par tataAnne
Comme Vanessa et Olivier avant elle, Perrine a eu à composer un petit texte à partir des mots saugrenus prononcés par les uns et les autres (hors enseignante, cela va de soi) pendant le cours de traduction collective de la semaine dernière. Sans doute certains se demandent-ils comment ils ont pu surgir entre les murs de notre noble université… Mystère de la traduction !
Michal Komar était un athlète polonais né dans les années quarante, extrêmement brillant dans sa discipline. En effet, en 1972, il remporta la médaille d’or de lancer du poids aux Jeux Olympiques d’été à Munich. Il battit même le record du monde, s’inscrivant ainsi dans les annales. Cet illustre personnage était connu pour son impressionnante carrure, ses mains de bûcheron, ses tenues plus belles les unes que les autres et, bien entendu, pour son immense talent. Dès qu’il entrait en piste, l’assemblée restait muette face à ce géant ; toute la gente féminine fondait devant ce corps d’esthète. Son épouse, Ewa Komar, était une femme comblée, eu égard au charme, à la gentillesse et à l’humour de son mari.
En 1975, leur fils Stanislaw vint au monde. Seuls ses parents le trouvaient beau ; à sa naissance, son corps était recouvert de poils noirs, et sur sa tête apparaissaient déjà quelques cheveux roux. Malheureusement, cette laideur ne fit que s’accroître au fil du temps.
Déjà tout petit, son père lui transmit sa passion et le poussa à envisager une carrière lui aussi. Mais, en dépit des efforts fournis, l’enfant s’avéra être très mauvais, chose que son père se garda bien de lui avouer, de peur de le vexer. Ainsi, Stanislaw s’entraînait régulièrement, prêt à sacrifier ses études pour devenir à son tour une véritable star du lancer du poids. Sa mère tenta à plusieurs reprises de le dissuader, mais, étant devenu un adolescent têtu et borné, il refusa toute forme d’opposition.
En mars 1993, Michal fut victime d’un accident de la route et mourut sur le coup. Ses fans furent bouleversés, sa famille fut anéantie. Stanislaw, qui avait alors dix-huit ans, voulut faire honneur à son père. Ainsi, il décida de s’inscrire aux championnats d’Europe d’athlétisme d’Helsinki qui auraient lieu en août 1994. Il lui restait donc à peine plus d’un an pour se préparer afin d’être sélectionné. Il passait ses journées à faire des exercices d’assouplissement, de musculation, d’équilibre, de coordination…, sous le regard inquiet d’Ewa qui ne voyait pas sa participation d’un bon œil et craignait qu’on ne rie de lui. C’est pourquoi elle faisait en sorte que les médias ne l’atteignent pas, pour qu’il soit à l’abri de toute moquerie sur son physique. Effectivement, Stanislaw ne jouissait pas du même attrait que son géniteur. Certes, il était grand et costaud, mais ses qualités s’arrêtaient là : il avait conservé son corps velu, il avait des yeux marrons globuleux, un nez épaté, une bouche géante, semblable à celle d’une raie Manta, et une chevelure rousse hirsute. Pour sûr, il n’était vraiment pas agréable à regarder.
Malgré les précautions de sa mère, les journaux commençaient à parler de lui et espéraient retrouver en ce jeune homme la virtuosité de son père.
Lorsque les championnats débutèrent, Stanislaw sentit qu’il allait faire de grandes choses. Il avait visionné des dizaines de fois les performances de Michal Komar, afin d’adopter la bonne attitude en entrant sur le terrain et la bonne posture en jetant le poids. Il avait même fait preuve d’abstinence sexuelle durant cette longue année car, selon lui, cela améliorerait ses résultats.
Le jour J arriva enfin, et Stanislaw fit son entrée : ses cheveux fauves étaient attachés en une queue de cheval, ses chaussettes étaient remontées jusqu’aux genoux, il revêtait un juste-au-corps orange et un épluche-patate pendait à son cou en guise de porte-bonheur.
À peine eut-il traversé la moitié de la piste que la foule s’esclaffa. Jamais un athlète ne s’était présenté d’une façon si grotesque. Les rires s’amplifiaient à mesure qu’il approchait du centre. Le jeune Polonais observait les tribunes, sans comprendre ce qui se passait. Il prit place à l’avant du cercle, effleura du bout des doigts son amulette, s’accroupit, se releva, répéta l’action trois fois, avertit d’un signe de la tête qu’il était prêt, saisit le poids de sa main gauche et le plaça au creux de son cou. Il tourna sur lui-même en émettant de petits couinements, similaires à ceux d’une souris, et lança le projectile de toutes ses forces en poussant des gémissements de douleurs. Mais comme il était prévisible, ses efforts furent vains : il réalisa une distance médiocre et fut hué par le public.
Les jours suivants sa pitoyable prestation, le monde entier se gaussa à ses dépends, inventant des surnoms ridicules, eu égard à son aspect physique et à sa piètre performance. Celui qui revenait constamment était « Monsieur Carotte », sobriquet que les gens adoptèrent si aisément que bientôt, on ne l’appela plus que de cette façon, oubliant presque son véritable patronyme.
Depuis lors, sa « célébrité » fut entachée, et seules les railleries des médias résonnèrent à ses oreilles. Il comprit qu’il devait renoncer à cette passion qui finalement n’avait jamais été la sienne, mais plutôt celle de son géniteur.
***
Michal Komar était un athlète polonais né dans les années quarante, extrêmement brillant dans sa discipline. En effet, en 1972, il remporta la médaille d’or de lancer du poids aux Jeux Olympiques d’été à Munich. Il battit même le record du monde, s’inscrivant ainsi dans les annales. Cet illustre personnage était connu pour son impressionnante carrure, ses mains de bûcheron, ses tenues plus belles les unes que les autres et, bien entendu, pour son immense talent. Dès qu’il entrait en piste, l’assemblée restait muette face à ce géant ; toute la gente féminine fondait devant ce corps d’esthète. Son épouse, Ewa Komar, était une femme comblée, eu égard au charme, à la gentillesse et à l’humour de son mari.
En 1975, leur fils Stanislaw vint au monde. Seuls ses parents le trouvaient beau ; à sa naissance, son corps était recouvert de poils noirs, et sur sa tête apparaissaient déjà quelques cheveux roux. Malheureusement, cette laideur ne fit que s’accroître au fil du temps.
Déjà tout petit, son père lui transmit sa passion et le poussa à envisager une carrière lui aussi. Mais, en dépit des efforts fournis, l’enfant s’avéra être très mauvais, chose que son père se garda bien de lui avouer, de peur de le vexer. Ainsi, Stanislaw s’entraînait régulièrement, prêt à sacrifier ses études pour devenir à son tour une véritable star du lancer du poids. Sa mère tenta à plusieurs reprises de le dissuader, mais, étant devenu un adolescent têtu et borné, il refusa toute forme d’opposition.
En mars 1993, Michal fut victime d’un accident de la route et mourut sur le coup. Ses fans furent bouleversés, sa famille fut anéantie. Stanislaw, qui avait alors dix-huit ans, voulut faire honneur à son père. Ainsi, il décida de s’inscrire aux championnats d’Europe d’athlétisme d’Helsinki qui auraient lieu en août 1994. Il lui restait donc à peine plus d’un an pour se préparer afin d’être sélectionné. Il passait ses journées à faire des exercices d’assouplissement, de musculation, d’équilibre, de coordination…, sous le regard inquiet d’Ewa qui ne voyait pas sa participation d’un bon œil et craignait qu’on ne rie de lui. C’est pourquoi elle faisait en sorte que les médias ne l’atteignent pas, pour qu’il soit à l’abri de toute moquerie sur son physique. Effectivement, Stanislaw ne jouissait pas du même attrait que son géniteur. Certes, il était grand et costaud, mais ses qualités s’arrêtaient là : il avait conservé son corps velu, il avait des yeux marrons globuleux, un nez épaté, une bouche géante, semblable à celle d’une raie Manta, et une chevelure rousse hirsute. Pour sûr, il n’était vraiment pas agréable à regarder.
Malgré les précautions de sa mère, les journaux commençaient à parler de lui et espéraient retrouver en ce jeune homme la virtuosité de son père.
Lorsque les championnats débutèrent, Stanislaw sentit qu’il allait faire de grandes choses. Il avait visionné des dizaines de fois les performances de Michal Komar, afin d’adopter la bonne attitude en entrant sur le terrain et la bonne posture en jetant le poids. Il avait même fait preuve d’abstinence sexuelle durant cette longue année car, selon lui, cela améliorerait ses résultats.
Le jour J arriva enfin, et Stanislaw fit son entrée : ses cheveux fauves étaient attachés en une queue de cheval, ses chaussettes étaient remontées jusqu’aux genoux, il revêtait un juste-au-corps orange et un épluche-patate pendait à son cou en guise de porte-bonheur.
À peine eut-il traversé la moitié de la piste que la foule s’esclaffa. Jamais un athlète ne s’était présenté d’une façon si grotesque. Les rires s’amplifiaient à mesure qu’il approchait du centre. Le jeune Polonais observait les tribunes, sans comprendre ce qui se passait. Il prit place à l’avant du cercle, effleura du bout des doigts son amulette, s’accroupit, se releva, répéta l’action trois fois, avertit d’un signe de la tête qu’il était prêt, saisit le poids de sa main gauche et le plaça au creux de son cou. Il tourna sur lui-même en émettant de petits couinements, similaires à ceux d’une souris, et lança le projectile de toutes ses forces en poussant des gémissements de douleurs. Mais comme il était prévisible, ses efforts furent vains : il réalisa une distance médiocre et fut hué par le public.
Les jours suivants sa pitoyable prestation, le monde entier se gaussa à ses dépends, inventant des surnoms ridicules, eu égard à son aspect physique et à sa piètre performance. Celui qui revenait constamment était « Monsieur Carotte », sobriquet que les gens adoptèrent si aisément que bientôt, on ne l’appela plus que de cette façon, oubliant presque son véritable patronyme.
Depuis lors, sa « célébrité » fut entachée, et seules les railleries des médias résonnèrent à ses oreilles. Il comprit qu’il devait renoncer à cette passion qui finalement n’avait jamais été la sienne, mais plutôt celle de son géniteur.
8 commentaires:
Perrine, ce serait bien de nous rappeler les mots à intégrer… Merci !
Alors je devais intégrer les mots suivants : exercices d'assouplissement, athlète, polonais, Monsieur Carotte, eu égard, pour sûr, épluche-patate, abstinence, raie Manta, chaussettes, couinement et gémissement.
Bravo Perrine pour ton récit ! Et encore désolé d'avoir été à l'origine de tant de mots !!!
C'est vrai qu'il est très bien, ce texte… Tu t'en es bien tirée.
Petite précision : il est dit que Perrine a eu à composer un petit texte à partir des mots saugrenus prononcés par les uns et les autres (hors enseignante, cela va de soi). J'aimerais juste que l'on me rappelle qui a proposé (ou devrais-je dire imposé) "épluche-patate"...
« Épluche-patate » ? Mmmhhhh… Toi, non ?
Ahaha ^^
Et Monsieur Carotte?
Ah non, hein, ne me mettez pas "Monsieur Carotte" sur le dos ;-))))
Enregistrer un commentaire