux chrétiens et des judaïques, la persécution des sorciers, bigames et sodomites, et même le pouvoir de censurer des livres et combattre la contrebande d'armes et de cheveux, ainsi que la falsification de la monnaie. Cela, sous prétexte que les contrebandiers et les faux-monnayeurs causaient d'énormes préjudices aux intérêts de la monarchie : et celui qui était l'ennemi de cette dernière, défendeuse de la foi, l'était également de Dieu, point final.

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Stéphanie nous propose sa traduction :

Je me réveillai en sursaut, endolori, dans l'obscurité d'une voiture en mouvement dont les fenêtres étaient calfeutrées. Je sentais un poids étrange sur mes poignets et lorsque je bougeai, j'entendis un tintement métallique qui me remplit d'effroi : je portais des menottes qui étaient accrochées au sol du fiacre à l'aide d'une chaîne. À travers les rainures, j'entrevis de la lumière, j'en déduisis donc que le jour était déjà levé. De toute façon, je n'avais aucune idée du temps écoulé depuis mon emprisonnement ; mais le fiacre roulait à une vitesse moyenne, et parfois, dans les côtes, j'entendais le claquement du fouet et les cris du cocher fustigeant les mules. Les sabots de la monture claquaient contre l'étrier, allant et venant. On me conduisait donc, hors de la ville, enchaîné et escorté. Et d'après ce que j'avais entendu lorsqu'on me fit prisonnier, c'était l'Inquisition qui me détenait. Il n'y avait pas besoin de trop se creuser la tête pour conclure à l'évidence que si quelqu'un avait un futur noir en perspective, ce quelqu'un, c'était moi.
Je pleurai. Je me suis mis à pleurer de désespoir dans l'obscurité cahotante du fiacre, où personne ne pouvait me voir. Je pleurai tout mon soul, et ensuite, tout en reniflant, je me blottis dans un coin et je me mis à attendre, pétrifié par la peur. Comme tous les espagnols de l'époque, j'en savais suffisamment des pratiques inquisitoriales – cette ombre sinistre fit partie de nos vies durant des années et des années – pour savoir quelle était ma destination : les redoutables oubliettes secrètes du Saint-Office, à Tolède.
Je crois déjà avoir évoqué avec vous l'Inquisition. C'est un fait, ici, ce ne fut pas pire que dans d'autres pays d'Europe ; même si Hollandais, Anglais, Français et luthériens, qui étaient à ce moment nos ennemis naturels, l'inclurent dans cette infâme Légende Noire par laquelle ils justifièrent le pillage de l'empire espagnol à l'heure de sa décadence. À vrai dire le Saint-Office, créé pour veiller à l'orthodoxie de la foi, fut plus rigoureux en Espagne qu'en Italie et au Portugal par exemple, et bien pire encore dans les Indes Occidentales. Mais l'Inquisition eut aussi lieu ailleurs. De plus, avec ou sans ce prétexte, Allemands, Français et Anglais rôtirent plus d'hétérodoxes, de sorcières et de pauvres malheureux qu'on en brûla en Espagne ; où, grâce à la vénérable bureaucratie autrichienne, tous et chacun des carbonisés, nombreux mais pas tant qu'on le croit, sont dûment répertoriés avec leurs procès, noms et prénoms. Chose dont ne peuvent, évidemment, pas se prévaloir les sujets du Roi de France si chrétien, les maudits hérétiques d'un peu plus haut ou l'Angleterre toujours fausse, misérable et pilleuse ; qui quand eux se mettaient à brûler, le faisaient allègrement et en masse, sans ordre ni principe, selon leurs envies et leurs intérêts, un satané tas d'hypocrites. De plus, en ce temps-là, la justice laïque était tout aussi cruelle que l'ecclésiastique, les gens aussi l'étaient, par inculture et par inclination naturelle de la masse à regarder se faire dépecer son prochain. De toute façon, à dire vrai, l'Inquisition a souvent été une arme de gouvernement au pouvoir des rois comme notre quatrième Philippe, qui laissa entre ses mains le contrôle des nouveaux chrétiens et judaïsants, la persécution des sorciers, des bigames et des sodomites, et même l'autorité de censurer des livres et de combattre le trafic d'armes et de chevaux, et celui de l'argent et de sa falsification. Ceci, en arguant que les trafiquants et les faux-monnayeurs nuisaient grandement aux intérêts de la monarchie ; et que celui qui était l'ennemi de celle-ci, garante de la foi, sans ambages l'était aussi de Dieu.

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Sonita nous propose sa traduction :

Je me réveillai en sursaut, endolori, dans l’obscurité d’une voiture en mouvement avec les vitres couvertes. Je sentais un poids étrange aux poignets et en bougeant j’écoutai un tintement métallique qui me remplit de frayeur : je portais des fers et ceux-ci se trouvaient attachés au sol du carrosse avec une chaîne. J’entrevis de la lumière à travers les fentes, j’en déduisis donc qu’il faisait déjà jour. De toute façon je n’avais aucune idée du temps écoulé depuis ma prison ; mais le carrosse roulait à une vitesse moyenne, et parfois, dans les montées en pente, j’écoutais le claquement du fouet et les cris du cocher qui harcelait les mules. Aussi, on écoutait les sabots des montures à côté du marchepied allant et venant. On me conduisait, donc, hors de la ville enchaîné et avec une escorte. Et selon ce que j’avais écouté au moment d’être arrêté, c’était l’Inquisition qui m’emmenait. Il ne fallait pas beaucoup se creuser les méninges pour en tirer les conclusions évidentes : s’il y avait quelqu’un avec un sombre avenir en perspective, ce quelqu’un était moi.
Je pleurai. Je me mis à pleurer navrement dans l’obscurité oscillante du carrosse, où personne ne pouvait me voir. Je pleurai jusqu’à ce que je n’aie plus de larmes, puis, reniflant la morve, je me blottis dans un coin et je me mis à attendre, mort de peur. Comme tous les espagnols de l’époque, j’en savais suffisamment sur les usages inquisitoriaux – cette ombre sinistre fit partie de notre vie pendant des années et des années – pour savoir quel était mon destin : les redoutables cachots secrets du Saint Office, à Tolède.
Je crois avoir auparavant parlé à vos grâces de l’Inquisition. Ce qui est vrai c’est que cela n’a pas été pire ici que dans les autres pays d’Europe, bien que Hollandais, Anglais, Français et luthériens qui étaient alors nos ennemis naturels, l’inclurent dans cette infâme Légende Noire avec laquelle ils ont justifié le pillage de l’empire espagnol au moment de sa décadence. Il est vrai que le Saint Office, créé pour veiller sur l’orthodoxie de la foi, a été plus vigoureux en Espagne qu’en Italie et au Portugal, par exemple, et bien pire dans l’Espace des Caraïbes. Mais il y eût aussi de l’Inquisition à d’autres endroits. De plus, avec son prétexte ou sans lui, Tudesques, Français et Anglais flambèrent plus d’hétérodoxes, sorcières et pauvres malheureux que ceux qui ont été brûlés en Espagne ; où grâce à la bureaucratie pointilleuse de la monarchie autrichienne, tous et chacun des rillons qu’il y eût, beaucoup mais pas tant que ça, figurent correctement registrés avec des procès, prénoms et noms. Chose pour laquelle les franchutes du très chrétien Roi de France ne peuvent bien entendu pas se vanter. Les maudits hérétiques qui sont un peu plus au nord ou d’Angleterre, celle-ci toujours fausse, misérable et pirate ; que quand eux, ils brûlaient, ils le faisaient allègrement et en tas, sans ordre ni concertation et selon leurs envies ou intérêts, condamné tas d’hypocrites. De plus, à cette époque-là, la justice laïque était aussi cruelle que l’ecclésiastique, et les gens l’étaient tout autant, à cause de l’ignorance et le penchant naturel de la masse pour voir dépecer son prochain. De toute façon, la vérité est que, souvent, l’Inquisition a été une arme gouvernementale dans les mains de rois comme notre quatrième Felipe, qui laissa dans les mains de l’Inquisition le contrôle des nouveaux chrétiens et des judaïsants, la persécution des sorcières, bigames et sodomites, et même le pouvoir de censurer des livres et de combattre la contrebande d’armes et de chevaux, et celui de la monnaie et de sa falsification. Ceci avec l’argument que les faux-monnayeurs portaient un grand préjudice aux intérêts de la monarchie ; et toute personne qui était ennemie de celle-ci, défenseure de la foi, l’était aussi de Dieu, bien évidemment.

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