samedi 1 novembre 2008

Devoirs de vacances, 7

Comme on ne présente pas Cervantes, je m'en tiens à un mini-commentaire personnel pour introduire la traduction du jour : il s'agit du passage sur lequel je suis tombée à l'oral (épreuve d'explication de texte) du concours d'entrée à l'ENS de Fontenay. Amusez-vous bien !

JUEZ. ¿ Qué pendencia traéis, buena gente ?

MARIANA. Señor, ¡ divorcio, divorcio, y más divorcio, y otras mil veces divorcio !

JUEZ. ¿ De quién, y por qué, señora ?

MARIANA. ¿ De quién ? Deste viejo, que está presente.

JUEZ. ¿ Por qué ?

MARIANA. Porque no puedo sufrir sus impertinencias, ni estar contino atenta a curar todas sus enfermedades, que son sin número ; y no me criaron a mí mis padres para ser hospitalera ni enfermera. Muy buen dote llevé al poder desta espuerta de huesos, que me tiene consumidos los días de la vida ; cuando entré en su poder, me relumbraba la cara como un espejo, y agora la tengo con una vara de frisa encima. Vuesa merced, señor juez, me descase, si no quiere que me ahorque ; mire, mire los surcos que tengo por este rostro, de las lágrimas que derramo cada día, por verme casada con esta anatomía.

JUEZ. No lloreís, señora ; bajad la voz y enjugad las lágrimas, que yo os haré justicia.

MARIANA. Déjeme vuesa merced llorar, que con esto descanso. En los reinos y en las repúblicas bien ordenadas, había de ser limitado el tiempo de los matrimonios, y de tres en tres años se habían de deshacer, o confirmarse de nuevo, como cosas de arrendamiento, y no que hayan de durar toda la vida, con perpetuo dolor de entrambas partes.

JUEZ. Si ese arbitrio se pudiera o debiera poner en práctica, y por dineros, ya se hubiera hecho ; pero especificad más, señora, las ocasiones que os mueven a perdir divorcio.

MARIANA. El invierno de mi marido, y la primavera de mi edad ; el quitarme el sueño, por levantarme a media noche a calentar paños y saquillos de salvado para ponerle en la ijada ; el ponerle, ora aquesto, ora aquello, que ligado le vea yo a un palo por justicia ; el cuidado que tengo de ponerle de noche alta cabecera de la cama, jarabes lenitivos, porque no se ahogue del pecho ; y el estar obligada a sufrirle el mal olor de la boca que le güele a tres tiros de arcabuz.

ESCRIBANO. debe de ser de alguna muela podrida.

VEJETE. No puede ser, porque lleve el diablo la muela ni diente que tengo en toda ella.

PROCURADOR. Pues ley hay, que dice (según he oído decir) que por sólo el mal olor de la boca se puede descasar la mujer del marido, y el marido de la mujer.

VEJETE. En verdad, señores, que el mal aliento que ella dice que tengo, no se engendra de mis podridas muelas, pues no las tengo, ni menos procede de mi estómago, que está sanísimo, sino desta mala intención de su pecho. Mal conocen vuesas mercedes a esta señora ; pues a fe que, si la conociesen, que la ayunarían, o la santiguarían. Veinte y dos años ha que vivo con ella mártir, sin haber sido jamás confesor de sus insolencias, de sus voces y de sus fantasías, y ya va para dos años que cada día me va dando vaivenes y empujones hacia la sepultura, a puras voces me tiene medio sordo, y, a puro reñir, sin juicio. Si me cura, como ella dice, cúrame a regañadientes ; habiendo de ser suave la mano y la condición del médico. En resolución, señores, yo soy el que muero en su poder, y ella es la que vive en el mío, porque es señora, con mero mixto imperio, de la hacienda que tengo.

Miguel de Cervantes, "Entremés del juez de los divorcios", in Entremeses,
Madrid, Editorial Castalia, « Clásicos Castalia », 1990, p. 61-63.

Une Jacqueline très en forme nous propose sa traduction :

LE JUGE. Quelle affaire vous amène, bonnes gens ?

MARIANA. Monsieur, c’est de divorce qu’il s’agit, de divorce et encore de divorce et plutôt mille fois qu’une !

LE JUGE. De qui, et pourquoi, madame ?

MARIANA. De qui ? De ce vieux que voilà.

LE JUGE. Pour quelle raison ?

MARIANA. Parce que je ne peux plus supporter ses impertinences, ni demeurer constamment à soigner toutes ses maladies, qui sont innombrables ; et puis mes parents ne m’ont pas élevée pour que je joue les dames de charité ni les infirmières. C’est une dot confortable que j’ai apportée à ce paquet d’os qui m’use la vie ; quand je suis tombée en son pouvoir, j’avais le visage aussi lisse qu’un miroir et à présent, il est tout chiffonné comme d’une vulgaire frise. Que vôtre grâce, monsieur le juge, veuille bien me démarier, si elle ne veut pas que j’aille au gibet ; regardez, regardez les sillons qui labourent ce visage, par la faute des larmes que je répands chaque jour, à me voir ainsi mariée avec une telle carcasse.

LE JUGE. Ne pleurez pas, madame ; baissez d’un ton et séchez vos larmes, car moi je vous rendrai justice.

MARIANA. Que vôtre grâce me laisse pleurer, car c’est mon seul repos. Royaumes et républiques bien ordonnées devraient limiter la durée du mariage et tous les trois ans le tenir pour défait ou bien le confirmer, comme d’un fermage, et non pas toute la vie le faire durer, engendrant une douleur sans fin pour chacune des deux parties.

LE JUGE. Si un tel expédient avait pu ou dû être mis en pratique, et moyennant finance, ce serait déjà fait ; mais explicitez davantage madame, les circonstances qui vous poussent à demander le divorce.

MARIANA. L’hiver où se trouve mon mari et le printemps de mon âge ; qu’il m’ôte le sommeil, par le fait de devoir me lever à minuit pour chauffer des linges et des petits sacs de son et les lui appliquer sur le flanc, et lui mettre tantôt ceci et tantôt cela, au point que je le verrais bien, moi, lié à un bois de justice, que je supporte la charge de disposer en pleine nuit à son chevet des potions lénifiantes pour lui éviter une fluxion de poitrine ; que je doive supporter sa mauvaise haleine qui pue à trois jets d’arquebuse.

LE GREFFIER. Ce doit être à cause de quelque molaire pourrie.

LE BARBON. Ce ne peut être, que le diable emporte la molaire et la dent que j’ai contre elle.

LE JUGE. Il est vrai qu’il y a une loi qui dit (d’après ce que j’ai entendu dire) qu’au seul motif d’une mauvaise haleine, la femme peut se démarier de son époux et l’époux de sa femme.

LE BARBON. En vérité, messires, la mauvaise haleine qu’elle m’attribue n’est pas engendrée par mes molaires pourries, parce qu’elles ne le sont pas, et ne provient point davantage de mon estomac, qui est très sain, mais de la mauvaise disposition de son cœur. Vos grâces connaissent mal cette dame ; car si elles la connaissaient, elles la condamneraient au jeûne ou bien elles se signeraient en la voyant. Voilà vingt-deux ans que j’endure le martyre avec elle, sans avoir jamais rien avoué de ses insolences, de ses cris et de ses lubies, et cela fait bien deux ans que chaque jour elle m’assène soufflets et poussées qui me portent à la tombe, elle me rend à demi sourd à force de crier et de gronder, sans raison. Et s’il est vrai qu’elle me soigne, comme elle le dit, elle le fait en rechignant ; alors que la main et le rôle d’un médecin doivent être doux. Donc, messires, c’est moi qui me meurs d’être en son pouvoir et c’est elle qui vit du mien, car elle règne, alors qu’elle n’est que ma mie, sur mon bien.

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