dimanche 23 août 2009

Votre thème du week-end, Zévaco

En photo : Bouquet de fleurs à Paris, par gelinh

« … Et pour finir d’un mot, mademoiselle Lise… – pardon : madame à présent ! – aussi vrai que vous êtes la perle du quartier… du bonheur ! on vous en souhaite plein le cœur, plein la vie ! »
Alors, autour de la mariée, c’est un cliquetis cristallin de coupes entre-choquées, une confusion de vœux attendris, de bons rires mouillés de pleurs, une explosion de sympathie charmée.
Et elle, une blonde aux yeux bleus, elle, si fièrement heureuse et si précieusement jolie que c’est une bénédiction, vraiment, d’admirer tant de grâce et de bonheur unis sur un même visage humain, souriante, balbutiante, c’est vers lui… vers son Georges… vers l’époux bien-aimé, qu’elle tourne son regard noyé de tendresse.
Lui ! vingt-six ans, très élégant, d’une distinction de parole et de geste qui intimide ce milieu de petite bourgeoisie, un front audacieux, des prunelles d’une vertigineuse douceur, une sourde inquiétude sous le masque d’insouciance… une de ces physionomies tourmentées, trop belles, qui affolent l’imagination féminine.
Autour de la nappe familiale, ils sont douze, pas plus : la mariée, Lise ; le marié, Georges Meyranes ; témoins et invités, – ouvriers aisés du voisinage ; – les demoiselles d’honneur : deux Watteau populaires en percale rose, et enfin, la veuve Frémont, figure de claire bonté, sous la riche coiffe angevine, admirable rayonnement d’affection passionnée lorsqu’elle contemple celle qu’elle nomme son enfant, sa fille, sa Lisette…
– Maintenant, reprend le témoin qui vient de parler – un métallurgiste de l’usine Cail – à la bonne franquette ! Il n’y a pas de noce sans chanson ; il faut que chacun dise la sienne !
– Honneurs aux dames, alors ! proclame un autre – un
électricien du « Bon Marché » – et que la mariée commence !
– Moi, je demande C’est un oiseau qui vient de France !
crie un invité.
Par la fenêtre ouverte, un beau soleil de mai jette ses flots de gaîté dans la coquette salle à manger. Du boulevard des Invalides, monte l’allégresse d’une ronde enfantine. Les cloches de Saint-François-Xavier carillonnent quelque cérémonie. Là-bas, dans l’avenue de Villars, la musique d’un régiment qui passe lance les éclats sonores de ses cuivres…
Et ce sont les joies plébéiennes éparses dans l’air de cette splendide après-midi, qui viennents’associer à la joie intime qui vibre en ce troisième étage de la rue de Babylone.
Et c’est la lointaine fanfare, ce sont les cloches voisines, c’est le soleil, c’est Paris qui entrent et murmurent à la mariée :
– Comme elle est jolie ! … Ah ! puissent s’accomplir les vœux des braves gens qui l’entourent !
Heureuse ?… Elle l’est au delà de tous les souhaits. Elle vit le cher rêve de son cœur. Cette heure adorable réalise toute son espérance. Elle s’appelle maintenant Mme Meyranes. Et elle répète ce nom, tout bas, dans une extase ravie… Georges est à elle !
Lui, tandis que les verres se choquent, moussent et rient…, lui, debout, fixe un point au dehors…
Et ce n’est pas sur les deux larges avenues venant se croiser à cet angle que tombe la foudre de son regard un instant illuminé d’un éclair sauvage… ni sur l’église où se sont, il y a trois heures à peine, échangées les alliances…

Michel Zévaco, Les Fleurs de Paris, 1904.

***

Laëtitia nous propose sa traduction :

« … Y para acabar con una palabra, señorita Lise… – disculpe : señora ahora ! – tan verdad como es la alhaja del barrio… ¡ muchas felicidades ! ¡ que llenen su corazón, su vida ! »
Entonces, alrededor de la novia, se oyen el choque cristalino de las copas, una confusión de votos enternecidos, de buenas risas empapadas de llantos, una explosión de simpatía encantada.
Y ella, una rubia de ojos azules, ella, tan orgullosamente feliz y tan preciosamente guapa que es una bendición, realmente, admirar tanta gracia y tanta dicha unidas en un mismo rostro humano, sonriendo, balbuceando, dirige hacia él… hacia su Georges… hacia el esposo querido, su mirada sumergida de ternura.
¡ Él ! veintiséis años, muy elegante, de una distinción en el hablar y en el actuar que intimida a esa clase de la pequeña burguesía, una frente audaz, unos ojos de una vertiginosa dulzura, una sorda inquietud bajo la máscara de despreocupación… una de esas fisionomías atormentadas, demasiadas bellas, que enloquecen la imaginación femenina.
Alrededor de la mesa familiar, son doce, no más : la novia, Lise ; el novio, Georges Meyranes ; padrinos e invitados, – obreros acomodados del vecindario ; las damas de honor : dos Watteau populares de percal rosa, y por último, la viuda Frémont, con su rostro de clara bondad, bajo la rica toca angevina, resplandeciendo admirablemente de un cariño apasionado al contemplar a la que llama su niña, su hija, su Lisette…
– Ahora, prosigue el padrino que acaba de hablar – un metalurgista de la fábrica Cail – ¡ a la pata la llana ! No hay boda sin canción ; ¡ hace falta que cada uno diga la suya !
– Entonces, ¡ honor a la damas ! proclama otro – un electricista del « Buen Mercado » – ¡ que empiece la novia !
– ¡ Yo pido Es un pájaro que viene de Francia ! grita un invitado.
Por la ventana abierta, un hermoso sol de mayo echa sus raudales de alegría en el coquetón comedor. Del bulevar de los Inválidos, sube el alborozo de un corro infantil. Las campanas de San Francisco-Javier repican para alguna ceremonia. Allá, en la avenida de Villars, la música de un regimiento que está pasando echa los estrépitos de sus cobres…
Y las alegrías plebeyas dispersas en el aire de esta espléndida tarde vienen a unirse a la alegría íntima que vibra en esta tercera planta de la calle de Babilonia.
Y la lejana charanga, las campanas vecinas, el sol, París, entran y murmuran a la novia :
– ¡ Qué guapa es ! … ¡ Ah ! ¡ Ojalá se cumplan los votos de la buena gente que la rodean !
¿ Feliz ?… Lo es, más allá de todos sus deseos. Ella está viviendo el querido sueño de su corazón. Esta hora encantadora realiza toda su esperanza. Ahora se llama señora Meyranes. Y está repitiendo este apellido, bajito, en una éxtasis embelesada… ¡ Georges es suyo !
Él, mientras están chocando, espumando y riendo las copas…, él, de pie, mira fijamente un punto fuera…
Y no es en las dos avenidas anchas que se cruzan en esta esquina en las que cae su mirada fulminante iluminada un instante por un relámpago salvaje… ni en la iglesia donde, hacía apenas tres horas, se cambiaron los anillos…

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