«Je suis le seigneur du château »
Mon frère,
Les plaintes et les cris montent depuis la cour. Je les entendais vaguement tout à l’heure mais ils m’apparaissent plus clairement maintenant. Oui, je les perçois très nettement : ce sont des cris de mécontentement, d’insatisfaction, d’accusation même.
Ils me désignent comme responsable de tout ça, ils m’avaient confié leurs vies et leurs enfants. Et pour cause, je suis le seigneur du château et mon rôle est et sera toujours de les guider.
Mais cette fois-ci cher frère, j’ai échoué, lamentablement, je l’avoue. La bataille que nous avons menée n’était pourtant pas perdue d’avance mais nous avons été vaincus et beaucoup d’entre nous y ont laissé la vie.
Je suis revenu hier sur nos terres, sans hâte, accompagné des derniers hommes qui se sont battus et ont survécu, avec pour seules armes nos remords et notre chagrin.
La honte m’accable et je ne peux que me cacher de ces femmes, ces enfants, ces familles qui nous avaient vus partir, pleins d’espoir et de témérité.
Mais tout cela, finalement, n’arrive que par ta faute.
Tu n’étais pas là. Tu es le seul et unique responsable de tant de tristesse et de malheurs. Tu nous as abandonné sans raison alors que le véritable seigneur de ce château ne pouvait être que toi. Notre père le savait et c’est pour cela qu’il t’avait désigné. Mais, par peur ou par déraison, tu es parti. Tu m’as laissé porter seul le poids de ce lourd fardeau dont je ne voulais pas.
Nous étions pourtant frères et nous avions fais la promesse de ne jamais nous quitter. Par pur égoïsme, tu en as décidé autrement en te sauvant il y de cela deux ans.
Et aujourd’hui plus que jamais mon frère, je t’en veux. Les mots que je t’écris là et qui ne te parviendront probablement jamais sont teintés d’un profond chagrin que je ne peux hélas partager qu’avec cette feuille de papier.
Je suis seul, triste et affaibli.
Je suis le seigneur triste, seul et affaibli de ce château qui n’est pas vraiment le mien…
Adieu,
Ton frère, malgré tout.
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