mercredi 18 novembre 2009

Exercice de version, 1

Hoy, sin embargo, se había alterado la regla dominical, por culpa de aquel somnífero tragado en la madrugada para conseguir un pronto sueño — que no me venía ya como antes, con sólo poner sobre mis ojos la venda negra aconsejada por Mouche. Al despertar, advertí que mi esposa se había marchado, y el desorden de ropas medio sacadas de las gavetas de la cómoda, los tubos de maquillaje de teatro tirados en los rincones, las polveras y frascos dejados en todas partes, anunciaban un viaje inesperado.
Ruth me volvía del escenario, ahora, seguida por un rumor de aplausos, zafando presurosamente los broches de su corpiño. Cerró la puerta de un taconazo que, de tanto repetirse, había desgastado la madera, y el miriñaque, arrojado por sobre su cabeza, se abrió en la alfombra de pared a pared. Al salir de aquellos encajes, su cuerpo claro se me hizo novedoso y grato, y ya me acercaba para poner en él alguna caricia, cuando la desnudez se vistió de terciopelo caído de lo alto que olía como los retazos que mi madre guardaba, cuado yo era niño, en lo más escondido de su armario de caoba. Tuve como una fogarada de ira contra el estúpido oficio y fingimiento que siempre se interponía entre, nuestras personas como la espada del ángel de las hagiografías; contra aquel drama que había dividido nuestra casa, arrojándome a la otra —aquellas cuyas paredes se adornaban de figuraciones astrales—, donde mi deseo hallaba siempre un ánimo propio al abrazo.

Alejo Carpentier, Los pasos perdidos

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La traduction que je vous propose :

Et aujourd'hui, cependant, la règle dominicale avait été enfreinte, à cause de ce somnifère pris à l'aube pour rapidement trouver le sommeil – qui ne venait certes plus comme avant, où il me suffisait de mettre une bande noire sur mes yeux, comme me l'avait conseillé Mouche. À mon réveil, je remarquai que ma femme n'était plus là ; le désordre de vêtements en partie sortis des tiroirs de la commode, les tubes de maquillage pour la scène jetés ici et là, la présence des poudriers et flacons partout étaient le signe d'un voyage impromptu.
Ruth me revenait à présent de la scène, accompagnée par une rumeur d'applaudissements, détachant à la hâte les agrafes de son corsage. Elle ferma la porte d'un coup de talon ; geste qu'elle avait répété tant de fois que le bois avait fini par être usé. Quant à la crinoline, qu'elle jeta par-dessus sa tête, elle alla se répandre sur toute l'étendue du tapis, d'un mur à l'autre. En se dégageant de la gangue de dentelles, son corps blanc m'apparut dans sa nouveauté et dans sa douceur ; je m'approchai pour y déposer une caresse, quand la nudité se vêtit de velours, tombé d'en haut, et dont l'odeur était semblable à celle des chutes de tissus que ma mère conservait, alors que j'étais enfant, tout au fond de son armoire d'acajou. Je ressentis un emportement de colère contre son stupide métier, tout en simulacre, qui se mettait toujours entre nos deux personnages telle l'épée de l’ange des hagiographies, contre ce drame qui avait divisé notre maison, me repoussant vers l'autre – de celles dont on ornait les murs de représentations astrales –, où mon désir trouvait immanquablement un esprit disposé à l'étreinte.

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Sonita nous propose sa traduction :

Aujourd’hui, cependant, la règle dominicale avait été altérée, à cause de ce somnifère avalé à l’aube pour concilier le sommeil rapidement – que je ne trouvais plus comme avant rien qu’en posant sur mes yeux un bandeau noir conseillé par Mouche. En me réveillant je me rendis compte que ma femme était partie, et le désordre des vêtements qui dépassaient à moitié des tiroirs de la commode, les tubes de maquillage de théâtre jetés dans les coins, les poudriers et les flacons laissés un peu partout, annonçaient un voyage inattendu. Ruth revenait de la scène vers moi, maintenant, suivie d’une traînée d’applaudissements, se défaisant à la hâte des agrafes de son bustier. Elle ferma la porte d’un coup de talon, qui de s’être répété à l’infini avait usé le bois, et la babiole, jetée sur sa tête, s’ouvrit sur la moquette d’un côté à l’autre du mur. En se débarrassant de ces accoutrements, son corps clair devint à mes yeux inédit et agréable, et je m’en approchai déjà pour y déposer une caresse, quand la nudité se vêtit de velours venu de nulle part qui avait la même odeur que les tissus que ma mère gardait, quand j’étais enfant, caché au fin fond de son armoire en acajou. J’eus un accès de colère contre le stupide métier et la simulation qui s’interposaient entre nos personnes, comme l’épée de l’ange des hagiographies ; contre ce drame qui avait brisé notre foyer, me jetant dans les bras de l’autre – celles dont les murs se tapissaient de figurations astrales – où mon désir trouvait toujours l’état d’âme favorable à l’accolade.

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Céline nous propose sa traduction :

Aujourd’hui, cependant, on avait dérogé à la règle dominicale à cause de ce somnifère avalé sur le petit matin pour concilier un sommeil rapide – parce qu’il ne me venait plus aussi facilement qu’avant, avec la simple pose, sur mes yeux, de la bande noire conseillée par Mouche. À mon réveil, je remarquai que mon épouse était partie. Le désordre des vêtements à moitié sortis des tiroirs de la commode, les tubes de maquillage de théâtre jetés dans les coins, les poudriers et les flacons laissés un peu partout, annonçaient un voyage inespéré.
À présent, Ruth me revenait de la scène suivie par une rumeur d’applaudissements, défaisant à la hâte les agrafes de son corsage. Elle ferma la porte d’un coup de talon qui, par tant de répétition, en avait usé le bois. Et la crinoline, jetée par-dessus sa tête, s’étala sur le tapis d’un mur à l’autre. Libéré de cette dentelle, son corps pâle me parut nouveau et agréable, et je m’approchai déjà pour y mettre une caresse quand la nudité s’habilla de velours, tombé d’en haut, qui sentait comme les morceaux de tissu que ma mère gardait cachés au plus profond de son armoire d’acajou, quand j’étais petit. J’eus une flambée de colère contre ce stupide métier et la feinte qui s’interposait entre nos personnes, telle l’épée de l’ange des hagiographies ; contre le dit drame qui avait divisé notre maison, et m’avait jeté dans cette autre – de celles-là dont les murs s’ornent de représentations astrales-, où mon désir trouvait toujours un esprit propice à l’étreinte.

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Odile nous propose sa traduction :

Aujourd’hui, cependant, on avait dérogé à la règle dominicale à cause de ce somnifère avalé à l'aube pour concilier un sommeil rapide –un sommeil qui ne me venait plus aussi facilement qu’autrefois grâce à la simple pose sur mes yeux de la bande noire conseillée par Mouche. À mon réveil, je remarquai que mon épouse était partie et le désordre des vêtements à moitié sortis des tiroirs de la commode, les tubes de maquillage de théâtre jetés dans les coins, les poudriers et les flacons abandonnés un peu partout, annonçaient un voyage inespéré.
À présent, Ruth me revenait de la scène suivie par une rumeur d’applaudissements, défaisant à la hâte les agrafes de son corsage. Elle ferma la porte d'un coup de talon - tant de fois répété que cela avait fini par user le bois ; la crinoline, jetée par-dessus sa tête, s’étala sur le tapis d’un mur à l’autre. En émergeant de cette dentelle, son corps pâle me parut nouveau et agréable, et je m’approchai déjà pour le caresser quand la nudité s’habilla de velours, tombé d’en haut, qui sentait comme les morceaux de tissu que ma mère gardait au plus profond de son armoire d’acajou, quand j’étais enfant. J’eus une flambée de colère contre ce stupide métier et le faux-semblant qui s’interposait entre nos personnes, comme l’épée de l’ange des hagiographies ; contre ce drame qui avait divisé notre maison, me jetant dans l'autre- de celles dont les murs s’ornaient de représentations astrales-, où mon désir trouvait toujours un esprit propice à l’étreinte.

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Amélie nous proose sa traduction :

Aujourd’hui, cependant, on avait dérogé à la règle dominicale à cause de ce somnifère avalé au petit matin pour trouver rapidement le sommeil –qui ne me venait plus aussi facilement qu’avant, quand il suffisait que je pose sur mes yeux le bandeau noir conseillé par Mouche. En me réveillant, je me rendis compte que mon épouse était partie ; le désordre des vêtements à moitié sortis des tiroirs de la commode, les tubes de maquillage de scène jetés dans les coins, les poudriers et les flacons éparpillés, laissaient présager un voyage inattendu.
À présent, Ruth me revenait de la scène, suivie par une rumeur d’applaudissements, défaisant à la hâte les agrafes de son corsage. Elle ferma la porte d’un coup de talon qui, à force, avait fini par user le bois, et la crinoline, lancée par-dessus sa tête, s’étala sur le tapis d’un mur à l’autre. Libéré de ces dentelles, son corps pâle me parut nouveau et agréable, et je m’approchai déjà pour y déposer quelque caresse, quand sa nudité s’habilla de velours, tombé d’en haut, qui avait la même odeur que les morceaux de tissu que ma mère gardait quand j’étais petit, au plus profond de son armoire en acajou. J’eus une flambée de colère contre son stupide métier et artifice qui s’interposait toujours entre nous, comme l’épée de l’ange des hagiographies ; contre ce drame qui avait divisé notre maison et m’avait jeté dans cette autre – celle dont les murs étaient ornés de représentations astrales–, où mon désir trouvait toujours un esprit propice à l’étreinte.

3 commentaires:

Sonita a dit…

Bonjour Céline,
une petite question concernant ta traduction :
Pourquoi tu as choisi de traduire "arrojándome a la otra" par m'avait jeté dans cette autre ? Il me semble que le sens en français, avec cette traduction, reste obscur, inintelligible pour le lecteur, tu en crois pas?

Odile a dit…

Je partage la version de Céline,"la otra" se réfère bien à la maison, rien d'obscur ici pour un lecteur. Sa phrase est logique.

Unknown a dit…

Je te concède que ma traduction au résultat est bancale, mais pour moi "a la otra" renvoie à "casa" et non femme. Ici, il parle de sa vie de couple et déplore l'éloignement progressif qu'il y a eu entre sa femme et lui. Il me semble qu'il fait un parallèle entre l'idée du "couple-foyer" comme unité à la base or leur éloignement marquerait la division du foyer en deux.