Mais déjà le grand vent noir qui vient de l’ouest – le vent des mers, comme dit Antoine – éparpille les voix dans la nuit. Il joue avec elles un moment, puis les ramasse toutes ensemble et les jette on ne sait où, en ronflant de colère. Ce que Mouchette vient d’entendre reste longtemps suspendue entre ciel et terre, ainsi que ces feuilles mortes qui n’en finissent pas de tomber.
Pour mieux courir, Mouchette a quitté ses galoches. En les remettant, elle se trompe de pied. Tant pis ! Ce sont les galoches d’Eugène, si larges qu’entre la tige elle peut passer les cinq doigts de sa petite main. L’avantage est qu’en s’appliquant à les balancer au bout des orteils ainsi qu’une paire d’énormes castagnettes, elles font à chaque pas sur le macadam du préau un bruit qui met Mme l’institutrice hors d’elle-même.
Mouchette se glisse jusqu’à la crête du talus et reste là en observation, le dos contre la haie ruisselante. De cet observatoire, l’école paraît toute proche encore, mais le préau est maintenant désert. Après la récréation, chaque samedi, les classes se rassemblent dans la salle d’honneur ornée d’un buste de la République, d’un vieux portrait jamais remplacé de M. Armand Fallières, et du drapeau de la Société de gymnastique, roulé dans sa gaine de toile cirée. Madame doit lire en ce moment les notes de la semaine, puis l’on répétera une fois de plus la cantate qui doit être l’une des solennités de la lointaine distribution des prix. – Ah ! si lointaine en ce mars désolé ! Voici qu’elle reconnaît la strophe familière, le « Plus d’espoir ! » que Madame jette avec un terrible rictus de sa bouche mince et un mouvement de tête si lent que son peigne lui tombe dans le cou…
Espérez !… Plus d’espoir !
Trois jours, leur dit Colomb, et je vous dô…o…nne un monde.
Et son doigt le montrait, et son œil pour le voir
Scrutait de l’hô…o.o.rizon l’i…mmen-si …té prôo… fonde…
Derrière les vitres troubles, Mouchette distingue à peine les têtes groupées par deux ou par trois autour des partitions, mais la haute silhouette de Madame, perchée sur l’estrade, se détache en noir sur les murs ripolinés. Le bras maigre se lève et s’abaisse en mesure, parfois reste tendu, menaçant, dominateur, tandis que les voix s’apaisent lentement, ont l’air de se coucher aux pieds de la dompteuse ainsi que des bêtes dociles.
Au témoignage de sa maîtresse, Mouchette n’a « aucune disposition pour le chant ». La vérité est qu’elle le hait. Elle hait d’ailleurs toute musique d’une haine farouche, inexplicable. Sitôt que se posent sur les touches du geignant harmonium, les longs doigts de Madame, déformés par les rhumatismes, sa faible poitrine se serre si douloureusement que les larmes lui viennent aux yeux. Quelles larmes ? On dirait que ce sont des larmes de honte. Chaque note est comme un mot qui la blesse au plus profond de l’âme, un de ces mots lourds que les garçons lui jettent en passant, à voix basse, qu’elle feint de ne pas entendre, mais qu’elle emporte parfois avec elle jusqu’au soir, qui ont l’air de coller à la peau.
Pour mieux courir, Mouchette a quitté ses galoches. En les remettant, elle se trompe de pied. Tant pis ! Ce sont les galoches d’Eugène, si larges qu’entre la tige elle peut passer les cinq doigts de sa petite main. L’avantage est qu’en s’appliquant à les balancer au bout des orteils ainsi qu’une paire d’énormes castagnettes, elles font à chaque pas sur le macadam du préau un bruit qui met Mme l’institutrice hors d’elle-même.
Mouchette se glisse jusqu’à la crête du talus et reste là en observation, le dos contre la haie ruisselante. De cet observatoire, l’école paraît toute proche encore, mais le préau est maintenant désert. Après la récréation, chaque samedi, les classes se rassemblent dans la salle d’honneur ornée d’un buste de la République, d’un vieux portrait jamais remplacé de M. Armand Fallières, et du drapeau de la Société de gymnastique, roulé dans sa gaine de toile cirée. Madame doit lire en ce moment les notes de la semaine, puis l’on répétera une fois de plus la cantate qui doit être l’une des solennités de la lointaine distribution des prix. – Ah ! si lointaine en ce mars désolé ! Voici qu’elle reconnaît la strophe familière, le « Plus d’espoir ! » que Madame jette avec un terrible rictus de sa bouche mince et un mouvement de tête si lent que son peigne lui tombe dans le cou…
Espérez !… Plus d’espoir !
Trois jours, leur dit Colomb, et je vous dô…o…nne un monde.
Et son doigt le montrait, et son œil pour le voir
Scrutait de l’hô…o.o.rizon l’i…mmen-si …té prôo… fonde…
Derrière les vitres troubles, Mouchette distingue à peine les têtes groupées par deux ou par trois autour des partitions, mais la haute silhouette de Madame, perchée sur l’estrade, se détache en noir sur les murs ripolinés. Le bras maigre se lève et s’abaisse en mesure, parfois reste tendu, menaçant, dominateur, tandis que les voix s’apaisent lentement, ont l’air de se coucher aux pieds de la dompteuse ainsi que des bêtes dociles.
Au témoignage de sa maîtresse, Mouchette n’a « aucune disposition pour le chant ». La vérité est qu’elle le hait. Elle hait d’ailleurs toute musique d’une haine farouche, inexplicable. Sitôt que se posent sur les touches du geignant harmonium, les longs doigts de Madame, déformés par les rhumatismes, sa faible poitrine se serre si douloureusement que les larmes lui viennent aux yeux. Quelles larmes ? On dirait que ce sont des larmes de honte. Chaque note est comme un mot qui la blesse au plus profond de l’âme, un de ces mots lourds que les garçons lui jettent en passant, à voix basse, qu’elle feint de ne pas entendre, mais qu’elle emporte parfois avec elle jusqu’au soir, qui ont l’air de coller à la peau.
Georges Bernanos, Nouvelle histoire de Mouchette, 1937.
***
Brigitte nous propose sa traduction :
THEME BERNANOS – Nouvelle histoire de Mouchette, 1937.
Pero ya el vendaval negro que viene del oeste – el viento de los mares, como dice Antoine – esparce las voces por la noche.
Juega con ellas durante un momento y luego las recoge todas juntas y las echa no se sabe a dónde, zumbando con cólera.
Lo que Mouchette acaba de oír se queda largo tiempo suspendido entre cielo y tierra, como esas hojas muertas que no dejan de caer.
Para correr mejor, Mouchette se ha quitado los zapatones. Al volver a ponerlos, se equivoca de pie. ¡ Es igual ! Son unos zapatones de Eugène, que le están tan grandes que entre la caña pueden caber los cinco dedos de su manita. Lo bueno es que, cuando ella se divierte balanceándolos en el más gordo de sus dedos de pie como un par de castañuelas, hacen a cada paso que da en el asfalto del patio un ruido que pone fuera de sí a la Sra maestra.
Mouchette se desliza hasta la cresta de la ladera y ahí se queda obervando, la espalda apoyada contra el seto mojado. Desde este puesto de observación, la escuela parece todavía muy cercana, pero ahora el patio queda desierto. Después del recreo, cada sábado, las clases suelen reunirse en el salón de honor adornado con un busto de la República, un antiguo retrato nunca reemplazado del Señor Armand Fallière y la bandera del Círculo de Gimnasia, enrollado en su funda de hule. Ahora la señora estará leyendo las notas de la semana, a continuación ensayarán una vez más la cantata que debe ser una de las solemnidades del lejano reparto de premios. ¡ Ay, tan lejano en este mes de marzo desolado ! Ahora reconoce la copla familiar, el « Más esperanza - que la señora suelta con un terrible rictus con su boca fina y un movimiento de la cabeza tan lento que se le cae la peineta en el cuello…
¡ Esperad ! – Más esperanza !
Tres días, les dice Colón, y os doo…ooy un mundo.
Y su índice lo apuntaba y su mirada para verlo
Oteaba el hoo…o.oorizonte la in….nmensi…dad proo …funda….
Detrás de los cristales ópacos, Mouchette apenas divisa las cabezas agrupadas por dos o tres alerededor de las partituras, pero la alta silueta de la señora, subida a la tarima, destaca en negro sobre las paredes recién pintadas/blanquecidas. El brazo flaco sube y baja al compás, se queda a veces en lo alto, amenazador, dominador, mientras que las voces se calman lentamente, parecen acostarse a los pies de la domadora como fieras dóciles.
Según el testimonio de su maestra, Mouchette no tiene « ninguna disposición para el canto ». La verdad es que ella lo aborrece. En realidad odia cualquier tipo de música con un odio tremendo, inexplicable. En cuanto los largos dedos de la señora, torcidos por los reumas, tocan las teclas del armonio quejumbroso, su pecho débil se estremece tan dolorido que se le vienen las lágrimas a los ojos. ¿ Qué lágrimas ? Parecen ser lágrimas de vergüenza. Cada nota es como una palabra que le duele en lo más hondo del alma, una de esas palabras plomizas que los niños le sueltan cuando pasa, en voz baja, que ella finge no oír, pero que se lleva a veces consigo hasta el anochecer, y que parecen quedar pegadas a su piel.
THEME BERNANOS – Nouvelle histoire de Mouchette, 1937.
Pero ya el vendaval negro que viene del oeste – el viento de los mares, como dice Antoine – esparce las voces por la noche.
Juega con ellas durante un momento y luego las recoge todas juntas y las echa no se sabe a dónde, zumbando con cólera.
Lo que Mouchette acaba de oír se queda largo tiempo suspendido entre cielo y tierra, como esas hojas muertas que no dejan de caer.
Para correr mejor, Mouchette se ha quitado los zapatones. Al volver a ponerlos, se equivoca de pie. ¡ Es igual ! Son unos zapatones de Eugène, que le están tan grandes que entre la caña pueden caber los cinco dedos de su manita. Lo bueno es que, cuando ella se divierte balanceándolos en el más gordo de sus dedos de pie como un par de castañuelas, hacen a cada paso que da en el asfalto del patio un ruido que pone fuera de sí a la Sra maestra.
Mouchette se desliza hasta la cresta de la ladera y ahí se queda obervando, la espalda apoyada contra el seto mojado. Desde este puesto de observación, la escuela parece todavía muy cercana, pero ahora el patio queda desierto. Después del recreo, cada sábado, las clases suelen reunirse en el salón de honor adornado con un busto de la República, un antiguo retrato nunca reemplazado del Señor Armand Fallière y la bandera del Círculo de Gimnasia, enrollado en su funda de hule. Ahora la señora estará leyendo las notas de la semana, a continuación ensayarán una vez más la cantata que debe ser una de las solemnidades del lejano reparto de premios. ¡ Ay, tan lejano en este mes de marzo desolado ! Ahora reconoce la copla familiar, el « Más esperanza - que la señora suelta con un terrible rictus con su boca fina y un movimiento de la cabeza tan lento que se le cae la peineta en el cuello…
¡ Esperad ! – Más esperanza !
Tres días, les dice Colón, y os doo…ooy un mundo.
Y su índice lo apuntaba y su mirada para verlo
Oteaba el hoo…o.oorizonte la in….nmensi…dad proo …funda….
Detrás de los cristales ópacos, Mouchette apenas divisa las cabezas agrupadas por dos o tres alerededor de las partituras, pero la alta silueta de la señora, subida a la tarima, destaca en negro sobre las paredes recién pintadas/blanquecidas. El brazo flaco sube y baja al compás, se queda a veces en lo alto, amenazador, dominador, mientras que las voces se calman lentamente, parecen acostarse a los pies de la domadora como fieras dóciles.
Según el testimonio de su maestra, Mouchette no tiene « ninguna disposición para el canto ». La verdad es que ella lo aborrece. En realidad odia cualquier tipo de música con un odio tremendo, inexplicable. En cuanto los largos dedos de la señora, torcidos por los reumas, tocan las teclas del armonio quejumbroso, su pecho débil se estremece tan dolorido que se le vienen las lágrimas a los ojos. ¿ Qué lágrimas ? Parecen ser lágrimas de vergüenza. Cada nota es como una palabra que le duele en lo más hondo del alma, una de esas palabras plomizas que los niños le sueltan cuando pasa, en voz baja, que ella finge no oír, pero que se lleva a veces consigo hasta el anochecer, y que parecen quedar pegadas a su piel.
***
Odile nous propose sa traduction :
Pero ya el vendaval negro que viene del oeste - el viento de los mares, como dice Antoine - esparce las voces por la noche. Juega con ellas durante un momento y luego las recoge todas juntas y las arroja no se sabe donde, zumbando con cólera. Lo que Mouchette acaba de oír se queda largo tiempo suspendido entre cielo y tierra, como esas hojas muertas que no cesan de caer. Para correr mejor, Mouchette se ha quitado las galochas. Cuando vuelve a ponérselas, se equivoca de pie. ¡ Es igual ! Son unas galochas de Eugène, y le están tan grandes que entre la caña pueden caber los cinco dedos de su manita. La ventaja es que, cuando ella se divierte meneándolas en la punta del pie como castañuelas enormes, a cada paso en el asfalto del patio hacen un ruido que pone fuera de sí a la señora maestra. Mouchette se desliza hasta la cresta de la ladera y ahí se queda obervando, la espalda apoyada contra el seto mojado. Desde este puesto de observación, la escuela parece todavía muy cercana, pero ahora el patio queda desierto. Después del recreo, cada sábado, las clases suelen reunirse en el salón de honor adornado con un busto de la República, un antiguo retrato nunca reemplazado del Señor Armand Fallière y la bandera del Círculo de Gimnasia, enrollado en su funda de hule. Ahora la señora debe de estar leyendo las notas de la semana, a continuación ensayarán una vez más la cantata que será una de las solemnidades del lejano reparto de premios. ¡ Ay, tan lejano en este mes de marzo desolado ! Ahora reconoce la copla familiar, el « Más esperanza - que la señora suelta con un terrible rictus en su labios finos y un movimiento de la cabeza tan lento que se le cae la peineta en el cuello…
¡ Esperad ! - Más esperanza ! Tres días, les dice Colón, y os do…ooy un mundo. Y su índice lo apuntaba y su mirada para verlo Oteaba el ho…oorizonte la in…nmensi…dad proo …funda… Detrás de los cristales opacos, Mouchette apenas divisa las cabezas agrupadas por dos o tres alerededor de las partituras, pero la alta silueta de la señora, encaramada en la tarima, destaca en negro sobre las paredes pintadas. El brazo flaco sube y baja al compás, a veces se queda levantado, amenazador, dominador, mientras que las voces se calman lentamente y parecen echarse a los pies de la domadora como fieras dóciles. Según el testimonio de su maestra, Mouchette no tiene « ninguna aptitud para el canto ». La verdad es que ella lo aborrece. En realidad odia cualquier tipo de música con un odio tremendo, inexplicable. En cuanto los largos dedos de la señora, torcidos por los reumas, tocan las teclas del armonio quejumbroso, su pecho débil se estremece, tan dolorosamente que se le vienen las lágrimas a los ojos. ¿ Qué lágrimas ? Parecen ser lágrimas de vergüenza. Cada nota es como una palabra que la hiere en lo más profundo del alma, una de esas palabras toscas que los chicos le sueltan cuando pasa, en voz baja, que finge no oír, pero que se lleva a veces consigo hasta el anochecer, y que parecen adherir a su piel.
Pero ya el vendaval negro que viene del oeste - el viento de los mares, como dice Antoine - esparce las voces por la noche. Juega con ellas durante un momento y luego las recoge todas juntas y las arroja no se sabe donde, zumbando con cólera. Lo que Mouchette acaba de oír se queda largo tiempo suspendido entre cielo y tierra, como esas hojas muertas que no cesan de caer. Para correr mejor, Mouchette se ha quitado las galochas. Cuando vuelve a ponérselas, se equivoca de pie. ¡ Es igual ! Son unas galochas de Eugène, y le están tan grandes que entre la caña pueden caber los cinco dedos de su manita. La ventaja es que, cuando ella se divierte meneándolas en la punta del pie como castañuelas enormes, a cada paso en el asfalto del patio hacen un ruido que pone fuera de sí a la señora maestra. Mouchette se desliza hasta la cresta de la ladera y ahí se queda obervando, la espalda apoyada contra el seto mojado. Desde este puesto de observación, la escuela parece todavía muy cercana, pero ahora el patio queda desierto. Después del recreo, cada sábado, las clases suelen reunirse en el salón de honor adornado con un busto de la República, un antiguo retrato nunca reemplazado del Señor Armand Fallière y la bandera del Círculo de Gimnasia, enrollado en su funda de hule. Ahora la señora debe de estar leyendo las notas de la semana, a continuación ensayarán una vez más la cantata que será una de las solemnidades del lejano reparto de premios. ¡ Ay, tan lejano en este mes de marzo desolado ! Ahora reconoce la copla familiar, el « Más esperanza - que la señora suelta con un terrible rictus en su labios finos y un movimiento de la cabeza tan lento que se le cae la peineta en el cuello…
¡ Esperad ! - Más esperanza ! Tres días, les dice Colón, y os do…ooy un mundo. Y su índice lo apuntaba y su mirada para verlo Oteaba el ho…oorizonte la in…nmensi…dad proo …funda… Detrás de los cristales opacos, Mouchette apenas divisa las cabezas agrupadas por dos o tres alerededor de las partituras, pero la alta silueta de la señora, encaramada en la tarima, destaca en negro sobre las paredes pintadas. El brazo flaco sube y baja al compás, a veces se queda levantado, amenazador, dominador, mientras que las voces se calman lentamente y parecen echarse a los pies de la domadora como fieras dóciles. Según el testimonio de su maestra, Mouchette no tiene « ninguna aptitud para el canto ». La verdad es que ella lo aborrece. En realidad odia cualquier tipo de música con un odio tremendo, inexplicable. En cuanto los largos dedos de la señora, torcidos por los reumas, tocan las teclas del armonio quejumbroso, su pecho débil se estremece, tan dolorosamente que se le vienen las lágrimas a los ojos. ¿ Qué lágrimas ? Parecen ser lágrimas de vergüenza. Cada nota es como una palabra que la hiere en lo más profundo del alma, una de esas palabras toscas que los chicos le sueltan cuando pasa, en voz baja, que finge no oír, pero que se lleva a veces consigo hasta el anochecer, y que parecen adherir a su piel.
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