« Dis-le ! Mais dit-le ! »
— Kelly, je peux entrer ? Je te dérange pas ?
— Vas-y.
— Je peux prendre une pomme ?
— …
— Tu en as marre de moi, hein ?
— …
— Mais si, je sais que tu me supportes pas, je vois bien que tu m'évites, que tu fuis mon regard, que tu changes d'attitude dès que j'entre dans ton champ de vision. C'est mon côté pique-assiette, c'est ça ? Je te signale quand même que je ne fouille plus dans vos placards, je trouve ma nourriture ailleurs, et j'ai fait réparer ma voiture pour aller acheter mes cigarettes, je fais des efforts !
— Hum !
— Et puis, je te jure que je vais arrêter de venir regarder la télé pendant des heures dans votre salon, mais comprends-moi, il y a plein de sucreries ici. Ne me regarde pas comme ça ! Tu me supportes plus, tu peux me le dire, plus personne me supporte de toute façon. Dis-le ! Mais, dis-le !
— Je n'irai pas jusque là.
— Avant, je participais aux tâches : je déplaçais les meubles, j'aidais les petits à faire leurs devoirs et tout. Mais j'ai laissé tomber, je suis devenu fou, je me suis perdu, tu t'en es rendu compte et j'ai du mal à remonter la pente. Ne cherche pas à me faire culpabiliser parce que j'assume la vie que je mène. Attends, ce sont que des biens matériels, je fais rien de mal. En plus, depuis mardi, t'as remarqué, je suis revenu. J'ai compris. Je m’intéresse à ce que tu fais, je veux discuter, je veux me faire accepter. Bon, c'est vrai que j'ai échoué en oubliant d'aller récupérer votre enfant, hier, c'était ma mission, tu comptais sur moi et j'ai oublié, on fait tous des erreurs. Je fais fuir tout le monde de sa propre maison, c'est moi qui suis chez vous mais c'est vous qui partez pour ne plus avoir à subir ma présence. J'abuse de votre gentillesse, je le sais. Vous dites du mal de moi derrière mon dos, je le sens. Pourquoi tu joues du piano sur tes lèvres ? C'est parce que tu me supportes pas, alors, pourquoi tu me le dis pas ?
— Je n'ai rien à te dire.
— Je suis sûr que si, et j'ai tout mon temps. Je vais rester là jusqu'à ce que tu me dises ce que tu penses de moi.
— J'ai du travail, tu sais ?
— Tu me méprises parce que moi, je ne travaille pas, j'en étais sûr.
— Non, pas du tout, je…
— Si, c'est évident, personne m'accepte comme je suis, mais il faudrait que vous soyez tous comme moi ! Quoi qu'il en soit, j'ai décidé de retaper ma maison, petit à petit, donc je ne vivrai plus ici. Tu vas me dire ce que tu penses de moi ? Dis-le !
— Eh bien, je pense simplement qu'à trente-neuf ans, il est temps d'être autonome et de cesser de vivre aux dépens des autres.
— Quoi ? Mais pourquoi tu dis ça ?
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