lundi 13 octobre 2008

Et vous alors, que feriez-vous si vous perdiez votre profil ?

À présent que nous nous connaissons un peu mieux "apprentis" et "maîtres" traducteurs se pose la question – oiseuse? – de notre profil. Avez-vous, avons-nous le profil de traducteurs littéraires? Pour nous permettre de répondre, j'ai repris une enquête menée par l'ATLF* en 1998 auprès de ses membres et il en ressort les quelques données suivantes (entre nombre d'autres), que je livre à votre réflexion :

– Les femmes sont semble-t-il largement majoritaires puisqu’elles représentent 62% sur les 215 personnes ayant répondu au questionnaire. Signalons qu’une enquête similaire réalisée en 1983 donnait une proportion de 46% seulement.
– 72% des traducteurs habitent en Île-de-France. Pourcentage qu’il faut malgré tout nuancer de cette précision que la proportion de traducteurs résidant en province est en constante évolution puisqu’ils n’étaient que 20% en 1983, contre 28% en 1998. Gageons, qu’avec notamment l’utilisation croissante de l’Internet et la rapidité des moyens de transports modernes, ce chiffre est aujourd’hui, 10 ans après, bien plus élevé et sera désormais en constante accroissement.
– Quant à la moyenne d’âge, elle est de 49 ans environ, contre 45 ans en 1983. Commentant cette évolution, la sociologue Julie Vitrac qui a dépouillé et analysé les questionnaires envoyés aux membres de l’ATLF, déclare :
« Mais cet âge moyen ne s’explique plus de la même façon : si les traducteurs de moins de 30 ans sont toujours assez rares (2,8% en 1998), on voit se développer de façon considérable la part des traducteurs âgés de plus de 60 ans (19,6% en 1998 contre seulement 8% en 1983 ».
Sur le point précis de la faible représentation des moins de 30 ans (et donc de l’incidence que cela peut avoir sur le calcul de la moyenne d’âge), il convient tout de même de signaler qu’il est possible d’interpréter ce chiffre en avançant l’idée que la majorité de ces “jeunes” traducteurs littéraires tarde peut-être à percevoir la nécessité d’entrer dans le cadre associatif, quel qu’il soit, et ce pour au moins deux raisons majeures.
D’une part parce que, dans la mesure où il n’est pas si aisé que cela de se faire une place dans le monde très fermé de la traduction littéraire, on comprend qu’un traducteur, pour qui la traduction est au départ le plus souvent une activité annexe, par exemple en marge de ses études, mette un peu de temps à se définir lui-même précisément en tant que traducteur littéraire.
Et d’autre part, il ne faut pas oublier que le traducteur littéraire est généralement ce que l’on appelle un “travailleur indépendant”, avec tout ce que cela signifie en terme de contingences diverses, et il paraît de fait tout aussi logique que la prise de conscience d’appartenir à un corps de métier (sur lequel il convient de s’accorder collectivement pour lui de donner des règles, lui constituer un statut et un cadre juridique capables de lui permettre de défendre ses intérêts et ses droits) se fasse au terme d’un processus, qui peut être lent… et dont l’accession à une certaine stabilité, financière en particulier, paraît l’élément majeur.
– Concernant la répartition pour les différentes langues traduites, voici ce qu’elle fait apparaître: 52% de membres pour l’anglais ; 16% pour l’allemand, 8% pour l’espagnol et 6% pour l’italien.
Ce qui, pour ce qui nous intéresse directement en tant qu’hispanistes, soulève une question : Est-ce à dire que les traducteurs de l’espagnol sont peu nombreux en France et que, sachant que parallèlement la littérature espagnole et latino-américaine représente tout de même un pourcentage important de la littérature étrangère totale publiée dans notre pays, ce sont plus ou moins toujours les mêmes qui sont sollicités par les maisons d’édition ?
– La rubrique “Différentes pratiques de la traduction” fournit quelques éléments de réponse pour l’une des premières questions que ne manquera pas de se poser le traducteur débutant : est-il possible de vivre essentiellement de son travail de traduction ?
L’étude de l’ATLF distingue trois catégories de traducteurs littéraires :
1- Les traducteurs “occasionnels” (dont la traduction représente moins de 30% du revenu). C’est le cas de 33% des membres de l’association. Il s’agit à 71% d’enseignants.
2- Les traducteurs “à temps partiel” (dont la traduction représente de 31 à 70 % du revenu annuel). C’est le cas de 20 % des membres de l’association. Le traducteur à “temps partiel” complète son activité de traduction par d’autres activités, comme l’édition, l’écriture ou, le plus souvent, par l’enseignement.
3- Les traducteurs à “plein temps” (dont la traduction représente plus de 70% du revenue annuel) représentent 47% des membres de l’association ; signalons que sur ces 47%, seuls 67% vivent exclusivement de la traduction (ce qui donne 37% de l’ensemble des membres de l’association).
– Il n’est pas non plus inutile de rappeler ce chiffre à ceux qui penseraient que l’on peut s’improviser traducteur littéraire : 93,5% des membres de l’ATLF sont diplômés de l’enseignement supérieur.

* ATLF : Association des Traducteurs Littéraires de France
adresse : 49 rue Vaugirard 75006 Paris
Téléphone : 01 45 49 26 44
site web : http://www.atlf.org

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