« Post-it »
Elle avait pris l’habitude de noter chaque petite phrase qui l’avait fait rire, chaque date qui l’avait marqué, chaque moment et chaque nom qui, selon elle, étaient importants, et ce sur des centaines et des centaines de petits post-it qu’elle avait accroché avec soin sur les grandes portes blanches de sa penderie.
Quand on rentrait dans sa chambre, on ne pouvait que prêter attention à cette immense œuvre d’art des temps modernes. Discrètement, on vérifiait si l’on apparaissait bien sur ce mur des souvenirs, si l’on faisait bien partie de ces gens qui comptaient. Car quand Romane nous portait de l’attention, quand on faisait partie de son cercle de proches, tout allait pour le mieux. Elle était de ces personnes dont on dit qu’il vaut mieux être son ami que son ennemi.
Et son amie, je l’avais été. Pendant de nombreuses années. J’avais été celle qu’elle appelait en premier quand elle ne se sentait pas bien, celle sur qui elle pouvait se reposer, celle avait qui elle partageait ses plus grands et honteux secrets.
Mais tout ça a bien changé. C’est Romane qui en a décidé ainsi et si elle l’a décidé, il ne peut en être autrement. Il semblerait que Romane et moi n’avions pas la même définition de l’amitié, et qu’en un clin d’œil, il a été possible pour elle d’oublier quinze années de rires, de partages et de soutien.
Trois ans après, je pense toujours à Romane, mais il m’importe peu de savoir que mon nom a très certainement disparu de son mur de post-it. Après tout, ce ne sont que des petits bouts de papier sur lesquels tout le monde a l’habitude de noter des informations importantes, certes, mais ponctuelles. C’est bien connu de toute façon, on ne classe pas les post-it, ils commencent à se décoller puis on les jette sans état d’âme ! J’aurais dû m’en douter et m’y préparer.
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