1) Émeline Bénard. Comment êtes-vous devenu auteur de bandes dessinées ?
Philippe Cudray. Je suis autodidacte. J’ai commencé progressivement à travailler avec des revues puis avec des éditeurs.
2) E. B. Quel lecteur êtes-vous ?
P. C. Je ne lis pas de romans, la narration m’ennuie. Je ne lis pas non plus de bandes dessinées pour la même raison. Je ne lis que des ouvrages scientifiques, naturalistes ou spirituels (bien que je sois non croyant), car je ne m’intéresse qu’aux idées et à la nature.
3) E. B. Où trouvez-vous l’inspiration ? Si elle vous manque, que faites-vous pour la retrouver ?
P. C. Les principales sources d’inspiration sont la nature et l’art. Les artistes s’influencent et se stimulent les uns les autres. La nature est une œuvre d’art.
4) E. B. Vous préférez généralement la forme courte, pour quelle(s) raison(s) ?
P. C. La narration dévie souvent l’art vers sa forme distractive, et l’éloigne de l’essentiel : exprimer la partie irréductible du monde. Les formes courtes échappent à cette dérive. Je comptais même au début me lancer dans le dessin d’humour, mais ce genre a quasiment disparu, remplacé par le dessin de presse (lié à l’actualité). La bande dessinée courte reste une solution pour exprimer des idées.
5) E. B. Vous avez travaillé avec d’autres auteurs, notamment avec votre frère, Jean-Luc Coudray. Comment la collaboration se déroule-t-elle ?
P. C. Entre frères, il y a une relation de confiance, donc aucun problème.
6) E. B. Vous parlez de l’aspect relationnel, mais qu’en est-il de la pratique ? Par exemple, les tâches sont-elles bien séparées, ou le scénariste influence-t-il le dessinateur, voire l’inverse ?
P. C. En ce qui concerne le travail entre mon frère et moi, le scénario et le dessin sont bien séparés. Chacun travaille l'un après l'autre sans s'influencer. La seule partie en commun concerne le choix des scénarios à partir de brouillons.
Je n'ai jamais travaillé avec d'autres scénaristes ou d'autres dessinateurs.
7) E. B. Quel est votre rapport avec vos traducteurs : entrent-ils en contact, vous interrogent-ils sur des points de traductions ? Avez-vous un traducteur attitré pour chaque langue ? Avez-vous eu la curiosité de lire la traduction d’une de vos œuvres ? Si oui, qu’en avez-vous pensé ?
P. C. J’ai été traduit en japonais, chinois, allemand et anglais. Pour les trois premières langues, ne les connaissant pas du tout, je fais confiance aux traducteurs. Pour l’anglais (l’américain plus exactement), j’ai relu les traductions d’autant plus que l’éditeur a ajouté quelquefois des bulles pour faciliter la compréhension pour un public américain. Je n’ai demandé qu’une ou deux petites rectifications pour des ajouts qui me semblaient trop prévenir la chute de l’histoire. Ce n’est que pour l’anglais que l’on m’a envoyé les traductions pour vérification. Le seul pays ou j’ai été traduit chez plusieurs éditeurs est le Japon, je ne me suis pas posé la question de savoir si c’est le même traducteur qui a traduit.
8) E. B. Quel est votre rapport avec les éditeurs ? Sont-ils très impliqués dans le processus de création ?
P. C. Non. Ils ne font que corriger les éventuelles fautes d’orthographe ou me signale les manques de clarté.
9) E. B. À votre avis, le traducteur est-il un auteur ou un passeur ?
P. C. Cela dépend de ce qui est traduit. Dans mon cas, les textes sont simples, mais le sens doit être bien compris. Je dirais que c’est un passeur. Dans le cas du roman, ou de la poésie, il doit être un auteur. Ou un interprète, mais dans le sens noble du terme, comme en musique.
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