mardi 5 juin 2012

Version pour le 4 juin


Una historia, cualquiera, se desvanece, pero la vida que ha sido rozada por esa historia queda por toda la eternidad. El recuerdo se borra, pero queda otra cosa en su lugar. La tierra toma formas eternas, mientras que el agua se adapta a la fugacidad de todas las cosas, transcurriendo sobre ellas. No se pierde en los repliegues de la multiplicidad sino que toma de ellos una cualidad de infinito que la vuelve perfecta e inmodificable. En cuanto al aire, es un destino de las cosas y las vidas; cuando sólo el recuerdo se aferra a los giros de una hoja desprendida, el vacío que ha cavado en el aire intermedio entre los cielos delicadamente superpuestos y la tierra opaca resplandece de pronto, en una eternidad que imita la del silencio y oyen los que tienen el oído muy aguzado. Pero las vidas pasan, y con ellas todo lo demás: civilizaciones, imperios, y hasta la visión y la belleza de los paisajes en su ciclo acuarelado de estaciones. No lo creemos, pero es así. Nunca podemos creerlo, porque nos distrae la irisada contemplación de nuestras propias vidas que se reflejan en otros, en otros innumerables, a veces amados. La ciencia de la Historia ha creado un gran malentendido en ese aspecto. Sucede que, por definición, la Historia no admitirá que es irreal. Y sin embargo deberíamos buscar en la irrealidad su definición.

César Aira,  Una novela china


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Justine nous propose sa traduction :

N'importe quelle histoire disparaît, mais la vie qui a été frôlée par cette histoire demeure pour l'éternité. Le souvenir s'efface, mais laisse place à autre chose. La terre prend des formes éternelles, alors que l'eau s'adapte à la fugacité de toutes choses en s'écoulant sur elles. Elle ne se perd dans les replis de la multiplicité, mais elle y puise au contraire une qualité d'infini qui la rend parfaite et inaltérable. Quant à l'air, c'est un destin des choses et des vies ; lorsque le souvenir s'accroche juste aux mouvements circulaires d'une feuille morte, le vide qu'elle a creusé dans l'air intermédiaire entre les cieux délicatement superposés et la terre opaque, resplandit immédiatement en une éternité, qui imite celle du silence et qu'entendent ceux qui ont l'ouïe très fine. Mais les vies passent et avec elles tout le reste : Des civilisations,en passant par les empires, jusqu'à la vue et la beauté des paysages dans leur cycle des saisons peint à l'aquarelle. Nous n'y croyons pas, mais c'est comme ça. Jamais nous nous pouvons y croire, car nous sommes distraits par la contemplation irisée de nos propres vies qui se reflétent chez d'autres personnes, d'autres gens innombrables que nous avons parfois aimé. La science de l'Histoire a généré un malentendu important concernant cet aspect. Voilà ce qui se passe : par définition, l'Histoire n'admetttra pas qu'elle est irréelle. Mais, nous devrions néanmoins chercher sa définition dans l'irréalité.

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Manon nous propose sa traduction :

Une histoire, quelle qu’elle soit, s’efface, mais la vie qui s’y est frottée, elle, est éternelle. Le souvenir disparaît, mais à la place, autre chose reste. La terre prend des formes éternelles, alors que l’eau, en s’écoulant sur les choses, s’adapte à leur fugacité. Elle ne se perd pas dans les replis du foisonnement des choses mais leur emprunte une qualité sans fin qui la rend parfaite et immuable. Quant à l’air, il est le destin des choses et des vies ; quand seul le souvenir s’accroche aux tourbillons d’une feuille désintéressée, le vide qu’il a creusé dans l’air, entre les cieux délicatement superposés et la terre opaque, resplendit aussitôt, dans une éternité pareille à celle du silence, et que ceux qui ont l’ouïe très fine entendent. Cependant, les vies passent, et avec elles tout le reste : les civilisations, les empires, et jusqu’à la vision de beauté des paysages dans leur cycle des saisons aux couleurs aquarelle. Nous ne le croyons pas, mais c’est comme cela. Nous ne pouvons jamais le croire, parce qu’on est distrait par la contemplation irisée de nos propres vies qui se reflètent chez les autres, ces autres innombrables, parfois aimés. La science de l’Histoire a créé un grand malentendu en ce sens. Il arrive que, par définition, l’Histoire n’admette pas que c’est irréel. Et cependant, nous devrions chercher dans l’irréalité sa définition.


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Elena nous propose sa traduction :

Une histoire, peu importe laquelle, disparaît, mais la vie effleurée par cette histoire demeure pour toute l'éternité. Le souvenir s'efface, mais il reste quelque chose d'autre à sa place. La terre prend des formes éternelles, tandis que l'eau s'adapte à la fugacité de toutes les choses s’écoulant sur elles.  Elle ne s'égare pas dans les replis de la multiplicité, mais au lieu de cela, elle puise en eux la qualité d'infini qui la rend parfaite et immuable. Quant à l'air, il est le destin des choses et des vies ; lorsque seul le souvenir s’accroche aux tournoiements d'une feuille qui tombe, le vide qu'elle creusa dans l'air intermédiaire entre les cieux délicatement superposés et la terre opaque resplendit tout à coup, dans une éternité qui imite celle du silence et seul entendent ceux qui ont l'oreille très fine. Néanmoins, les vies passent et avec elles, tout le reste : les civilisations, les empires, et même la vue et la beauté des paysages dans leur cycle aquarellé de stations. Nous n’y croyons pas ; or c'est ainsi.  Nous ne pouvons jamais le croire, car nous sommes distraits par l'irisée contemplation de nos propres vies qui se reflètent chez les autres, d’innombrables autres, parfois aimés. La science de l'Histoire engendra un énorme malentendu à cet égard. Il arrive que, par définition, l'Histoire n’admettra pas qu'elle est irréelle. Et pourtant, nous devrions chercher sa définition dans l'irréalité.

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