jeudi 21 janvier 2010

Une version spéciale pour Julie D.

En photo : Gene Hackman June 08, par joran van der sloot

Lors du dernier cours de version avec les étudiants du groupe 1 de CAPES, j'ai parlé d'un texte très intéressant à traduire. Ça n'est pas tombé dans l'oreille d'une sourde : Julie D. la réclame… La voici.

El sargento Manuel Palacios enganchó la marcha atrás, pisó el acelerador y las gomas gimieron maltratadas cuando el auto giró hacia atrás para salir del parqueo. Parecía menos frágil cuando, sentado al timón, miró hacia la puerta de la Central y vio la cara incólume del teniente Mario Conde : quizás no había logrado impresionarlo con aquella maniobra que ni Gene Hackman en French Connection. Aunque era tan joven y la gente decía que en unos años sería el mejor investigador de la Central, el sargento Manuel Palacios exhibía una rampante inmadurez cuando en sus manos caían una mujer o un timón. La fobia del Conde al ejercicio para él demasiado complejo de guiar con las manos y seguir con la vista lo que había delante y detrás del auto, y a la vez acelerar, cambiar las velocidades o frenar con los pies, le permitía a Manolo ser chófer perpetuo en los casos que el Viejo insistía en encargarlos a los dos. El Conde siempre había pensado que aquel concubinato automovilístico con que se ahorraba un chófer era la razón por la que el mayor Rangel los enyuntaba con tanta frecuencia. En la Central algunos decían que el Conde era el mejor investigador de la plantilla y que el sargento Palacios pronto lo superaría, pero pocos entendían la afinidad nacida entre la parsimonia agobiante del teniente y la vitalidad arrolladora de aquel sargento casi famélico y con cara de niño que seguramente hizo alguna trampa para ser admitido a la Academia de la Policía. Sólo el Viejo comprendió que ellos podrían entenderse. Al final parecían lograrlo.

Leonardo Padura Fuentes, Pasado perfecto, Barcelona, Tusquets Editores, 2000, pp.34-35.

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La traduction que je vous propose :

Le sergent Manuel Palacios passa la marche arrière et appuya sur le champignon ; soumis à un tel traitement, les pneus gémirent quand la voiture braqua pour sortir du parking. Il semblait moins fragile quand, assis derrière le volant, il regarda en direction de la porte du Commissariat et aperçut le visage impassible du lieutenant Mario Conde : peut-être, après tout, n'était-il pas parvenu à l'impressionner avec cette manœuvre que Gene Hackman himself n'aurait pas tentée dans French connection. Il avait beau être jeune, les gens avaient beau estimer que d'ici quelques années il serait le meilleur enquêteur du Commissariat, le sergent Manuel Palacios faisait montre d'une immaturité rapante quand une femme ou un volant tombaient entre ses pattes. La véritable phobie qu'avait Conde de l'exercice pour lui bien trop compliqué de tenir le volant avec les mains, tout en surveillant du regard ce qu'il se passait à l'avant et à l'arrière du véhicule, en accélérant, en changeant les vitesses ou en freinant avec les pieds, permettait à Manolo d'être le chauffeur attitré dans les affaires que le Vieux insistait pour leur confier à tous les deux. Conde avait toujours pensé que ce concubinage automobilistique, grâce auquel il s'économisait un chauffeur, était la raison pour laquelle le major Rangel les associait aussi souvent. Au Commissariat, certains disaient que Conde était le meilleur enquêteur de l'effectif, mais que le sergent l'aurait bientôt dépassé ; sauf que peu comprenaient l'affinité qui était née entre la parcimonie étouffante du lieutenant et la vitalité écrasante de ce sergent presque famélique et à la tête de gamin qui avait probablement triché pour réussir à intégrer l'École de Police. En réalité, seul le Vieux avait compris que ces deux-là pourraient s'entendre. Et au bout du compte, ils semblaient effectivement y parvenir.

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Coralie nous propose sa traduction :

Le sergent Manuel Palacios enclencha la marche arrière, écrasa l'accélérateur, et les pneus, maltraités, gémirent quand l'auto fit demi-tour pour sortir du parking. Il semblait moins fragile quand, au volant, il avait regardé vers la porte du Commissariat et avait vu le visage impassible du lieutenant Mario Conde : peut être n'aurait-il pas réussi à l'impressionner avec cette manœuvre à la Gene Hackman dans French Connection. Même s'il était trop jeune et que les gens disaient qu'il serait dans quelques années le meilleur enquêteur du Commissariat, le sergent Manuel Palacios exhibait une fervente immaturité quand une femme ou un volant lui tombait entre les mains. La phobie de Conde qui siégeait dans l'exercice, pour lui trop complexe, de conduire avec les mains et de surveiller avec les yeux ce qu'il y avait devant et derrière l'auto, et en même temps accélérer, changer de vitesse ou freiner avec les pieds, permettait à Manolo d'être le chauffeur nommé d'office dans les affaires que le Vieux insistait pour leur refiler à tous les deux. Conde avait toujours pensé que ce concubinage automobile, grâce auquel il économisait un chauffeur, était la raison pour laquelle le major Rangel les accouplait si souvent. Au Commissariat, certains disaient que Conde était le meilleur enquêteur de tout le personnel et que le sergent Palacios le dépasserait bientôt, mais rares étaient ceux qui comprenaient l'affinité née entre l'épuisante parcimonie du lieutenant et l'inébranlable vitalité de ce sergent presque famélique au visage d'enfant qui avait certainement triché pour être admis à l'Académie de Police. Seul le Vieux avait comprit qu'ils pourraient s'entendre. Au bout du compte, ils semblaient y arriver.

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Julie D. nous propose sa traduction :

Le sergent Manuel Palacios passa la marche arrière, appuya sur l'accélérateur et les pneus gémirent, maltraités quand la voiture fit un demi-tour pour sortir du parking. Il semblait moins fragile quand, assis au volant il regarda vers la porte du commissariat central et vit le visage indemne du lieutemant Mario Conde: peut-être n'avait-il pas réussi à l'impressionner avec cette manoeuvre que même Gene Hackman n'avait pas faite dans French Connection. Bien qu'il soit si jeune et que les gens disent que dans quelques années il serait le meilleur enquêteur du commissariat, le sergent Manuel Palacios montrait une immaturité croissante quand une femme ou un volant tombaient entre ses mains. La phobie de Conde face à l'exercice trop compliqué pour lui de conduire avec les mains et de suivre du regard ce qu'il y avait derrière et devant la voiture, et en même temps d'accélérer, de changer les vitesses ou de freiner avec les pieds, permettait à Manolo d'être l'éternel chauffeur dans les cas que le Vieux persistait à leur donner à eux deux. Conde avait toujours pensé que ce concubinage automobile grâce auquel il économisait un chauffeur était la raison pour laquelle le major Rangel les attelait si fréquemment ensemble. Au commissariat, certaines personnes disaient que Conde était le meilleur enquêteur du personnel et que le sergent Palacios le surpasserait bientôt, mais ils étaient peu nombreux à comprendre l'affinité née entre l'épuisante mesure du lieutenant et la vitalité irrésistible de ce sergent presque famélique à tête d'enfant qui avait sûrement fait quelque tricherie pour être admis à l'Académie de Police. Seul le Vieux avait compris qu'ils pourraient s'entendre. Finalement, ils semblaient y arriver.

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Amélie nous propose sa traduction :

Le sergent Manuel Palacios enclencha la marche arrière, appuya sur l’accélérateur ; traités de la sorte, les pneus gémirent quand la voiture fit demi-tour pour sortir du parking. Il semblait moins fragile quand, assis derrière le volant, il jeta un œil vers la porte du Commissariat et vit le visage impassible du lieutenant Mario Conde : il n’avait peut-être pas réussi à l’impressionner avec cette manœuvre, que Gene Hackman lui-même n’avait pas réalisée dans French Connection. Même s’il était très jeune et que les gens disaient que dans quelques années, il serait le meilleur enquêteur du Commissariat, le sergent Manuel Palacios affichait une immaturité grandissante sitôt qu’une femme ou un volant tombaient entre ses mains. La phobie qu’avait Conde face à l’exercice, bien trop compliqué pour lui, consistant à conduire la voiture avec ses mains tout en surveillant des yeux ce qui se trouvait devant ou derrière, en accélérant, en changeant de vitesse et en freinant avec les pieds, permettait à Manolo d’être le chauffeur permanent sur les affaires que le Vieux insistait pour leur confier à tous les deux. Conde avait toujours pensé que ce concubinage automobilistique, grâce auquel il économisait un chauffeur, était la raison pour laquelle le majeur Rangel les associait aussi souvent. Au Commissariat, certains disaient que Conde était le meilleur enquêteur de l’équipe et que le sergent Palacios allait bientôt le dépasser, ; en revanche, peu comprenaient l’affinité naissante entre la lenteur exaspérante du lieutenant et la vitalité excessive de ce sergent quasi famélique, et à qui le visage de poupon avait dû jouer des tours pour être admis à l’École de Police. Seul le Vieux avait compris qu’ils pourraient s’entendre. Au bout du compte, ils paraissaient y parvenir.

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