Depuis le temps que je dis que je vais vous expliquer d'où vient le nom de notre blog « trad a bordo », il est temps que je le fasse.
Tout a commencé il y a deux ans, quand j'ai été contactée par l'université de traduction de Grenade [http://www.ugr.es/~factrad/] (oui, vous avez bien lu, une université spécialisée dans la traduction… Ils ne font que cela, du matin au soir ! Autant dire que si nous sommes un peu des pionniers en France avec notre petit M2 dynamique et déterminé à en découdre avec les formations concurrentes, nous avons un peu de retard par rapport à l'Espagne) pour un projet de collaboration de traduction d'une anthologie de poèmes d'une poétesse grenadine, Elena Martín Vivaldi.
Un petit échantillon :
***
***
Ce qui devait déboucher sur la publication d'un volume bilingue (aux dernières nouvelles, il ne devrait pas tarder à sortir, avec les noms de tous les participants, français et espagnols…). Nos collègues de Grenade avaient déjà travaillé avec une université canadienne et une autre université française (j'avoue avoir oublié de laquelle il s'agissait) et à présent, c'était à notre tour d'entrer en piste. Vous imaginez bien que j'ai immédiatement sauté sur l'occasion. Il s'agissait que nous nous occupions de traduire la moitié des poèmes retenus tandis qu'eux faisaient l'autre moitié. J'ouvre une amicale parenthèse pour signaler qu'après quelque temps, nous nous sommes rendu compte que nos interlocuteurs nous avaient gentiment laissé les sonnets. À leur décharge, il faut préciser que nous étions une grande majorité de francophones alors qu'eux étaient presque tous hispanophones… Quand chacun a terminé sa traduction, nous avons échangé nos poèmes et chaque groupe a relu le travail de l'autre. Drôle de confrontation. Il va de soi que nous avons trouvé notre partie bien meilleure. Nul doute qu'ils ont tiré la même conclusion. C'est dans l'ordre des choses… a fortiori quand il s'agit d'une œuvre collective. Tout cela s'est terminé par une semaine de travail commun à Grenade (pour ma part je n'ai malheureusement pas pu m'y rendre, mais deux membres du groupe bordelais nous ont représentés… défendant bec et ongles nos choix).
Je dis "nous"… Alors ? Qui sont ces "nous" du petit groupe de traducteurs qui se réunissaient presque toutes les semaines (cela a duré un peu plus de trois mois, je crois), autour de poèmes peu enthousiasmants – il faut bien le dire –, de délicieux repas improvisés et d'un travail passionnant. Eh bien "nous", c'était une moitié d'étudiants de différents niveaux et horizons (Olivier Husson – oui notre Olivier ! –, qui préparait le CAPES – qu'il a brillamment réussi –, Julien Cazenave, alors étudiant en L2 – et maintenant parti vers des études d'italien –, Aurélie Bianchi et Julie Légère, alors étudiantes en L3 – Aurélie prépare actuellement le CAPES, avec moi comme prof de version –, Alicia Marco Agulló – qui préparait le CAPES et est maintenant retournée en Espagne –, Sabrine Chapin – alors étudiante en FLE – et Nayrouz Zaitouni – la fameuse étudiante en deuxième année de thèse que nous accueillerons jeudi. Vous excuserez cette petite énumération, qui était pour moi un moyen de les remercier rétrospectivement de leur engagement, de leur dévouement (je n'exagère pas) et de leurs qualités réelles de traducteurs. Figurez-vous qu'ils étaient tous volontaires… Je les avais cueillis au gré des cours et ils sont restés à la barre jusqu'au bout. Quant à l'autre moitié, elle était composée d'enseignants, que vous connaissez pour la plupart : Marta, Cecilia, Nuria Oliver, Sabine Tinchant et moi. Merci à elles aussi. Vous ne pouvez pas imaginer le plaisir que cela a été de faire de la traduction en dehors des stricts séances de version, sans qu'il soit question de notes… avec la possibilité – enfin ! – de décloisonner les rapports étudiants-enseignants. Dans la salle H 113 (à l'époque, nous n'avions pas encore investi la table ronde de la H 118), il n'y avait que des traducteurs. Et je peux vous dire que nous avons beaucoup travaillé, pour parvenir à les rendre en français, ces poèmes dont les qualités essentielles tenaient à leur dimension formelle : rimes, métriques, etc. c'est-à-dire précisément ces choses absolument impossibles à garder, à respecter… Et nous comptions sur nos doigts pendant des heures. « Aïe 10… zut, il nous en manque 2. Ah non, là, ça va plus, nous sommes à 15. » Je suis certaine que vous voyez parfaitement la scène que je suis en train de décrire.
Et fatalement, le jour est venu où nous avons voulu un nom, une identité. Et c'est ainsi qu'après bien des hésitations et beaucoup beaucoup beaucoup de rires, nous avons accouché de ce « trad a bordo », fruit des cervelles d'un peu tout le monde… mais, si je me souviens bien, en priorité de celle de l'inventive Nayrouz. Les fondations étaient là et je tenais absolument à ce que cet embryon de formation à la traduction littéraire soit notre héritage. C'est dans ce groupe qu'à germé l'idée, puis l'envie d'un travail fondé sur l'échange et une même passion, un peu folle. Car nous sommes dans une bien étrange bulle quand nous partons à la chasse aux mots, à la course aux virgules, en quête de la bonne syntaxe… de la tournure parfaite. The mot, the virgule, the syntaxe, the tournure.
Voilà.
Nous avons donc une petite histoire ensemble et, si on remonte un peu dans le temps, une petite généalogie… nous, promotion 2008-2009, encore sans nom de baptême.
Tout a commencé il y a deux ans, quand j'ai été contactée par l'université de traduction de Grenade [http://www.ugr.es/~factrad/] (oui, vous avez bien lu, une université spécialisée dans la traduction… Ils ne font que cela, du matin au soir ! Autant dire que si nous sommes un peu des pionniers en France avec notre petit M2 dynamique et déterminé à en découdre avec les formations concurrentes, nous avons un peu de retard par rapport à l'Espagne) pour un projet de collaboration de traduction d'une anthologie de poèmes d'une poétesse grenadine, Elena Martín Vivaldi.
Un petit échantillon :
***
Primer día.
Primera palabra.
Atrás quedó el dolor, su mano alzada
que golpeó en el rostro del ensueño,
buscando las raíces, el germen de ilusiones
crecido en esta tierra dura y seca
de la carne cansada.
Pero sus dedos torpes no han podido
romper esta corteza improbable y rebelde,
su pujanza de espera.
Primer día.
Primera palabra.
La lucha empieza ahora
con un rubor de llama.
Detrás del dolor brilla
la rama verde y tallo.
Ce qui devait déboucher sur la publication d'un volume bilingue (aux dernières nouvelles, il ne devrait pas tarder à sortir, avec les noms de tous les participants, français et espagnols…). Nos collègues de Grenade avaient déjà travaillé avec une université canadienne et une autre université française (j'avoue avoir oublié de laquelle il s'agissait) et à présent, c'était à notre tour d'entrer en piste. Vous imaginez bien que j'ai immédiatement sauté sur l'occasion. Il s'agissait que nous nous occupions de traduire la moitié des poèmes retenus tandis qu'eux faisaient l'autre moitié. J'ouvre une amicale parenthèse pour signaler qu'après quelque temps, nous nous sommes rendu compte que nos interlocuteurs nous avaient gentiment laissé les sonnets. À leur décharge, il faut préciser que nous étions une grande majorité de francophones alors qu'eux étaient presque tous hispanophones… Quand chacun a terminé sa traduction, nous avons échangé nos poèmes et chaque groupe a relu le travail de l'autre. Drôle de confrontation. Il va de soi que nous avons trouvé notre partie bien meilleure. Nul doute qu'ils ont tiré la même conclusion. C'est dans l'ordre des choses… a fortiori quand il s'agit d'une œuvre collective. Tout cela s'est terminé par une semaine de travail commun à Grenade (pour ma part je n'ai malheureusement pas pu m'y rendre, mais deux membres du groupe bordelais nous ont représentés… défendant bec et ongles nos choix).
Je dis "nous"… Alors ? Qui sont ces "nous" du petit groupe de traducteurs qui se réunissaient presque toutes les semaines (cela a duré un peu plus de trois mois, je crois), autour de poèmes peu enthousiasmants – il faut bien le dire –, de délicieux repas improvisés et d'un travail passionnant. Eh bien "nous", c'était une moitié d'étudiants de différents niveaux et horizons (Olivier Husson – oui notre Olivier ! –, qui préparait le CAPES – qu'il a brillamment réussi –, Julien Cazenave, alors étudiant en L2 – et maintenant parti vers des études d'italien –, Aurélie Bianchi et Julie Légère, alors étudiantes en L3 – Aurélie prépare actuellement le CAPES, avec moi comme prof de version –, Alicia Marco Agulló – qui préparait le CAPES et est maintenant retournée en Espagne –, Sabrine Chapin – alors étudiante en FLE – et Nayrouz Zaitouni – la fameuse étudiante en deuxième année de thèse que nous accueillerons jeudi. Vous excuserez cette petite énumération, qui était pour moi un moyen de les remercier rétrospectivement de leur engagement, de leur dévouement (je n'exagère pas) et de leurs qualités réelles de traducteurs. Figurez-vous qu'ils étaient tous volontaires… Je les avais cueillis au gré des cours et ils sont restés à la barre jusqu'au bout. Quant à l'autre moitié, elle était composée d'enseignants, que vous connaissez pour la plupart : Marta, Cecilia, Nuria Oliver, Sabine Tinchant et moi. Merci à elles aussi. Vous ne pouvez pas imaginer le plaisir que cela a été de faire de la traduction en dehors des stricts séances de version, sans qu'il soit question de notes… avec la possibilité – enfin ! – de décloisonner les rapports étudiants-enseignants. Dans la salle H 113 (à l'époque, nous n'avions pas encore investi la table ronde de la H 118), il n'y avait que des traducteurs. Et je peux vous dire que nous avons beaucoup travaillé, pour parvenir à les rendre en français, ces poèmes dont les qualités essentielles tenaient à leur dimension formelle : rimes, métriques, etc. c'est-à-dire précisément ces choses absolument impossibles à garder, à respecter… Et nous comptions sur nos doigts pendant des heures. « Aïe 10… zut, il nous en manque 2. Ah non, là, ça va plus, nous sommes à 15. » Je suis certaine que vous voyez parfaitement la scène que je suis en train de décrire.
Et fatalement, le jour est venu où nous avons voulu un nom, une identité. Et c'est ainsi qu'après bien des hésitations et beaucoup beaucoup beaucoup de rires, nous avons accouché de ce « trad a bordo », fruit des cervelles d'un peu tout le monde… mais, si je me souviens bien, en priorité de celle de l'inventive Nayrouz. Les fondations étaient là et je tenais absolument à ce que cet embryon de formation à la traduction littéraire soit notre héritage. C'est dans ce groupe qu'à germé l'idée, puis l'envie d'un travail fondé sur l'échange et une même passion, un peu folle. Car nous sommes dans une bien étrange bulle quand nous partons à la chasse aux mots, à la course aux virgules, en quête de la bonne syntaxe… de la tournure parfaite. The mot, the virgule, the syntaxe, the tournure.
Voilà.
Nous avons donc une petite histoire ensemble et, si on remonte un peu dans le temps, une petite généalogie… nous, promotion 2008-2009, encore sans nom de baptême.
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