samedi 13 mars 2010

Exercice de version, 113

Cuando me arranco al bosque de los sueños, a la selva oscura del dormir, y me cobro a mí mismo, me voy lentamente completando. Porque he dejado de interesarme por mis sueños. A la mierda con Freud.
Todo lo que somos, sí, tiene ese revés de sueño, ese cimiento o esa escombrera turbia, y alguien se preguntaba, irónico, por los sue­ños de Kant, de Descartes, de Hegel. ¿Qué clase de sueños no ten­drían esos monstruos de razón? Toda la represión mental de sus sistemas había de tener, sin duda, un revés caótico, doliente y atri­bulado. Cómo negar la mitad en sombra de la vida, si están ahí los sueños. Hay una época de la existencia en que uno decide ser sólo sus sueños, y el surrealismo es una adolescencia en cuanto que quie­re alimentarse de sueños. Hay una madurez, un clasicismo —a cual­quier edad de la vida— en que optamos por nuestra razón, por nuestro rigor, por nuestra estatura. Qué más da. Tan pueril es vivir de sueños como vivir de silogismos. Claro que se vive de lo que se puede, y tarda uno en aprender a vivir de realidades, de cosas, de ob­jetos, como viven los seres naturales. El hombre es un ser de lejanías, dijo el otro. Sí, el hombre es un ser de utopías, de distancias, de «proyectos líricos». El hombre tiene que aprender a ser criatura de cercanías, pastor de lo inmediato.
Mis sueños sólo me dan una versión embrollada de lo que tengo muy claro. Cuando sueño soy el exégeta confuso de mí mismo, el amanuense indescifrable y pelmazo que quiere anotarlo todo y todo lo embarulla. El sueño le pone a mi vida un comentario ocioso y os­curo, sin secreto, pero con sombra.

Francisco Umbral, Mortal y rosa

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Laëtitia Sw. nous propose sa traduction :

Quand je m’enfonce dans le bois des rêves, dans la forêt obscure du sommeil, et que je reviens à moi, je mets lentement un terme à mon intériorité. Parce que j’ai cessé de m’intéresser à mes rêves. Freud peut aller se faire voir.
Oui, tout ce que nous sommes présente cet envers de rêve, cette origine ou ce dépotoir trouble. Et si quelqu’un s’interrogeait, ironique, sur les rêves de Kant, de Descartes, de Hegel, il se demanderait : quel genre de rêves devaient faire ces monstres de raison ? Tout le refoulement mental de leurs systèmes devait avoir sans aucun doute un revers chaotique, douloureux et angoissant. Comment nier la moitié d’ombre de la vie, si les rêves sont là. Il y a un moment dans l’existence où on décide de n’être que ses rêves, et le surréalisme est une adolescence en ce qu’il veut s’alimenter de rêves. Il y a une maturité, un classicisme — à tout âge de la vie — où nous optons pour notre raison, pour notre rigueur, pour notre stature. Qu’est-ce que cela apporte de plus ? Il est aussi puéril de vivre de rêves que de vivre de syllogismes. Il est clair que l’on vit de ce que l’on peut, et on tarde à apprendre à vivre de réalités, de choses, d’objets, comme vivent les êtres naturels. L’homme est un être du lointain, comme disait l’autre. Oui, l’homme est un être d’utopies, de distances, de « projets lyriques ». L’homme doit apprendre à être une créature de la proximité, un berger de l’immédiat.
Mes rêves ne me donnent qu’une version embrouillée de ce qui m’est très clair. Quand je rêve, je suis l’exégète confus de moi-même, le copiste casse-pieds à l’écriture indéchiffrable qui veut tout noter et qui mélange tout. Le rêve procure à ma vie un commentaire oisif et obscur, sans un secret, mais avec une part d’ombre.

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Coralie nous propose sa traduction :

Quand je m’extirpe de la forêt des rêves, de la jungle obscure du sommeil, que je me touche moi-même, je me complète lentement. Pourquoi ai-je cessé de m’intéresser à mes rêves ? Que Freud aille se faire foutre. Tout ce que nous sommes a, en effet, cet envers de rêve, ce ciment ou ce dépotoir trouble, et certains s’interrogeaient, avec ironie, sur les rêves de Kant, Descartes, ou Hegel. Quelle sorte de rêves ces monstres de raison pouvaient-ils faire ? Tout le refoulement mental de leurs systèmes devait avoir, sans aucun doute, un envers chaotique, douloureux et chagrin. Comment nier la part d’ombre de la vie, si les rêves s’y trouvent. Il y a une époque de l’existence où chacun décide de n’être que ses rêves, et le surréalisme est une adolescence dès que l’on veut se nourrir de rêves. Il y a une maturité, un classicisme ­–à n’importe quel âge de la vie– durant lequel nous optons pour notre raison, pour notre rigueur, pour notre stature. Quoi de plus ? Il est aussi puéril de vivre de rêves que de vivre de syllogismes. Bien sûr, on vit de ce qu’on peut, et l’on tarde à apprendre à vivre de réalités, de choses, d’objets, comme vivent les êtres naturels. L’homme est un être du lointain, dit l’autre. Oui, l’homme est un être d’utopies, de distances, de « projets lyriques ». L’homme doit apprendre à être une créature de proximité, berger de l’immédiat. Mes rêves ne me donnent qu’une version embrouillée de ce que je tiens pour très clair. Quand je rêve, je suis l’exégète confus de moi-même, le copiste indéchiffrable et casse-pieds qui veut tout noter et qui embrouille tout. Le rêve soumet à ma vie un commentaire oisif et obscur, sans secret, mais dans l’ombre.

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Morgane nous propose sa traduction :

Lorsque je m’accroche au bois des rêves, à la forêt obscure du sommeil, et que je me récompense moi-même, je vais complétant lentement. Car j’ai cessé de m’intéresser à mes rêves. Au diable Freud !

Tout ce que nous sommes, oui, recouvre ce revers onirique, ce ciment ou ce trouble recoin, et quelqu’un demandait, ironique, des nouvelles des rêves de Kant, de Descartes, de Hegel. Quel genre de rêves n’auraient ces monstres de la raison ? Toute la répression mentale de leurs systèmes devait avoir, sans doute, un envers chaotique, souffrant et affligé. Comment nier la moitié sombre de la vie, si les rêves sont là ? Il y a une époque de la vie où on décide de se réduire à ses rêves, et le surréalisme est une adolescence en ce qu’il veut s’alimenter de rêves. Il y a une maturité, un clacissisme – à n’importe quel âge de la vie – où nous optons pour notre raison, pour notre rigueur, pour notre stature. Que faut-il de plus. Il est aussi puéril de vivre de ses rêves que de vivre de syllogismes. Bien sûr, on vit de ce que l’on peut, et on tarde à apprendre à faire face à la réalité, aux choses, aux objets, comme vivent les êtres naturels. L’homme est un être lointain, dit l’autre. Oui, l’homme est un être d’utopie, de distances, de « projets lyriques ». L’homme doit apprendre à être une créature de proximité, pasteur de l’immédiateté. Mes rêves ne me donnent qu’une version confuse de ce qui est clair pour moi. Quand je rêve/ en rêvant, je suis l’exégète confus de moi-même, le copiste incompréhensible et casse-pied voulant tout noter et que tout embrouille. Le rêve dote ma vie d’un commentaire oisif et obscure, sans secret, mais avec une ombre.

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