lundi 5 janvier 2009

Devoirs de vacances (Noël), 16

En photo : Lotus Flower and Stem - Pink - IMG_8714 par Bahman Farzad

À faire en 2h30, sans dictionnaire
(texte donné en CAPES blanc, en 2007… que les redoublants s'abstiennent)

Lingao-fa decidió que era una noche propicia para morir. El aire cálido soplaba entre las espigas que emergían tímidamente de las aguas. Quizás fuera la brisa, con sus dedos de espíritu acariciando sus ropas, lo que la llenó con esa sensación de lo inevitable.
Se puso de puntillas para aspirar mejor las nubes. Todavía era esbelta, como los lotos que adornaban el estanque de los peces con colas de gasa. Su madre solía sentarse a contemplar los bulbosos tallos que se perdían en el cenagal, se inclinaba a tocarlos y eso la llenaba de paz. Siempre sospechó que su contacto con las flores había provocado en su hija aquellos rasgos delicados que tanta admiración despertaran desde su nacimiento : la piel tersísima, los pies suaves como pétalos, el cabello liso y brillante. Por eso, cuando llegó el momento de celebrar su llegada – un mes después del parto –, decidió que así se llamaría : Flor de Loto.
Contempló los campos húmedos que esa tarde parecían hincharse como sus pechos cuando amamantaba a la pequeña Kui-fa, su capullo rosa. La niña tenía once años y pronto habría que buscarle esposo ; pero esa tarea quedaría en manos de su cuñado Weng, como correspondía al pariente masculino más cercano.
Con paso vacilante se dirigió al interior. Debía ese equilibrio inestable al tamaño de sus pies. Durante años, su madre se los vendó para que no crecieran : requisito importante si deseaba conseguir un buen casamiento. Por eso ella se los vendaba ahora a la pequeña Kui-fa, pese a sus llantos y protestas. Era un proceso agónico : todos los dedos, excepto el mayor, debían quedar doblados hacia el suelo ; después se colocaba en el arco una piedra que quedaba ajustada con las vendas. Aunque ella misma había abandonado la costumbre desde la muerte de su marido, algunos huesecillos rotos y mal fundidos habían dejado una huella permanente en su forma de moverse.


Daína Chaviano, La isla de los amores infinitos, pp.27-28.

***

La traduction que je vous propose :

Lingao-fa songea que c’était la nuit idéale pour mourir. L’air chaud soufflait dans les épis qui émergeaient timidement de l’eau. Peut-être cette sensation d’inéluctabilité était-elle due à la brise, dont les doigts de fantôme caressaient ses vêtements.
Elle se hissa sur la pointe des pieds pour mieux aspirer les nuages. Elle était encore mince, à l’image des lotus qui décoraient le bassin des poissons à queue de gaze. Sa mère avait l’habitude de venir s’y asseoir et se perdre dans la contemplation des pousses bulbeuses enfouies dans la vase ; elle se penchait pour les toucher, et ce seul geste lui apportait la paix. Lingao-fa avait toujours pensé que ce rapport qu’elle entretenait avec les fleurs expliquait la finesse de sa fille. On avait admiré la physionomie de cette enfant depuis sa naissance : une peau merveilleusement soyeuse, des pieds d'une délicatesse de pétales, des cheveux lisses et brillants. Quand le moment avait été venu de célébrer son arrivée au monde, un mois après l’accouchement, elle avait naturellement décidé de l’appeler Lingao-fa, Fleur de Lotus.
Le regard de la jeune femme erra sur les champs humides. Ce soir-là, il semblaient aussi gonflés que ses seins quand elle allaitait Kui-fa, son Bouton de rose. La fillette avait à présent onze ans et il faudrait bientôt se mettre en quête d’un époux, responsabilité qui incomberait à son beau-frère, Weng, en tant que parent masculin le plus proche.
Elle rentra dans la maison d’un pas vacillant. Elle devait son équilibre précaire à la taille de ses pieds. Des années durant, sa mère les lui avait bandés pour éviter qu’ils ne grandissent, condition indispensable pour prétendre à un bon mariage. De sorte qu’à son tour elle bandait ceux de la petite Kui-fa, malgré ses pleurs et ses protestations. C’était une véritable torture : tous les orteils, sauf le pouce, devaient être repliés vers le bas ; sous la courbure ainsi formée, on plaçait une pierre, retenue par les bandages. Bien que Lingao-fa ait cessé de se soumettre à cette coutume après le décès de son mari, ses os brisés et mal ressoudés avaient imprimé une trace indélébile dans sa manière de marcher.

***

Eva nous propose sa traduction :

Lingao-fa décida que c'était une nuit parfaite pour mourir. L'air chaud soufflait entre les joncs qui pointaient timidement à la surface de l'eau. Peut-être la brise, caressant ses vêtements de ses doigts d'esprit, fût ce qui l'emplit de cette sensation d'inévitable.
Elle se mit sur la pointe des pieds pour mieux aspirer les nuages. Elle était encore svelte, comme les lotus qui ornaient le bassin des poissons à queue filante. Sa mère aimait à s'asseoir pour contempler les tiges bulbeuses qui se perdaient dans le champ de céréales, elle se penchait pour les toucher et cela l'innondait de paix. Elle s'était toujours doutée que son rapport aux fleurs avait pu être à l'origine des traits délicats de sa fille, ceux-là même qui avaient suscité tant d'admiration depuis sa naissance : une peau des plus tendres, les pieds doux comme des pétales, les cheveux lisses et brillants. Ainsi, quand l'heure vint de célébrer sa venue au monde -un mois après l'accouchement- elle décida qu'elle s'appellerait ainsi : Fleur de Lotus.
Elle contempla les champs humides qui, ce soir-là, semblaient gonfler comme le faisaient ses seins lorsqu'elle allaitait la petite Kui-fa, son petit bouton rose. L'enfant avait onze ans et bientôt il faudrait lui trouver un époux ; mais cette tâche serait confiée à son beau-frère Weng, comme il incombait de le faire au parent masculin le plus proche.
D'un pas hésitant elle se dirigea à l'intérieur. Cet équilibre instable, elle le devait à la taille de ses pieds. Pendant des années, sa mère les lui avait bandés pour qu'ils ne grandissent pas : pré-requis important si elle voulait jouir d'un bon mariage. C'est pour cela qu'elle les bandait aujourd'hui à la petite Kui-fa, malgré ses pleurs et ses protestations. C'était un procédé agonique : tous les orteils, sauf le gros, devaient être repliés vers l'intérieur ; ensuite, on plaçait sur l'arc formé une pierer qui était maintenue par les bandages. Bien qu'elle même eût abandonné cette coutume depuis la mort de son mari, quelques petits os cassés et mal ressoudés avaient laissé une trace indélébile dans sa façon de se déplacer.

***

Une autre proposition de traduction :

Lingao-fa décida qu’il s’agissait d’une nuit propice pour mourir. L’air chaud soufflait entre les épis qui émergeaient timidement de l’eau. Peut-être ce fût la brise, avec ses doigts d’esprit, caressant ses vêtements, ce qui la remplit avec cette sensation de ce qui était inévitable.
Elle se mit sur la pointe des pieds pour mieux aspirer les nuages. Elle était toujours svelte, comme les lotus qui décoraient l’étang des poissons avec les queues en gaze. Sa mère avait pour habitude de s’asseoir afin de contempler les tiges bulbeuses qui se perdaient dans le bourbier, elle s’inclinait pour les toucher, et cela la remplissait de paix. Elle soupçonna toujours que son contact avec les fleurs avait donné à sa fille ces traits délicats qui provoquaient tant d’admiration depuis sa naissance : la peau très soyeuse, les pieds doux comme des pétales, les cheveux lisses et brillants. Pour ces raisons, quand arriva le moment de fêter sa venue -un mois après l’accouchement-, elle décida qu’elle s’appellerait ainsi : Fleur de Lotus.
Elle contempla les champs humides qui cet après-midi-là semblaient se gonfler comme sa poitrine quand elle donnait le sein à la petite Kui-fa, son bouton rose. La petite avait onze ans et bientôt il faudrait lui trouver un mari ; mais cette tâche reviendrait à son beau-frère Wemg, comme cela correspondait au parent masculin le plus proche.
D’un pas vacillant elle se dirigea à l’intérieur. Elle devait cet équilibre instable à la taille de ses pieds. Pendants des années, sa mère les lui avait bandés pour qu’ils ne grandissent pas : il s’agissait là d’une condition importante si elle désirait contracter un bon mariage. C’est pour cela qu’elle les bandait maintenant à la petite Kiu-Fa, malgré ses pleurs et ses protestes. C’était un processus agonique : tous les doigts, hormis le majeur, devaient rester pliés vers le sol ; après on plaçait dans l’arc une pierre qui restait ajustée avec les bandes. Bien qu’elle eût abandonné la coutume depuis la mort de son mari, certains petits os brisés et mal ressoudés avaient laissé une trace permanente dans sa manière de se déplacer.

***

Brigitte nous propose sa traduction :

Lingao- Fa décréta que c’était une nuit idéale pour mourir. Le vent chaud soufflait parmi les joncs qui émergeaient timidement à la surface de l’eau. Peut-être était-ce la brise qui, en caressant de ses doigts magiques ses vêtements, l’avait envahie de cette sensation d’inéluctable.
Elle se dressa sur la pointe des pieds pour mieux aspirer les nuages. Elle était encore svelte, comme les lotus qui décoraient l’étang aux poissons à la queue de mousseline.
Sa mère avait l’habitude de s’y asseoir pour contempler les tiges bulbeuses qui se perdaient dans la mare, elle se penchait pour les toucher, ce qui la comblait de sérénité. Elle avait toujours pensé que c’était son contact avec les fleurs qui avait doté à sa fille de ces traits délicats qui susciteraient tant d’admiration depuis sa naissance : sa peau extrêmement satinée, ses pieds doux comme des pétales, ses cheveux lisses et soyeux.
Aussi, quand arriva le moment de célébrer son avènement – un mois après l’accouchement -, elle décida qu’elle s’appellerait ainsi : Fleur de Lotus.
Elle contempla les champs humides qui, cet après-midi, semblaient se gonfler comme ses seins lorsqu’ ils nourrissaient la petite Kui-Fa, sa petite rose en bouton. La fillette avait onze ans et il faudrait lui trouver un époux sous peu ; mais c’était à son beau-frère Wang qu’en incomberait la tâche, en tant que plus proche parent masculin.
D’un pas hésitant, elle se dirigea à l’intérieur. Elle devait cet équilibre instable à la taille de ses pieds. Pendant des années, sa mère les lui avaient bandés pour qu’ils ne grandissent pas : importante condition si elle souhaitait être bien mariée. C’est pourquoi elle les bandait à présent à la petite Kui-Fa, en dépit de ses pleurs et de ses protestations. C’était un procédé : tous les doigts de pieds, excepté le gros orteil, devaient restés repliés vers le bas; ensuite, on plaçait sous la voûte ainsi formée une pierre, maintenue par les bandages. Bien qu’elle-même ait abandonné cette coutume depuis la mort de son mari, quelques petits os brisés et mal ressoudés avaient marqué d’une empreinte indélébile sa démarche.

Aucun commentaire: