« Contours »
Je l’avais rencontrée au détour d’une rue. J’étais tombé sous le charme de ses courbes, ces pleins et ces déliés, que l’on devinait à travers sa robe ni moulante ni transparente. Pourtant, j’avais sous les yeux les limites de son être : une existence sans barrière.
Et sans détour, elle pénétra les frontières de ma vie.
Parfois, nous nous promenions longuement en bordure du bois ; les jours de beaux temps, nous en parcourions le pourtour entier, mais nous pénétrions rarement la muraille d’enceinte que formaient les buissons. Lors de ces lentes déambulations, je me délectais à contempler furtivement son doux profil, le galbe de sa poitrine, la ligne de son dos, sa délicate silhouette…
Saurais-je m’affranchir des contours et atteindre son essence ?
Un soir, je la laissai rentrer seule. Une course, un crochet à faire ; elle qui ne voulait pas m’attendre inutilement ; son baiser envoyé sur un souffle ; moi qui l’attrapait au vol ; elle qui s’éloignait sur le trottoir…
Et une heure plus tard, un ami devant la porte. Sa figure triste, marquée par un je-ne-savais-quoi de sinistre, un trop-plein d’ombre…
Il usa de milles détours et n’osa pas me dire qu’il ne restait plus d’elle en ce monde qu’un dessin à la craie sur l’asphalte et un relief anonyme sous un drap blanc.
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