mardi 29 mai 2012

Version pour le 27 mai


EN EL DESPACHO DEL GOBERNADOR

El GOBERNADOR, vestido a la usanza de los conquis­tadores, conquistador él mismo, pelo y barbas en tur­bión de azafranados hilos, celestes los ojos, blanca la tez, duro el porte hidalgo, ocupa el sillón frente a la mesa, bajo la estrella del ventanuco que recoge la claridad de la alta noche, muy junto al velón, cuya luz de oro viejo le baña el rostro, y no lejos de PEDRALES, su letrado y hombre de confianza a quien dicta una carta. PEDRA­LES ocupa la otra silla del despacho y viste de letrado.
GOBERNADOR (dictando).-... Os escribo reducido a la impotencia de tener que defender con la pluma mojada en tinta de desengaños, tierras y bienes que conquisté con la espada... (Violento.) ¡No pongáis nada de eso.., o ponedlo...! Os escribo... (Indeciso.) O mejor comenzar como habíamos pensado: Ilustre señor, con ésta son dos cartas... (Vuelve a interrumpirse.) ¡Maldita sea...! ¡Guerrear..., guerrear sabía yo...! (No dice más
porque con su exclamación están a, punto de quedar en la oscuridad.)
PEDRALES. -¡Acabaréis, señor, por mellar la llama del velón! (Y esto diciendo se hace pantalla con las ma­nos para evitar que se apague.) ¡Quieta...! ¡Quieta..., lengua de oro! (Habla a la llama.) ¡Pacífica, doméstica, eclesiástica..., mal os avenís al proceloso respirar de los hombres de guerra...! (Estabilizado el velón, retoma el hilo de la carta, la pluma de ave en la mano, presto a escribir.) ... Con ésta son dos cartas... (El GOBERNA­DOR levanta un legajo de la mesa, lo abre y lee sólo para él. Un momento después.) ¿Consultáis el Memorial del Ayuntamiento a Su Majestad? Parad mientes que en ese papel se dice a fojas siete que no se han pregonado ni puesto en vigor las leyes que mandan poner en li­bertad a los indios esclavos...
El GOBERNADOR se queda absorto en su lectura. PE­DRALES calla.

Miguel Ángel Asturias, La audiencia de los confines

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Justine nous propose sa traduction :

DANS LE BUREAU DU GOUVERNEUR

LE GOUVERNEUR, vêtu selon la mode des conquistadors, conquistador lui-même, les cheveux et la barbe en une foule de fils couleur safran, les yeux d’un bleu céleste, le teint blanc, dure son allure hidalgo. Il occupe le fauteuil en face de la table, sous l’étoile de la lucarne qui laisse passer la clarté de la nuit déjà bien avancée, très près de la bougie dont la lumière d’or ancien baigne son visage et non loin de PEDRALES, son secrétaire et homme de confiance à qui il dicte une lettre. PEDRALES est assis sur l’autre chaise du bureau et est habillé en secrétaire.
LE  GOUVERNEUR (qui dicte) — … Je vous écris,  réduit à l’impuissance de devoir défendre par la plume trempée dans l’encre, les désillusions, les terres et les biens que j’ai conquis à l’épée…
(Violent.) N’écrivez rien de cela… ou si, écrivez-le… ! Je vous écris…(Indécis). Il vaudrait peut-être mieux commencer comme nous avions pensé : Votre éminence, avec celle-là, cela fait deux lettres… (Il s’interrompt de nouveau.) Mince alors…Guerroyer, je savais guerroyer moi… ! (Il ne dit pas un mot de plus car, après son exclamation, ils étaient sur le point de se retrouver dans le noir.)
PEDRALES. — Monsieur, vous allez finir par souffler la flamme de la bougie ! (et joignant le geste à la parole, il met les mains en écran devant la flamme pour éviter qu’elle ne s’éteigne.) Tranquille…. ! Tranquille..., langue d’or ! (Il s’adresse à la flamme). Pacifique, domestique, ecclésiastique…, vous vous accordez mal avec la respiration orageuse des hommes de guerre… ! (La bougie stabilisée, il reprend le fil de la lettre ; la plume d’oiseau à la main, prêt à écrire). … Avec celle-là, cela fait deux lettres…(LE GOUVERNEUR se saisit d’un dossier sur la table, l’ouvre et lit pour lui-même. Un moment plus tard). Avez-vous consulté Sa Majesté à propos du Mémorial de la Mairie ? Faites attention car dans ce document, il est dit page sept que, les lois prônant la liberté des esclaves indiens n’ont pas été annoncées publiquement et ne sont pas entrées en vigueur…
LE GOUVERNEUR reste absorbé dans sa lecture. PEDRALES se tait.

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Danièle nous propose sa traduction :

DANS LE BUREAU DU GOUVERNEUR

Vêtu à la manière des conquérants, conquérant lui-même, le GOUVERNEUR, au port sévère d’hidalgo, cheveux et barbe en bataille aux fils couleur safran, les yeux bleu clair et le teint pâle, occupe le fauteuil en face de la table sous l’étoile de la petite fenêtre qui recueille la clarté de la nuit profonde, tout contre la lampe à huile dont la lumière vieil or lui baigne le visage et pas loin de PEDRALES, son homme de loi et de confiance à qui il dicte une lettre. PEDRALES, habillé en homme de loi, occupe l’autre siège du bureau.
LE GOUVERNEUR ( en train de dicter) : 
- « Je vous écris, réduit à l’impuissance d’avoir à défendre de ma plume teintée de désillusions, des terres et des biens que je conquis à l’épée...(Violent). N’écris pas cela !..., ou plutôt, si, écris-le... ! Je vous écris... (Indécis). Il vaut mieux commencer comme nous le pensions : Illustre seigneur, avec celle-ci, ce sont deux lettres....(Il s’interrompt à nouveau). Bon sang... ! faire la guerre..., faire la guerre, pouvais-je savoir, ... ! » ( Il s’arrête de parler car à peine a-t-il fini sa phrase qu’ils sont sur le point de rester dans le noir).
PEDRALES : -«  Arrêtez, Maître, vous allez éteindre la flamme de la lampe ! (Tout en parlant, il fait un écran de ses mains pour éviter qu’elle ne s’éteigne). Calme ... ! calme...  langue d’or ! (Il parle à la flamme). Pacifique, domestique, ecclésiastique... vous ne pouvez vous entendre avec la respiration agitée des hommes de guerre... ! (La lampe redevenue normale, il reprend le fil de la lettre, prêt à écrire, la plume d’oie à la main.) ... Avec celle-ci, ce sont deux lettres... »
(LE GOUVERNEUR soulève un registre de la table, l’ouvre et le lit tout seul. Un moment après.) :
-«  Vous consultez le Mémoire de l’Assemblée pour Sa Majesté ? Cessez de croire qu’au feuillet sept, il est dit que l’on n’a ni annoncé, ni mis en vigueur les lois qui ordonnent de mettre en liberté les indiens esclaves... »
LE GOUVERNEUR reste absorbé dans sa lecture. PEDRALES se tait.

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Manon nous propose sa traduction :

DANS LE BUREAU DU GOUVERNEUR

Le GOUVERNEUR, vêtu selon la mode des conquistadors, conquistador lui-même, les cheveux et la barbe en bataille et safranés par endroits, les yeux bleu clair, le teint blanc, l’allure noble et sévère, assis dans le fauteuil face à la table, sous l’étoile de la petite fenêtre qui laisse entrer la lumière de la nuit dégagée, à laquelle s’ajoute celle de la lampe à huile, une lumière d’or terni qui éclaire son visage. Non loin, PEDRALES, son avocat et homme de confiance à qui il dicte une lettre. PEDRALES occupe l’autre chaise du bureau et est vêtu de son habit d’avocat.
GOUVERNEUR (dictant) : …Je vous écris, réduit à l’impuissance d’avoir à défendre avec la plume trempée dans l’encre de la désillusion les terres et les biens que j’ai conquis avec l’épée… (Violent.) Ne mettez rien de cela…, ou mettez-le…! Je vous écris… (Indécis.) Ou c’est mieux de commencer avec ce à quoi nous avions pensé : Monsieur, avec ceci, vous trouverez deux lettres… (Il s’interrompt à nouveau.) Merde alors ! Faire la guerre…, faire la guerre, je le savais… ! (Il ne dit rien de plus car, à cause de son emportement, ils sont presque dans le noir.)
PEDRALES : Monsieur, vous finirez par éteindre la flamme de la lampe à huile ! (Tout en disant cela, il la recouvre avec ses mains pour éviter qu’elle s’éteigne.) Calme-toi…! Calme-toi…langue d’or ! (Il parle à la flamme.) Pacifique, domestique, ecclésiastique…, vous vous accommodez mal du souffle orageux des hommes de guerre… ! (Une fois la lampe à huile stabilisée, il reprend le fil de la lettre, la plume d’oie dans la main, prêt à écrire.) … Avec ceci, vous trouverez deux lettres… (Le GOUVERNEUR prend un dossier sur la table, l’ouvre et le lit pour lui-même. Un moment après.) Vous consultez le journal de la commune à Sa Majesté ? Soyez bien attentif au fait que, dans ce papier, il est dit à la page sept que les lois ordonnant la mise en liberté des esclaves indiens n’ont été ni publiées ni mises en vigueur.
Le GOUVERNEUR reste absorbé par sa lecture. PEDRALES se tait.


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