La danse
Nous allons au Prado. Il pleut des cordes et des touristes : nous allons au Thyssen. Plaza Cánovas del Castillo, trottoir, parvis glissant. Nous avons les pieds trempés. Trois places pour l’exposition temporaire. Beaucoup de couleurs et… de coqs. La Russie, Paris, et… La danza. Marc Chagall, Dance.
Moi qui m’ennuie dans les musées, me voilà inondée par le jaune, amusée par ce danseur rouge au violon bleu et à la tête bovine, par cette danseuse verte au bouquet généreux. Ils sont dispersés, et pourtant l’harmonie règne. Pas de sourire sur les visages, plutôt une ivresse, une chaleur. Ceux-là, au fond, semblent plutôt heureux. Est-ce parce qu’elle est nue ou parce qu’ils dansent ? Impossible de le savoir, je ne connais rien à la symbolique, mais je trouve cela beau. Tiens, encore un coq, avec le peintre, on dirait. Oui, c’est lui, je reconnais le tableau du Christ de la salle précédente. Et enfin, tout en bas, la fête, plus animée, dans l’obscurité. Que viennent faire ce voilier et ce poisson, ce cercle, ces courbes ? Je l’ignore, encore une fois. Je devrais songer à être un peu moins inculte.
Je recule de quelques pas : l’ensemble me donne envie de danser. Ma tête se met à tourner, et m’emporte avec elle. Je danse, je tourne, je ne sais plus. Je n’y vois plus. Je ne sais pas s’il fait jour ou nuit, il fait jaune. J’entends les violons, le rythme s’accélère. Il y a du monde qui danse, qui tourne. Non, merci, je ne veux pas de tableau du Christ à ma réception. Pourquoi m’offrez-vous ce bouquet, Madame ? Adressez-le donc au veau ! Comment peut-on avoir les seins si ronds ? Je n’en ai jamais vus de semblables, elle ne peut pourtant pas être siliconée, nous sommes à Paris, en 1950, quelle idée ! Apportez-nous du laurier, des feuilles, quelque chose ! C’est urgent, pour que cela cesse de tourner. Qui a amené ce coq ? Laissez-le près du Christ, c’est pour la création. Vos cheveux, ils sont bleutés… Oui, je vous assure. Je vous en supplie, cessez de jouer ! Ce violon m’insupporte ! Cessez de danser ! Cessez de tourner ! CESSEZ !
¿Me oyes? Señorita, ¿me oyes? Soy médico. Cálmate, tienes un problema de Chagall, no es nada. No te preocupes. Descanso, y no más amarillo. ¿Vale?
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